Dix ans après son élection, le pape François doit de plus en plus souvent limiter ses activités à cause de problèmes de santé. L’Argentin qui a 87 ans ce dimanche a dû annuler à la dernière minute un voyage à la COP28 de Dubaï où il devait prononcer un discours sur l’environnement, son sujet de prédilection. Aura-t-on bientôt un conclave ?

Sa biographe Francesca Ambrogetti, qui lui parle régulièrement depuis 20 ans et a publié trois livres sur ces entretiens, confirme que la santé de François décline, mais lentement. « À son âge, c’est normal d’avoir des ennuis pulmonaires, dit-elle. Mais ni lui ni nous, en Argentine, ne le trouvons de santé fragile, encore une fois vu son âge. »

« Si on compare avec la santé de Jean-Paul II dans ses dernières années, par exemple, François ne semble pas tellement diminué », remarque Gilles Routhier, théologien de l’Université Laval qui revient de Rome. Les récents ennuis de santé de François ne semblent pas inquiéter la Ville éternelle outre mesure, selon lui.

La raison de l’annulation du voyage de François à Dubaï est une vilaine bronchite qui avait commencé à la mi-novembre. Le mardi 28 novembre, le Vatican a annoncé que le déplacement du pape à la COP28, où il devait faire un discours le samedi 2 décembre, était annulé. Cette bronchite l’a même privé de la parole pendant les quelques jours suivants. Mais le 6 décembre, il a lui-même prononcé son sermon lors de l’audience générale du mercredi. Le 8 décembre, il s’est rendu à la place d’Espagne à Rome pour une cérémonie traditionnelle célébrant l’Immaculée Conception.

L’avis d’un pneumologue

Il n’est pas rare chez un patient de cet âge que la convalescence après une bronchite soit lente, selon Bryan Ross, pneumologue au Centre universitaire de santé McGill (CUSM). « Le fait qu’il recommence à parler, c’est une bonne nouvelle », indique le DRoss, qui a consulté certains articles médiatiques sur le pape.

Une bronchite aiguë comme celle qu’il semble avoir est surtout dangereuse au début, si une inflammation systémique s’empare du corps. Une amélioration, même lente, est un signe que cette phase risquée est passée.

Bryan Ross, pneumologue au CUSM

Et le fait qu’il n’a qu’un seul poumon, à cause d’une intervention chirurgicale remontant à sa jeunesse ? « On peut bien vivre et longtemps avec un seul poumon, illustre le DRoss. Mais c’est sûr que ça augmente les risques. »

Autre bémol, les problèmes de genoux et de sciatique qui entravent les mouvements du pape et l’obligent souvent à se déplacer en fauteuil roulant. Le médecin de François a probablement préparé un programme de physiothérapie pour le maintenir en forme malgré ses limitations de mobilité, croit le DRoss, dont les travaux portent sur l’importance de l’activité physique pour la survie des patients âgés. « C’est très important pour la guérison des affections pulmonaires », souligne-t-il.

La convalescence du pape
  • Le pape a assisté à l’audience générale du mercredi 29 novembre, mais n’a pas prononcé lui-même son sermon, à cause de la bronchite qui l’a empêché d’aller à Dubaï.

    PHOTO VATICAN MEDIA, FOURNIE PAR REUTERS

    Le pape a assisté à l’audience générale du mercredi 29 novembre, mais n’a pas prononcé lui-même son sermon, à cause de la bronchite qui l’a empêché d’aller à Dubaï.

  • Le pape a fait son discours de l’Angelus le 8 décembre.

    PHOTO VATICAN MEDIA, FOURNIE PAR REUTERS

    Le pape a fait son discours de l’Angelus le 8 décembre.

  • Le pape François a assisté à une cérémonie pour l’Immaculée Conception à la place d’Espagne le 8 décembre.

    PHOTO GREGORIO BORGIA, ASSOCIATED PRESS

    Le pape François a assisté à une cérémonie pour l’Immaculée Conception à la place d’Espagne le 8 décembre.

  • Le pape François lors d’une audience générale hebdomadaire, au Vatican, le 13 décembre

    PHOTO VATICAN MEDIA, FOURNIE PAR REUTERS

    Le pape François lors d’une audience générale hebdomadaire, au Vatican, le 13 décembre

1/4
  •  
  •  
  •  
  •  

Deux échéances

François pourrait-il être tenté de démissionner comme Benoît XVI ? « Je pense qu’il voudra à tout prix mener à bien le synode, la consultation mondiale qu’il a lancée en 2021 », estime Massimo Fagglioli, théologien de l’Université Villanova, en Pennsylvanie, qui a publié en 2020 un livre sur l’impact de François sur l’Église catholique.

C’est la première fois qu’il y a des laïcs et des femmes à un synode, et que le synode comporte des phases régionales. C’est vraiment l’un des legs majeurs de François et il voudra le mener à bien. Les travaux du synode se termineront à la fin 2024.

Massimo Fagglioli, théologien de l’Université Villanova, en Pennsylvanie

L’autre échéance prochaine qui écarte la possibilité d’une démission de François est son premier voyage en Argentine, prévu pour 2024, croient M. Cannata et Mme Ambrogetti. « Il n’a qu’une sœur encore en vie et il ne l’a pas vue depuis 10 ans, parce qu’elle est trop malade pour voyager, dit Mme Ambrogetti. Mais il a toujours donné la priorité à ses obligations pastorales par rapport à son plaisir personnel. Quand il était archevêque à Buenos Aires, il ne passait jamais Noël avec sa famille, mais avec des pauvres. Je crois que le moment est venu pour lui de visiter son pays natal comme pape et de revoir sa sœur. »

Les parents et les trois frères de François sont morts avant son élection en 2013.

D’une maladie à l’autre

  • 1957 : Ablation d’un poumon à cause d’une grave infection
  • 2007 : Diagnostic de sciatique, une hernie discale
  • 2021 : Opération au côlon pour soigner une diverticulite
  • 2022 : Problèmes de genoux entraînant des annulations de voyages au Liban, au Soudan et au Congo
  • 2023 : Hospitalisation au printemps pour une infection pulmonaire et opération abdominale en juin

Sources : Crux Now, CNN

Rectificatif
Une version précédente de cet article affiliait erronément le D
Bryan Ross à l'Université de Montréal.