(Rome) Les députés italiens ont voté mercredi un projet de loi visant à renforcer l’interdiction de la gestation pour autrui (GPA) en la rendant illégale même à l’étranger, une mesure accusée d’être préjudiciable aux enfants et critiquée par la communauté LGBT+.

Le texte, qui doit encore être validé par le Sénat pour entrer en vigueur, expose les Italiens qui recourent à une mère porteuse à l’étranger à des poursuites judiciaires à leur retour.

Le projet de loi a été soumis par Fratelli d’Italia (FDI), le parti d’extrême droite de la cheffe du gouvernement Giorgia Meloni, qui se définit comme une « mère chrétienne » et a gagné les élections en septembre en faisant une campagne à la fois nationaliste et pour les valeurs traditionnelles de la famille catholique.

Durant le débat mercredi, une responsable de FDI, Elisabetta Gardini, a qualifié la GPA d’« utérus à louer » qui « insulte la dignité des femmes et piétine les droits des enfants ».

Un autre membre du parti avait estimé en mars que la GPA était un crime « plus grave que la pédophilie ».

Le texte voté mercredi reprend une loi italienne de 2004 interdisant la GPA dans la péninsule et va plus loin.

Il serait de toute façon impraticable et anticonstitutionnel selon ses détracteurs, qui ont accusé Mme Meloni et sa coalition de faire de l’affichage.

Stefania Ascari, membre du Mouvement Cinq Étoiles, a dénoncé un « énorme bazar juridique » sur le dos « des droits très fragiles des mineurs » dont les parents pourraient être arrêtés en arrivant en Italie.

L’Italie a déjà l’une des lois les plus restrictives d’Europe contre la GPA et prévoit actuellement que quiconque « réalise, organise ou fait connaître » la GPA dans le pays risque une peine de trois mois à deux ans de prison et une amende allant de 600 000 à un million d’euros (879 000 $ à 1,5 million de dollars CAN).

Selon les médias, un grand nombre de personnes qui recourent à la GPA à l’étranger sont des couples hétérosexuels qui ne peuvent pas avoir d’enfants.

Cependant, le nouveau projet de loi suscite l’inquiétude chez les militants LGBT+ qui mettent en garde contre le danger que représente pour les droits civils le gouvernement de Mme Meloni.

« Peu de personnes »

Mardi, plusieurs centaines de personnes ont protesté devant le Panthéon, dans le centre de Rome, contre ce projet de loi.

« Au lieu de s’occuper du climat […] des incendies, des problèmes sérieux […], le gouvernement s’occupe de ces choses qui concernent peu de personnes », a critiqué à l’AFP Mario Colamarino, 32 ans, un homosexuel qui dénonce « une homophobie d’État ».

Fabrizio LaPaglia, 60 ans, homosexuel et père d’enfants issus d’un autre mariage avec une femme, était aussi dans la manifestation : « Ce gouvernement est fortement soutenu par les associations pro-vie, des fondamentalistes qui veulent prendre des décisions pour le corps des femmes et la communauté LGBT », a-t-il expliqué.

Les unions civiles sont autorisées en Italie depuis 2016, mais les couples de même sexe ne peuvent pas se marier ou adopter.  

La procréation médicalement assistée, dans laquelle un ovule ou un spermatozoïde donné est utilisé, est légale pour les couples hétérosexuels, mais pas pour les couples de même sexe ou les femmes seules.

Jusqu’à présent, les Italiens qui pouvaient se le permettre voyageaient dans des pays où la GPA est autorisée, comme les États-Unis.  

Mais cette question s’inscrit dans un problème plus large en Italie, le pays n’ayant pas de loi pour reconnaître les enfants des couples de même sexe.

Cela laisse ces enfants dans un vide juridique avec seulement le parent biologique inscrit sur leur certificat de naissance, forçant l’autre à s’engager dans un long et coûteux processus d’adoption.

En l’absence d’une politique claire, certaines villes, dont Milan, Turin et Padoue, avaient enregistré les enfants de couples de même sexe conçus à l’étranger par le biais de la GPA jusqu’à ce qu’une directive du ministère de l’Intérieur ne l’interdise en avril. Certains parents ont vu leurs noms effacés des registres, source d’un profond désarroi, sans parler des complications bureaucratiques.