La décision du milliardaire Mikhaïl Prokhorov de se présenter à l'élection présidentielle de mars 2012 pourrait être un «plan du Kremlin» visant à calmer les protestations en Russie contre le résultat des législatives du 4 décembre, a estimé mardi la presse russe.

M. Prokhorov, qui avait été évincé de la tête d'un petit parti de droite Pravoe Delo (Juste Cause) en septembre après un conflit avec le Kremlin, a annoncé lundi sa candidature à la présidentielle.

C'est une «décision tactique visant à apaiser les tensions dans la société et affaiblir les protestations» de masse contre la victoire du parti au pouvoir Russie unie du premier ministre Vladimir Poutine aux législatives, a déclaré une source proche du Kremlin, citée mardi par le quotidien économique Vedomosti.

Même si M. Prokhorov a indiqué n'avoir informé à l'avance ni M. Poutine ni le président Dmitri Medvedev de sa décision, l'annonce de sa candidature «n'a pas été une surprise» pour le chef du gouvernement, a affirmé cette source.

Pour l'expert indépendant Stanislav Belkovski, cité par le quotidien en ligne Gazeta.ru, «le Kremlin avance la candidature de Prokhorov pour calmer les protestations et pour que tout le monde soit excité en voyant quel bon garçon se présente à la présidentielle».

«Alors que certains sont ravis de l'apparition d'un candidat incarnant un vote de protestation, d'autres sont sûrs que c'est un plan du Kremlin», résume le quotidien Kommersant.

Mikhaïl Prokhorov, 46 ans, troisième fortune de Russie selon le magazine Forbes avec 18 milliards de dollars, avait été propulsé en juin à la tête de Juste Cause avec l'aval du pouvoir, avant d'en être évincé en septembre.

L'annonce de sa candidature intervient alors que des manifestations de l'opposition d'une ampleur sans précédent ont eu lieu samedi à travers toute la Russie pour contester la victoire aux législatives du parti au pouvoir, à trois mois de la présidentielle à laquelle Vladimir Poutine est candidat à un troisième mandat après deux précédents en 2000 et en 2004, lui conférant la présidence de 2000 à 2008.

Poutine insulté, limogeages à Kommersant

Le rédacteur en chef de Kommersant et le PDG du groupe de presse qui en est propriétaire ont été limogés pour avoir publié des articles comportant des propos grossiers contre le premier ministre russe Vladimir Poutine, a indique mardi le quotidien en ligne Gazeta.ru.

«Le propriétaire de la maison d'édition Kommersant, Alicher Ousmanov, a annoncé le limogeage du directeur général de Kommersant-Holding, Andreï Galiev, et du rédacteur en chef de l'hebdomadaire Kommersant-Vlast, Maksim Kovalski», a indiqué Gazeta.ru, qui fait partie du même groupe.

M. Ousmanov, milliardaire russo-ouzbek, a expliqué ce limogeage par «la publication dans les derniers numéros de l'hebdomadaire de certains articles qu'il a qualifiés de violation de l'éthique journalistique», selon Gazeta.ru.

Dans son numéro daté du 12 décembre, Kommersant-Vlast a publié un reportage sur les fraudes imputées au parti au pouvoir Russie unie aux législatives du 4 décembre illustré par la photo d'un bulletin de vote invalidé sur lequel on peut lire «Poutine, va te faire foutre».

En couverture de l'hebdomadaire, se trouvent une photo de Vladimir Poutine l'air accablé et un titre où un subtil jeu de mots permet de mélanger les expressions «Russie unie» et «bourrage des urnes».

«Ces publications sont à la limite d'un comportement de petit voyou», a déclaré M. Ousmanov, cité par Gazeta.ru, n'excluant pas un recours en justice contre Maksim Kovalski.

Le directeur général de la maison d'édition Kommersant, Demian Koudriavtsev, a donné sa démission de lui-même, selon M. Ousmanov.

La rédaction de Kommersant n'était pas joignable dans la matinée pour des commentaires.

La victoire du parti au pouvoir, Russie unie, de Vladimir Poutine avec plus de 49% des suffrages a été largement contesté en Russie et donné lieu à des manifestations de protestation sans précédent à travers tout le pays.