Une hausse importante du prix des pâtes survenue en Italie ces dernières semaines a mis dans l’embarras le gouvernement de la présidente du Conseil Giorgia Meloni, qui a convoqué une réunion d’urgence de son cabinet pour discuter du sujet il y a quelques jours.

Ce qu’il faut savoir

  • En Italie, la hausse du prix des pâtes est deux fois plus élevée que la moyenne de l’inflation en mars et en avril.
  • Face à la grogne exprimée dans la population, le gouvernement central a tenu une réunion d’urgence.
  • Soupçonnés de collusion, les producteurs répliquent avoir eu à affronter plusieurs hausses de prix.
  • La Commission d’alerte rapide promet de surveiller les prix en temps réel dans les prochains mois.

Dans la foulée, la Commission d’alerte rapide, organisme rattaché au ministère des Entreprises et du Made in Italy, a annoncé qu’elle surveillerait en temps réel la hausse des prix de cette denrée dans les prochains mois.

Selon les plus récentes données, recueillies en avril, le prix des pâtes a grimpé de près de 17 % depuis un an, soit le double de l’indice d’inflation. La hausse est d’autant plus choquante qu’au cours de la dernière année, le prix du blé, aliment de base pour la fabrication des pâtes, a reculé de près de 33 % dans le pays.

Il n’en faut pas plus pour que les consommateurs crient à la spéculation des producteurs. Ces derniers répliquent que la situation est imputable à l’inflation et à diverses hausses de prix (énergie, chaîne d’approvisionnement) et aux contrecoups de la guerre en Ukraine.

En Italie, où l’on consomme beaucoup de pâtes alimentaires, environ 23 kilogrammes par personne par année, cette hausse a sans surprise une signification très particulière.

« On comprend que les pâtes alimentaires jouent un rôle important dans la diète italienne », indique Sylvain Charlebois, professeur titulaire à la faculté de management et d’agriculture de l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse. « La hausse de leur prix est un peu comme celle du sirop d’érable au Québec. Si le sirop d’érable coûte trop cher, les gens vont en parler, les médias vont en parler. »

C’est aussi ce que disait le journaliste Anthony Bellanger, de France Inter, dans l’émission balado Les histoires du monde. « Le prix des pâtes est l’aune dont les Italiens se servent pour mesurer leur inflation », disait-il dans son intervention du 12 mai dernier.

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Le 6 avril 2023, journée mondiale des pâtes à la carbonara, des employés du restaurant Osteria Pasquino, à Rome, distribuent gratuitement des pâtes, répondant ainsi à une initiative antigaspillage proposée par l’organisme Italy Food Porn.

Organisme voué à la défense des consommateurs italiens, le groupe Assoutenti a recensé le prix des pâtes un peu partout dans le pays et s’est rendu compte que la hausse n’était pas la même partout. À Modène, dans le Nord central, par exemple, les prix auraient bondi de près de 50 %, alors qu’ils n’auraient grimpé que de 4,6 % à Alexandrie, dans le Nord-Ouest.

Au terme de la rencontre, le 11 mai, la Commission d’alerte rapide a tenté de se faire rassurante et de démontrer qu’elle veille au grain.

« Une baisse significative du coût des pâtes est attendue prochainement. La surveillance se poursuit pour protéger les consommateurs », peut-on lire sur le site du ministère des Entreprises et du Made in Italy.

« La dynamique des prix des matières premières [blé dur et semoule] et de l’énergie se situe à des niveaux nettement inférieurs à ceux de l’année dernière et ces réductions se répercuteront sur le prix des pâtes à la consommation », ajoute-t-on plus loin dans le communiqué gouvernemental.

Toute cette histoire peut-elle avoir des répercussions jusqu’au Canada, notamment sur les prix des pâtes importées d’Italie ? Sylvain Charlebois croit que oui.

« Dans les données sur l’inflation publiées [par Statistique Canada] ce matin [mardi], la hausse des pâtes et du pain sont à 14 ou 15 %. On voit que cette catégorie est sous pression. Le marché des grains, qui a explosé l’an dernier, a maintenant rattrapé le marché au détail. Des compagnies de pâtes comme Barilla achètent des cargaisons plusieurs mois à l’avance et ajustent leurs prix. »

Selon Statista, l’Italie a exporté 2,4 millions de tonnes de pâtes en 2022. Son principal client est l’Allemagne (463 007 tonnes), suivie du Royaume-Uni (303 576 tonnes) et de la France (296 099 tonnes).

Avec La Repubblica, CNN, le Washington Post et France Inter

En savoir plus
  • 12,5 millions
    En octobre 2008, le Tribunal administratif de Lazio a confirmé une amende de 12,5 millions d’euros (18,3 millions de dollars canadiens) imposée en première instance à 26 fabricants italiens pour collusion sur une hausse du prix des pâtes.
    SOURCES : The Washington Post et lematin.ma