Les électeurs du canton de Zurich se sont exprimés dimanche à une large majorité pour le maintien de l'aide au suicide, aussi pour des étrangers non-résidents en Suisse, alors que plusieurs partis avaient milité contre «le tourisme de la mort».

Les deux initiatives populaires contre l'aide au suicide présentées par les partis conservateurs de l'Union démocratique fédérale (UDF) et du Parti évangélique (PEV) ont été balayées par les électeurs zurichois, canton le plus peuplé de Suisse et qui a régulièrement accueilli ces dernières années des étrangers voulant mettre fin à leur existence.

La première motion contre le «tourisme de la mort», visant à imposer une obligation de résidence d'au moins un an dans le canton aux personnes étrangères voulant bénéficier de l'aide au suicide, a été rejetée à 78,4% (218 602 contre, 60 186 pour), selon les résultats définitifs.

La seconde initiative lancée par les deux partis, visant à demander une interdiction au niveau national de l'aide au suicide, a également été largement rejetée par les électeurs zurichois à 84,5% (234 956 contre, 43 165 pour).

«Le droit de mourir est une affaire privée, qui ne concerne ni l'État et encore moins l'Église», a réagi le vice-président de l'association d'aide au suicide Exit, Bernhard Sutter.

«Il s'agit d'un signe clair de Zurich et correspond à la tradition humanitaire de la Suisse de venir en aide aux autres», a-t-il dit à l'AFP.

À la différence de l'association Dignitas, qui assiste également des étrangers non-résidents, Exit ne soutient que des personnes domiciliées dans la Confédération.

«Nous sommes une organisation responsable et devons effectuer des vérifications, lire le dossier médical. Cela n'est pas possible lorsque les gens ne se trouvent pas en Suisse», a plaidé M. Sutter.

L'association Dignitas, contactée par l'AFP, n'était pas dans l'immédiat disponible pour commenter les résultats du vote.

Dignitas et son fondateur controversé Ludwig Minelli ont proposé ces dix dernières années à plus de 1000 étrangers, principalement des personnes en phase terminale d'une maladie, de profiter d'une législation suisse autorisant l'aide au suicide sous certaines conditions.

La réglementation autorise l'assistance au suicide lorsque celle-ci ne se fonde pas sur un mobile «égoïste». Cette aide ne peut être apportée que de façon passive en procurant par exemple les médicaments permettant à une personne de mettre fin à ses jours.

L'assistance active -aider une personne à prendre ou administrer un produit- est interdite.

Selon les chiffres fournis par Dignitas, l'organisation avait accompagné fin 2010 au total 1138 personnes, dont 592 en provenance d'Allemagne, 102 de France, 118 de Suisse, 19 d'Italie, 18 des États-Unis et 16 d'Espagne.

Selon M. Sutter, «les pays européens doivent prendre eux-mêmes leurs problèmes en main (et) l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni doivent faire des efforts». «La Suisse ne doit pas se laisser intimider» par ces pays, a-t-il souligné.

Le débat sur l'aide au suicide donne régulièrement lieu à des controverses en Europe.

En France, où l'histoire de Vincent Humbert, jeune tétraplégique que sa mère avait aidé à mourir en 2003, avait ému l'opinion publique, les sénateurs ont voté en janvier contre une proposition de loi voulant instaurer «une assistance médicalisée pour mourir».

Au Royaume-Uni, où l'aide au suicide reste un crime punissable de 14 ans de prison, le parquet britannique avait clarifié en février 2010 la loi sur le suicide assisté, rendant moins probables des poursuites contre une personne aidant un proche à se suicider.