L'élection présidentielle de Barack Obama avait été célébrée autant par l'homme de la rue que par les politiciens en Europe. Deux ans et demi plus tard, les esprits se sont refroidis. Malgré sa tournée européenne cette semaine, sa neuvième visite dans la région, Barack Obama boude le Vieux Continent, explique notre collaboratrice.

Une des premières décisions de Barack Obama à la Maison-Blanche, en janvier 2009, fut de renvoyer à la Grande-Bretagne un buste de Winston Churchill prêté huit ans plus tôt à George Bush.

L'ambassadeur de Grande-Bretagne à Washington avait invité le nouveau président à conserver le bronze pour quatre années supplémentaires. «No, thanks», avait répondu la Maison-Blanche.

Le ton était donné. Les relations transatlantiques, sous Barack Obama, ne seraient plus les mêmes.

Les Britanniques ne lui en tiennent pourtant pas rigueur. Ils lui dérouleront le tapis rouge à Londres la semaine prochaine, à l'occasion d'une tournée européenne qui mènera aussi le président en Irlande, en France et en Pologne.

Invités d'honneur de la reine Élisabeth, Barack et Michelle Obama dormiront au palais de Buckingham.

Le point culminant de cette visite de deux jours sera le discours de Barack Obama au Parlement de Westminster. Comme une amoureuse délaissée, la Grande-Bretagne surveillera chacun de ses mots pour être rassurée sur la «relation spéciale» entre les deux pays.

Relations à la dérive

À sa première tournée européenne en juillet 2008, le candidat démocrate à la présidence faisait courir les foules. Il promettait une coopération étroite avec des «alliés européens forts.»

Dans les faits, il a libéré les États-Unis des «chaînes» d'un partenariat avec l'Europe, soutient l'analyste Alexis Crow. «Pour des raisons économiques et peut-être sentimentales - enfant, Obama a passé quatre années en Indonésie -, il a davantage courtisé les économies émergentes de l'Asie», dit la chercheuse de Chatham House.

L'administration Obama avait d'ailleurs préféré s'allier avec la Chine, l'Inde, le Brésil et l'Afrique du Sud pour en venir à un accord sur les changements climatiques, au sommet de Copenhague en 2009. «Les Européens n'avaient même pas été consultés», dit Jan Techau, directeur du groupe de réflexion Carnegie en Europe.

Déception des Européens

Sur le dossier libyen, la Maison-Blanche fut lente à appuyer la zone d'exclusion aérienne proposée par David Cameron et Nicolas Sarkozy. «Le message aux Européens était: à vous de prendre les rênes sur ce qui se passe dans votre cour arrière», dit Alexis Crow.

D'ailleurs, la visite européenne du président américain survient quelques jours après son discours sur le printemps arabe et le conflit israélo-palestinien, accueilli tièdement par la presse européenne.

Cette dernière s'est montrée sceptique face à son aide financière à l'Égypte et la Tunisie, dont la comparaison au plan Marshall de 1947 fut ridiculisée par le quotidien allemand Der Spiegel. Et son omission de l'Arabie Saoudite parmi les dictatures arabes n'est pas passée inaperçue.

Même si le vernis de sa présidence craque, il sera accueilli à bras ouverts dans le Vieux Continent. «Il est encore très populaire. Et l'Europe a toujours besoin de Barack Obama», dit Jan Techau, de Carnegie.