(Kyiv) L’Ukraine s’est félicitée jeudi d’avoir mené une rare opération commando en Crimée annexée et d’y avoir hissé le drapeau national, un succès symbolique dans ce bastion considéré comme imprenable par Moscou pour la journée de l’Indépendance.

« L’ennemi a subi des pertes parmi ses hommes et des équipements ont été détruits. Et le drapeau national a flotté de nouveau en Crimée ukrainienne », a affirmé le renseignement militaire ukrainien sur Telegram.

Il n’a pas précisé la mission de ces unités des forces spéciales, mais il a souligné qu’elles sont venues depuis la mer, débarquant près des villages d’Olenivka et Maïak, dans l’ouest de la péninsule, avant de repartir « sans pertes ».   

« Tous les objectifs et tâches ont été accomplis », a assuré le renseignement ukrainien, qui ne commente pas toujours publiquement les opérations menées en territoires occupés.

Le ministère russe de la Défense a affirmé tôt vendredi avoir abattu 42 drones ukrainiens en Crimée, décrivant une attaque d’une rare ampleur contre la péninsule annexée par Moscou en 2014.

« Neuf drones ont été détruits à la suite de l’impact de tirs au-dessus du territoire de la république de Crimée. 33 drones ont été neutralisés par des moyens de guerre électronique et se sont écrasés sans atteindre [leur] cible », a indiqué la Défense russe sur Telegram.

Le ministère n’a pas fourni d’informations quant à d’éventuels dégâts ou victimes à la suite de la destruction des engins.

Le gouverneur de Sébastopol Mikhaïl Razvojaïev avait rapporté plus tôt que plusieurs appareils avaient été abattus au large de la péninsule « dans la zone du cap Chersonèse » situé à quelque 10 km de Sébastopol, port d’attache de la Flotte russe de la mer Noire.

La veille, il avait revendiqué la destruction dans cette même zone d’un système de missiles sol-air russe.

L’Ukraine a juré de libérer tout son territoire occupé par la Russie depuis son invasion de février 2022, ainsi que la Crimée annexée depuis 2014, pourtant lourdement défendue par l’armée russe.

L’opération et la revendication d’un drapeau ukrainien hissé sur la péninsule sont d’autant plus symboliques qu’elle intervient le jour de la fête de l’Indépendance et au lendemain de la journée du drapeau ukrainien.

« Peuple libre »

« Avec Olena, nous avons honoré la mémoire des défenseurs tombés au combat pour notre pays », a indiqué à l’occasion le président Volodymyr Zelensky dans un message sur Telegram, après s’être rendu à la cathédrale Sainte-Sophie, dans le centre-ville de Kyiv.

Vêtu tout de vert kaki, comme à son habitude, le président ukrainien, aux côtés de sa femme Olena, a déposé une gerbe de fleurs aux pieds d’un mur mémoriel avec les portraits de soldats tués au front dans ce quartier historique de la capitale, inondé de soleil dans la matinée.

PHOTO OLEG PETRASYUK, REUTERS

Volodymyr Zelensky

« Nous nous souvenons de tous ceux qui ont donné leur vie pour la liberté et l’indépendance, pour l’avenir libre de l’Ukraine », a-t-il ajouté, appelant les Ukrainiens « à ne pas perdre confiance en ces temps difficiles ».

La journée de l’Indépendance de l’Ukraine intervient cette année un an et demi jour pour jour après le début de l’invasion le 24 février alors que Kyiv mène une contre-offensive ardue depuis juin pour tenter de bouter les Russes hors de son territoire.

« La fête d’un peuple libre. La fête de personnes fortes. La fête de personnes dignes », avait martelé Zelensky tôt jeudi dans un message écrit.

Sur l’avenue Khrechtchatyk, l’artère principale de Kyiv, des habitants se baladaient jeudi matin. Certains se prenaient en photo avec des blindés russes exposés, quand d’autres portaient, eux, les célèbres « vyshyvanka », ces chemises amples brodées devenues un symbole de l’unité nationale contre l’invasion.

Dix blessés à Dnipro

Cette atmosphère festive tranchait toutefois avec la réalité des combats, à plusieurs centaines de kilomètres à l’est et au sud de Kyiv.

Dans le centre-est de l’Ukraine, à Dnipro, une frappe a fait au moins dix blessés, dont trois actuellement hospitalisées, a déploré le gouverneur régional, Serguiï Lissak.

Le responsable a posté plusieurs photos sur Telegram, montrant des bâtiments éventrés, des fenêtres soufflées et des débris à même le sol, signe de la puissance du bombardement.

Plus au sud, à Kherson, ville reprise en novembre par l’armée de Kyiv, mais qui se trouve toujours sous le feu régulier de l’armée russe, une petite fille de sept ans a été blessée « au dos, aux bras et aux jambes » dans une frappe « sur le centre-ville », a rapporté le gouverneur de la région, Oleksandre Prokoudine.

Jeudi, DTEK, le plus important acteur privé du secteur de l’énergie en Ukraine, a par ailleurs dénoncé un bombardement russe sur l’une de ses centrales thermiques.

L’opérateur a précisé que celle-ci, de nouveau « endommagée », « avait déjà subi des attaques répétées » de la part de l’armée russe, alors que Moscou avait mené une campagne de frappes sur les infrastructures énergétiques ukrainiennes à l’hiver dernier pour plonger la population dans le noir et le froid.

Les autorités redoutent la reprise d’une telle stratégie dans les prochaines semaines.

Sur le plan diplomatique, la Norvège va donner des avions de combat F-16 à l’Ukraine, selon des médias norvégiens, rejoignant ainsi les Pays-Bas et le Danemark qui avaient annoncé une telle décision le week-end dernier.

Après plusieurs visites dans différents pays européens, Volodymyr Zelensky accueille également jeudi à Kyiv le président portugais Marcelo Rebelo de Sousa.

Un missile et plusieurs drones ukrainiens abattus

Moscou a abattu un missile ukrainien qui visait « des cibles civiles » dans la région de Kalouga ainsi que « plusieurs drones » au large de la Crimée, ont indiqué les autorités russes tôt vendredi.

Une tentative d’attaque de Kyiv contre « des cibles civiles sur le territoire de la Fédération de Russie a été déjouée », a communiqué le ministère de la Défense sur Telegram.

« Le missile a été détecté et détruit par des systèmes de la défense aérienne au-dessus du territoire de la région de Kalouga », au sud-ouest de la capitale russe, a ajouté la même source.

La Défense russe n’a pas fourni davantage d’informations quant aux lieux visés et n’a pas indiqué si la destruction du missile avait fait d’éventuels dégâts ou victimes.

L’agence de presse publique russe TASS a par ailleurs fait état de la fermeture au trafic aérien des aéroports internationaux Vnoukovo et Domodedovo de Moscou, tôt vendredi, citant les services aériens.

La région de Kalouga est limitrophe de celle de Moscou, ciblée à plusieurs reprises ces derniers jours par des drones ukrainiens selon les autorités russes.