L'élection présidentielle française, qui devait de l'avis de plusieurs analystes se résumer à un duel entre la gauche et la droite traditionnelle, est en voie de se transformer en course à quatre.

Les difficultés du président Nicolas Sarkozy, miné par les mauvaises nouvelles économiques, ainsi que le timide début de campagne du candidat socialiste François Hollande se traduisent par un recul de leur poids total dans les intentions de vote.

En un mois, Nicolas Sarkozy a vu son score potentiel au premier tour reculer de 2,5% pour s'établir à 23,5%, alors que le favori de la gauche perd 1,5% pour s'établir à 30%, encore loin devant.

Ce recul profite surtout à la candidate du Front national, Marine Le Pen, qui obtiendrait un score de 17% si le premier tour de l'élection présidentielle se tenait aujourd'hui.

François Bayrou, qui avait joué le rôle du troisième homme lors de l'élection de 2007, passe à 14%, en hausse d'un point de pourcentage, réduisant sensiblement l'écart à 100 jours du vote.

Le candidat centriste atteint un niveau qui le place en bonne position alors qu'il était loin derrière il y a trois mois, dans un groupe de candidats négligés où se trouvaient l'écologiste Éva Joly, toujours loin derrière, et le leader du Front de gauche, Jean-Luc Mélanchon, aussi en hausse à 8%.

Écart considérable

«Il n'est pas faux de parler d'une course à quatre, mais il reste encore un écart considérable entre les deux meneurs et les principaux challengers», souligne Erwan Lestrohan, du département d'opinion institutionnel de LH2.

L'analyste ne considère pas que les chances de qualification au second tour des favoris soient «menacées» pour l'heure, notamment parce que les résultats du dernier sondage intègrent partiellement le contrecoup imputable à la décote de la dette par l'agence de notation Standard & Poor's.

«Nicolas Sarkozy reste autour de 25%, ce qui le place encore sensiblement devant Marine Le Pen», relève M. Lestrohan.

La progression de la chef frontiste n'en continue pas moins d'alimenter la chronique en France, où plusieurs observateurs s'alarment du potentiel attractif de son discours protectionniste dans un contexte économique tendu.

Selon le sondage LH2, la part des ouvriers et des employés qui se disent disposés à voter pour elle a augmenté de 13% en un mois. Une hausse potentiellement explicable par l'annonce de propositions concrètes comme l'augmentation des bas salaires de 200 euros par mois.

François Hollande a vu sa popularité auprès de cet électorat chuter d'une marge similaire. «Il a été appelé à intervenir sur des sujets comme la taxe sur les transactions financières, la TVA sociale, la décote de la dette qui trouvent moins d'échos», relève M. Lestrohan.

Le candidat socialiste demeure loin devant au second tour dans les intentions de vote avec 57% des voix contre 43% pour le président. Une situation qui s'explique notamment par le fait qu'il est en position de récupérer, outre les votes des formations de gauche, une bonne partie des voix de François Bayrou et, plus étonnamment, du Front national.

Selon l'analyste politique Philippe Chriqui, «la déception des ouvriers à l'égard de Nicolas Sarkozy est telle qu'une écrasante majorité d'entre eux compte voter Hollande. Ou plus exactement ne pas voter Sarkozy», relève-t-il dans le Nouvel Observateur.

Photo: Charles Platiau, Archives Reuters

Selon un sondage, François Bayrou obtiendrait 14% des votes au premier tour de la présidentielle française de 2012.