Un anneau attribué à Jeanne d'Arc, que les Anglais auraient gardé pendant près de six siècles, doit être dévoilé dimanche au public par son nouveau propriétaire, un parc de loisirs français qui l'a acquis fin février à Londres. Reste à démontrer son authenticité.

Le Puy du Fou, le deuxième parc de loisirs français, situé en Vendée (ouest), a déboursé pour lui la coquette somme de 376 833 euros lors d'enchères très disputées organisées le 26 février par la maison londonienne Timeline Auctions.

L'anneau a été authentifié par un laboratoire d'Oxford comme étant un bijou moyenâgeux datant du XVe, en argent plaqué or, par la méthode de fluorescence de rayons X.

En annonçant début mars son retour sur le sol français, le Puy du Fou a suscité un grand buzz médiatique. Mais le travail historique reste à faire dans l'abondante collection de documents qui a été fournie par Timeline.

«Ils ne sont qu'au début de l'exploration, c'est un gros travail, mais une belle aventure», explique à l'AFP l'experte parisienne Vanessa Soupault, qui a eu récemment l'anneau entre les mains et confirme la présence de «traces dorées bien visibles à l'intérieur».

Assez massive, la bague comporte trois croix des monnaies de Lorraine gravées, ainsi que les inscriptions «JHS-MAR», qui signifient Jhesus-Maria». Selon le Puy du Fou, il a été agrandi et modifié «vraisemblablement au XIXe ou XXe siècle».

Les historiens ont établi que Jeanne d'Arc, icône de la résistance française face aux Anglais durant la Guerre de Cent ans, avait eu trois anneaux: un petit en or qu'elle souhaitait remettre à sa grand-mère, un autre donné par son frère, et enfin un troisième, que lui avaient dérobé les Bourguignons avant de la livrer aux Anglais. Les deux premiers ont disparu. Le troisième serait-il celui acquis par le Puy du Fou ?

Les actes du procès de Jeanne, à l'issue duquel elle fut brûlée vive à Rouen (nord-ouest) le 30 mai 1431, montrent qu'elle a été interrogée sur ce troisième anneau.

«L'invraisemblable peut être vrai»

«Elle explique qu'il lui a été donné par son père ou sa mère, à Domrémy», son village natal de Lorraine (est), souligne à l'AFP l'historien médiéval Philippe Contamine.

Elle ne sait pas dire si l'anneau est en or ou en laiton et précise qu'il n'a pas de pierre, mais seulement trois croix gravées et les inscriptions «Jhesus-Maria», ajoute-t-il.

Selon Olivier Bouzy, historien et responsable du Centre d'archives Jeanne d'Arc à Orléans, cet anneau est déjà revenu en France.

En 1947, un médecin franco-anglais, James Hasson, qui l'avait acheté, l'avait exposé en 1953 dans une chapelle du sud-est de la France. «À l'époque, un des bons spécialistes de Jeanne d'Arc, le père jésuite Paul Doncoeur, était très dubitatif», rappelle M. Bouzy. Il sera montré ensuite en 1954 et 1956 à Paris et à Rouen par l'historienne médiéviste Régine Pernoud.

Le parcours difficilement traçable de l'anneau entre diverses mains anglaises au cours des siècles, de l'archevêque de Winchester Henry Beaufort, présent au procès, jusqu'à l'époque actuelle, fait douter certains historiens.

«Autour de Jeanne d'Arc, on a déjà eu plusieurs cas de faux objets», rappelle aussi M. Bouzy, citant notamment le cas d'un fragment de momie égyptienne que l'on pensait être une côte de la martyre récupérée sur le bûcher.

Il y a même eu une tombola, au début du XXe, en France, «dont les prix furent des reconstitutions de l'anneau, en or, en argent ou en cuivre».

L'Historial Jeanne d'Arc de Rouen n'a pas souhaité participer aux enchères, redoutant une nouvelle supercherie. M. Contamine laisse toutefois une porte ouverte: «C'est invraisemblable, il y a trop d'inconnues. Mais l'invraisemblable peut être vrai».