Les autorités françaises ont recommandé vendredi aux 30 000 femmes qui en portent en France de se faire retirer leurs prothèses mammaires PIP après des cas suspects de cancer, des implants français vendus dans 65 pays et dont l'utilisation est interdite en Amérique du Sud.

«À titre préventif et sans caractère d'urgence (les autorités françaises) souhaitent que l'explantation des prothèses, même sans signe clinique de détérioration de l'implant, soit proposée aux femmes concernées», a annoncé le ministère de la Santé dans un communiqué.

Les experts de l'Institut national du cancer (INCa) avaient rendu jeudi soir leurs conclusions au gouvernement français. Il «n'y a pas à ce jour de risque accru de cancer chez les femmes porteuses de prothèses de marque PIP en comparaison aux autres prothèses», estiment-ils, alors qu'un total de 8 cas de cancers a été signalé en France chez des femmes ayant eu des prothèses PIP, sans toutefois qu'aucun lien de causalité n'ait été établi.

Quelque 30 000 femmes en France se sont fait implanter des prothèses mammaires de marque PIP, dont certaines sont remplies d'un gel de silicone non médical, qui entraîne des risques accrus de fuite et de rupture de l'enveloppe de la prothèse, selon le gouvernement français.

Le coût maximal pour la sécurité sociale des opérations de retrait des prothèses est estimé à une soixantaine de millions d'euros (80 millions de dollars), selon François Godineau, chef de service de la Direction de la sécurité sociale.

Cette estimation inclut le coût des interventions d'explantation pour les porteuses de ces prothèses, ainsi que celui du remplacement par des nouveaux implants, lorsqu'il s'agit de reconstruction mammaire après cancer, a précisé M. Godineau.

«Si elles ne souhaitent pas d'explantation, elles doivent bénéficier d'un suivi par échographie mammaire et axillaire tous les 6 mois», a ajouté le ministère.

«Devant l'absence d'éléments nouveaux concernant le gel non conforme ou de données cliniques nouvelles sur des complications spécifiques, les experts considèrent ne pas disposer de preuves suffisantes pour proposer le retrait systématique de ces implants à titre préventif», avait toutefois estimé l'expertise collective coordonnée par l'INCa

Les autorités sanitaires pointent en revanche des «risques bien établis» de «ruptures» et «le pouvoir irritant du gel pouvant conduire à des réactions inflammatoires».

Les prothèses mammaires de la société française Poly Implant Prothèse (PIP) sont au coeur d'un vaste scandale en France depuis plusieurs semaines, mais également en Grande-Bretagne où 250 femmes ont porté plainte.

Avant la liquidation de l'entreprise, en mars 2010, les ventes à l'exportation de PIP, qui produisait environ 100 000 prothèses par an, représentaient 84% de son activité.

Parmi les marchés de prédilection figurait l'Amérique du Sud (Venezuela, Brésil, Colombie et Argentine, notamment) qui totalisait plus de 58% des ventes à l'exportation en 2007 et 50% en 2009.

Cependant, dès le printemps 2010 et l'alerte des autorités françaises contre un processus de fabrication non conforme, le Chili, le Venezuela, puis le Brésil, avaient ordonné le retrait des prothèses PIP de leur marché.

Quelque 10 000 implants PIP furent retirés du marché au Brésil alors que 25 000 Brésiliennes portaient ces prothèses, selon l'Agence nationale de vigilance sanitaire (Anvisa).

Au Royaume-Uni, l'agence de surveillance des produits médicaux estime entre 40 000 et 50 000 le nombre de porteuses d'implants de cette marque. Les appelant à ne «pas paniquer», elle a estimé mercredi qu'il n'y avait pas de preuve d'un lien entre ces prothèses et l'apparition de cancer justifiant qu'on demande aux femmes de se les faire retirer.

Plus de 250 Britanniques ont cependant déjà porté plainte contre plusieurs cliniques qui ont procédé à la pose de ces implants.

Les enquêteurs soupçonnent la société d'avoir voulu réduire ses coûts avec des gels de silicone qui lui auraient fait économiser un million d'euros (1 330 000 $) par an. Depuis, plus de 2000 femmes ont porté plainte à Marseille, dans le sud-est de la France.