Au lendemain de la mort du tireur du marché de Noël de Strasbourg, sept membres de son entourage étaient toujours en garde à vue vendredi, tandis que les enquêteurs français poursuivaient leurs investigations pour « identifier d'éventuels complices » du djihadiste.

Le président Emmanuel Macron a déposé dans la soirée une rose blanche devant le mémorial improvisé devant la statue du général Kléber, à côté de milliers de bougies, des fleurs et de mots, tandis que des militaires entonnaient autour de lui une Marseillaise.

« Je suis venue pour prier pour ceux qui ne sont plus là », a témoigné dans la foule de centaines de personnes autour de lui Annette, 80 ans.

Dans la journée, la vie avait repris doucement son cours dans la capitale alsacienne, toute proche de la frontière allemande, avec la réouverture du très touristique marché de Noël, endeuillé par l'équipée meurtrière de Chérif Chekatt, tué jeudi soir par la police au terme de 48 heures d'une traque angoissante.

Entre les chants de Noël et les guirlandes des cabanons rallumées, l'odeur de vin chaud se répandait dans les allées aux 300 chalets. C'est dans ce décor de fête, fréquenté chaque année par deux millions de visiteurs venus du monde entier, qu'a frappé mardi soir Chérif Chekatt, un délinquant multirécidiviste de 29 ans, qui a tué quatre personnes - dont un journaliste italien et un touriste thaïlandais - et en a blessé douze autres, selon le dernier bilan.

Le groupe État islamique, qui appelle régulièrement à viser les pays membres de la coalition internationale anti-djihadiste en Syrie et en Irak, a affirmé jeudi soir que Chekatt était l'un de ses « soldats », peu après la mort de ce dernier.

Mais cette revendication a été qualifiée de « totalement opportuniste » par le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.

L'enquête devra élucider si le tueur a bénéficié d'éventuelles complicités « susceptibles de l'avoir aidé ou encouragé dans la préparation de son passage à l'acte », a de son côté souligné le procureur de Paris, Rémy Heitz, lors d'une conférence de presse.

800 témoignages

Sept membres de l'entourage du tueur étaient en garde à vue vendredi, dont ses parents et deux de ses frères, a précisé le procureur.

Un autre de ses frères, également radicalisé et visé par un mandat de recherche émis après l'attentat, a été interpellé en Algérie, selon plusieurs sources proches du dossier.

Né à Strasbourg, Chérif Chekatt avait un passé judiciaire très chargé (27 condamnations en France, en Allemagne et en Suisse) et était fiché « S » (« sûreté de l'État ») pour sa radicalisation islamiste.

Faute de piste, malgré les importants moyens déployés, la police avait fini par diffuser un avis de recherche avec sa photo mercredi soir.

Cela a « permis de recueillir près de 800 appels » dont deux témoignages « déterminants » pour localiser la zone où se cachait le fugitif, a souligné le procureur de Paris. « Une opération d'ampleur mobilisant un hélicoptère » a alors été engagée, « afin de concentrer les recherches sur ce secteur », situé au sud du centre-ville, a-t-il indiqué.

Repéré par une patrouille de police, Chérif Chekatt a fait mine d'entrer dans un immeuble avant de pointer son arme vers les policiers qui se rapprochaient, selon le procureur.

« Un projectile a atteint le véhicule de la police au-dessus de la portière arrière gauche. Deux des trois policiers ont alors riposté, tirant à de nombreuses reprises, et tuant l'auteur », a-t-il précisé.

Prosélytisme « parfois agressif »

Après ce dénouement, les forces de l'ordre ont été applaudies par les badauds, rassemblés aux abords du périmètre de sécurité. « Bravo ! », ont lancé certains d'entre eux.

« Merci à l'ensemble des services mobilisés, policiers, gendarmes et militaires. Notre engagement contre le terrorisme est total », a tweeté le président Emmanuel Macron, qui se rendra à Strasbourg en fin de journée.

Malgré ces hommages rendus aux forces de l'ordre, des questions demeurent sur d'éventuelles failles.

« La sûreté à 100 %, c'est très difficile à organiser, mais les forces de sécurité qui étaient présentes et nombreuses sur le marché de Strasbourg ont parfaitement réagi », a estimé vendredi la ministre des Armées, Florence Parly.

Autre débat, des voix se sont aussi élevées dans l'opposition de droite pour réclamer des mesures plus strictes à l'encontre des personnes suivies par les services de renseignement pour leur radicalisation religieuse.

À chacun de ses séjours en prison, Chérif Chekatt avait été repéré pour son prosélytisme « parfois agressif », lui qui avait une affiche de ben Laden dans une de ses cellules.

Les « fichés S » tels que lui doivent pouvoir être déférés devant la justice pour « intelligence avec l'ennemi », a réclamé la présidente du parti d'extrême droite Rassemblement national (RN) Marine Le Pen, rejointe par certains responsables de la droite modérée.