À un mois de la présidentielle, des dizaines de milliers de Moscovites participeront à des manifestations pro ou anti-Poutine cet après-midi, bravant le froid glacial qui enveloppe la capitale depuis plusieurs jours. Portrait des forces en présence.

Les anti-Poutine

Ils n'ont pour la plupart jamais porté Vladimir Poutine dans leur coeur, mais ont longtemps préféré se tenir loin de la politique. Ce sont les fraudes massives en faveur du parti du «leader national» lors des législatives du 4 décembre qui les ont fait sortir de leur apathie. Après deux grandes manifestations réussies en décembre, ils prennent à nouveau la rue, cette fois en prévision de la présidentielle du 4 mars. Dans le système politique actuel, l'élection de l'homme fort du pays ne fait aucun doute, de l'avis même de ses plus farouches opposants. Leur objectif est donc plutôt de ternir sa victoire en recensant les fraudes et les injustices en sa faveur. Ils espèrent qu'en retournant affaibli au Kremlin, voire «illégitime» aux yeux d'une partie de la population, le nouveau président Poutine sera forcé d'assouplir son monopole sur le système politique et les médias, afin de permettre une réelle concurrence.

Les pro-Poutine «anti-orange»

Ils sont reconnaissants envers Vladimir Poutine d'avoir «stabilisé» le pays depuis son arrivée au pouvoir en 2000 et ils lui attribuent l'amélioration de leur situation matérielle. Ils accusent les opposants de vouloir fomenter une révolution «orange», du nom du grand mouvement populaire pro-démocratie qui a renversé le régime autoritaire en Ukraine voisine, en 2004. Officiellement, leur rassemblement n'est «pas pour ou contre un politicien», mais plutôt «pour la Russie», afin que le pays «soit fort et indépendant et ne se transforme pas en un jouet dans des mains étrangères, comme ce fut le cas durant les années 90». Leur rhétorique reprend toutefois exactement celle de Vladimir Poutine, et ils ne cachent pas leurs affinités avec le premier ministre et probable futur président.

Les obligés et les profiteurs

Au cours des derniers jours, plusieurs enseignants, fonctionnaires et même des employés d'entreprises privées se sont plaints de menaces de la part de leurs supérieurs, qui leur «recommandaient fortement» de participer à la manifestation pro-Poutine, sous peine de représailles. Des membres actifs de l'opposition affirment quant à eux avoir perdu leur travail, leur employeur ayant subi des pressions de la part des autorités. À en croire le site Massovki.ru («figuration.ru»), certains participants se rendront à la manifestation «anti-orange» et à un autre rassemblement pro-Poutine également prévu demain pour une raison qui a peu à voir avec leurs idées politiques: l'argent. Plusieurs petites annonces promettaient en effet une rétribution variant de 600 et 1500 roubles (20-50$) pour faire acte de présence à ces réunions.