Le dirigeant pro-russe de la Tchétchénie, Ramzan Kadyrov, qui fête en grande pompe ses 35 ans mercredi à Grozny, est un homme redouté dans la petite république du Caucase, qui a juré de tuer ses ennemis «jusqu'au dernier». «Je les tuerai jusqu'au dernier, ou alors jusqu'à ce qu'on me tue ou qu'on me jette en prison. Tant que je serai vivant, je tuerai», lance-t-il en 2005.

Ramzan Kadyrov, alors vice-premier ministre tchétchène, vise les rebelles séparatistes qui ont tué en 2004 son père Akhmad, le président pro-russe de la Tchétchénie et ancien mufti de la république caucasienne.

Ramzan prendra sa place en février 2007, âgé à peine de 30 ans, sur décision du président russe de l'époque, Vladimir Poutine.

Depuis plusieurs années, il dirige les fameux «kadyrovtsi», des unités paramilitaires qui sont accusées de semer la terreur dans les villages pour punir les proches de membres de la rébellion.

Ramzan Kadyrov, un costaud à la barbe rousse et au profil de boxeur, a l'expérience des armes.

Adolescent, il combattait les forces russes aux côtés de son père lors du premier conflit sécessionniste avec Moscou (1994-1996). Mais Akhmad Kadyrov, inquiet de la montée en puissance des islamistes, rejoint Poutine au déclenchement de la deuxième guerre de Tchétchénie (1999).

Ramzan, né le 5 octobre 1976 à Tsentoroï en Tchétchénie soviétique, devient alors rapidement le bras armé de son père grâce à ses redoutables milices.

«Je suis peu instruit. Je ne pouvais pas faire des études, il y avait des guerres, il fallait faire la guerre», déclare-t-il en 2003.

Une fois président, il troque parfois le treillis pour un costume, se montrant intéressé par les questions économiques, mais n'hésite pas à menacer les organisations de défense des droits de l'homme qui enquêtent sur les exactions présumées de ses troupes.

Un an après le meurtre de Natalia Estemirova, la représentante de Mémorial à Grozny -un crime dont l'ONG accuse son régime, il qualifie ces militants «d'ennemis du peuple».

Dans sa république, les autorités n'hésitent guère à entretenir un culte de la personnalité de M. Kadyrov, dont le portrait se dresse un peu partout à Grozny.

Ramzan Kadyrov affiche aussi son goût pour les grosses cylindrées -il se déplace dans un cortège de 4X4 Porsche-, et sa résidence officielle est ornée de deux lions monumentaux en bronze. Il possède aussi un tigre et un ours vivants avec lesquels il aime épater ses visiteurs.

Mercredi, jour de la fête de Grozny et accessoirement anniversaire de M. Kadyrov, les autorités tchétchènes ont indiqué aussi avoir invité à coups de centaines de milliers de dollars des stars de la chanson, comme Shakira, qui a démenti.

Ramzan Kadyrov a affirmé que la chanteuse colombienne avait annulé après que des ONG lui eurent «écrit une lettre pour qu'elle ne vienne pas chez nous, en affirmant qu'ici on tuait des gens et qu'on violait les droits de l'homme».

Interrogé par un journaliste sur l'origine du financement des festivités, M. Kadyrov a répondu, selon le site Gazeta.ru : «C'est Allah qui le donne. Je ne sais pas. L'argent vient bien de quelque part».

Sur le plan politique, grâce aux subventions du gouvernement, M. Kadyrov a effacé largement les traces physiques des guerres qui ont ravagé Grozny. L'avenue Vladimir Poutine qu'il a fait tracer en centre-ville respire le neuf, et une gigantesque mosquée dédiée à son père a été construite.

Et bien que des embuscades et des attentats-suicide orchestrés par la guérilla islamiste aient lieu régulièrement, une paix précaire a été instaurée en Tchétchénie.

Homme paradoxal, ses extravagances et sa fidélité à M. Poutine ne l'empêchent pas de proclamer que la loi islamique est supérieure «aux lois de la Fédération de Russie».

Il est difficile de trouver de l'alcool en Tchétchénie, le foulard y est imposé aux femmes, et M. Kadyrov, père de sept enfants, préconise la polygamie.