Vladimir Poutine souhaite que l'industrie cinématographique du pays s'inspire des pratiques hollywoodiennes... des années 30.

Cette semaine, le premier ministre russe a proposé l'instauration d'un code éthique et moral «volontaire» pour les cinéastes. Pendant ce temps, les salles qui devaient présenter un documentaire allemand sur l'oligarque emprisonné Mikhaïl Khodorkovski, ennemi juré de l'homme fort de Russie, font marche arrière.

À sa rencontre avec le Conseil du cinéma lundi, Vladimir Poutine a indiqué que l'industrie devrait adopter des normes morales, semblables au code Hays qui a régi la censure des productions hollywoodiennes de 1930 à 1967.

«Nos cinémas, nos ondes télévisuelles et radiophoniques, sont de plus en plus remplis de productions avec des scènes de violence, de meurtre et de trahison», s'est insurgé le premier ministre.

Mais «il n'est pas question de «forcer [quiconque] à défendre une position ou à soutenir une quelconque idéologie», a-t-il précisé, en voulant se faire rassurant. L'application de ces «voeux» se ferait «selon le bon vouloir et le degré de responsabilisation des cinéastes.»

Coup de pouce présidentiel

Or par le passé, Vladimir Poutine a déjà démontré que le financement des productions russes pouvait dépendre de sa propre volonté toute-puissante.

En septembre dernier, lorsque le réputé réalisateur Alexander Sokourov a reçu le Lion d'or du Festival de Venise pour Faust, il a révélé que son long métrage n'aurait jamais vu le jour sans une intervention de Poutine.

Poutine a fait apparaître comme par magie les fonds nécessaires, ne posant qu'une seule condition: que le film soit une production à 100% russe. Un mois plus tard, 12 millions de dollars venaient relancer le tournage, gracieuseté de généreux hommes d'affaires russes et d'un fonds public de soutien au cinéma. Ironiquement, cette adaptation de la pièce de Goethe était... une méditation sur la corruption du pouvoir.

A contrario, certains films ont plus de difficulté à obtenir l'aval des autorités russes. C'est le cas du documentaire allemand Khodorkovski, du nom du magnat du pétrole emprisonné depuis 2003 pour évasion fiscale et vol de pétrole, mais surtout pour s'être opposé à Vladimir Poutine, selon les organisations de défense des droits de la personne.

Le film, qui donne la parole aux supporteurs comme aux détracteurs de Khodorkovski, devait sortir dans une vingtaine de salles du pays le 2 décembre. Or, plusieurs d'entre elles se sont désistées au dernier moment. Selon les distributeurs, un appel d'un haut placé du Comité de la culture de Moscou à certains propriétaires de salles les aurait convaincus de ne pas s'engager. D'autres auraient agi par autocensure, craignant des représailles des autorités à la veille des législatives du 4 décembre.