La victoire de Barack Obama à l'élection présidentielle américaine, saluée mercredi par les autorités afghanes qui y ont vu l'amorce d'une «ère nouvelle», a été assombrie par l'annonce d'une nouvelle bavure de la coalition, un bombardement visant des civils à un mariage.

Les autorités afghanes ne faisaient guère mystère de leur soutien au sénateur de l'Illinois, qui avait promis d'envoyer davantage de troupes en Afghanistan et de frapper les terroristes au Pakistan.

Mais il n'y a pas eu d'euphorie mercredi à l'annonce des résultats: le président afghan Hamid Karzaï a certes félicité Barack Obama, estimant que sa victoire faisait entrer le monde dans une «ère nouvelle», où, a-t-il dit, «la race, la couleur et l'origine ethnique, je l'espère, vont disparaître (...) de la politique dans le reste du monde».

Mais il a aussitôt réitéré sa demande d'une révision de la stratégie américaine dans la «guerre contre le terrorisme».

«Notre première et plus importante demande (au président Obama), notre priorité, c'est de mettre fin aux frappes visant les civils en Afghanistan. La guerre contre le terrorisme ne doit pas être livrée dans les villages afghans», a souligné Hamid Karzaï, au cours d'une conférence de presse.

«Au moment même où je vous parle, nous avons de nouveau des victimes civiles. Dans le district de Khah Wali Kot de la province de Kandahar, des civils ont été tués dans un bombardement. Il faut y mettre un terme», a-t-il poursuivi.

Dans le village de Wacha Bakhta, un correspondant de l'AFP n'a trouvé que désolation, bâtiments en ruines et morceaux de chair, les cris et la douleur ayant brutalement succédé à la joie de célébrer ensemble un mariage.

Quelque 35 civils participants à un mariage auraient été tués dans ce bombardement, survenu peu après une attaque des talibans contre des soldats étrangers, selon les villageois.

L'armée américaine a confirmé qu'un «incident» s'était déroulé lundi au cours duquel «des civils avaient été blessés et peut-être tués», et a annoncé l'ouverture d'une enquête, sans autre précision.

La province de Kandahar, dans le sud du pays, est le berceau des talibans et un de leurs bastions.

Les forces étrangères en Afghanistan sont régulièrement accusées de provoquer la mort de civils dans leurs combats ou leurs bombardements contre les insurgés.

Le président Karzaï s'est plusieurs fois plaint que les forces internationales ne coordonnaient pas leurs opérations avec les forces afghanes. Kaboul avait même menacé fin août de renégocier les termes de la présence militaire internationale en Afghanistan après une série de frappes meurtrières.

L'une des plus sanglantes a eu lieu le 22 août près d'Azizabad (ouest), où 90 civils ont péri lors d'un bombardement américain, selon une enquête des autorités afghanes.

L'armée américaine avait fini par reconnaître le 9 octobre qu'au moins 33 civils, dont 12 enfants, avaient été tués, après n'avoir évoqué que sept victimes.

Mais elle n'a toujours pas conclu une autre enquête sur la mort présumée de 64 civils dans deux bombardements en juillet dans les provinces de Nangarhar et du Nouristan (est).

Le contingent américain représente, avec 33.000 hommes, près de la moitié des 70.000 soldats étrangers déployés en Afghanistan pour combattre l'insurrection des talibans, chassés du pouvoir à la fin 2001 par une coalition internationale emmenée par les États-Unis.

Mais l'influence des États-Unis ne se limite pas à leur présence militaire: ils sont aussi responsables d'un tiers des quelque 15 milliards de dollars d'aide au développement dépensées depuis 2001.

Pour autant, la situation se dégrade depuis deux ans et les violences se multiplient, jusque dans la capitale.