Facebook a bloqué pendant quelques jours le profil d'une militante néerlandaise qui s'est vu reprocher de diffuser sur le populaire réseau social une procédure permettant de déclencher un avortement par voie médicamenteuse.

Rebecca Gomperts, qui est la fondatrice de Women on Waves, une organisation à but non lucratif visant à faciliter l'accès à l'avortement dans les pays qui l'interdisent, utilisait sans difficulté depuis des mois comme photo d'accueil une image présentant la procédure en question.

Fin décembre, elle a reçu un message de la société américaine l'informant que l'image contrevenait à la politique des droits et responsabilités des usagers et avait conséquemment été retirée.

Indignée, elle l'a immédiatement remise en ligne avec le message «de censure» reçu, tout en invitant ses connaissances en ligne à en faire autant. Facebook a réagi en bloquant son accès au site pendant deux jours avant de finalement battre en retraite.

«Quand une telle situation survient, nous intervenons rapidement pour présenter nos excuses aux personnes concernées et apporter les correctifs requis à nos procédures», a souligné l'entreprise à l'attention de Mme Gomperts.

Elle pense que Facebook a changé de cap en réponse à l'attention médiatique suscitée par l'affaire.

La militante ne croit pas que l'entreprise ait ainsi démontré un parti pris anti-avortement. «C'est une entreprise de grande taille qui emploie beaucoup de monde. Il n'est pas impossible que quelqu'un à un niveau inférieur ait pris la décision parce qu'il était contre l'avortement, mais elle a fini par être corrigée», indique Mme Gomperts, qui était prête à aller en justice dans le cas contraire.

La procédure d'avortement au coeur de la polémique prévoit l'absorption d'un produit, le misoprostol, disponible en pharmacie. Mme Gomperts, un médecin de formation qui en fait la promotion par l'entremise d'un site internet dédié, assure qu'elle est sécuritaire.

La décision de Facebook a été mal reçue par les militants opposés à l'avortement, qui ont multiplié les commentaires cette semaine sur un site de nouvelles voué à la promotion des «principes judéo-chrétiens».

«C'est dégoûtant... Aucun avortement n'est sécuritaire et ce n'est qu'une question de temps avant que quelqu'un tente la procédure et meure», a souligné une lectrice prénommée Jeanne.

Quintin Croes, juriste interrogé cette semaine par la radio nationale néerlandaise, pense que Facebook a le droit de restreindre les informations diffusées sur son site malgré les lois protégeant la liberté d'expression.

Mme Gomperts n'est pas d'accord. «À un certain stade de développement, ces réseaux deviennent plus que de simples entreprises. Ça devient important qu'elles soient contraintes de défendre les droits humains», indique-t-elle.

censure.com

Les usagers de Facebook sont soumis à une déclaration des droits et responsabilités qui ratisse large. Elle précise que les contenus «incitant à la haine ou à la violence, menaçants, à caractère pornographique ou contenant de la violence gratuite» peuvent être censurés. Les informations favorisant une activité «illicite, illégale, malveillante ou discriminatoire» sont aussi interdites. L'entreprise l'avait évoqué récemment en menaçant de bloquer la page de la revue satirique Charlie Hebdo à la suite de la diffusion d'un numéro controversé sur la charia. Facebook a aussi bloqué la page d'un artiste danois qui avait mis en ligne une reproduction d'un tableau du peintre Gustave Courbet, L'Origine du monde, montrant le sexe d'une femme.