Quelle que soit la composition du prochain gouvernement israélien, de nombreux Palestiniens perçoivent les résultats électoraux de mardi comme l'ultime clou dans le cercueil des négociations de paix.

«Aucune des coalitions gouvernementales envisageables en Israël ne sera en mesure d'amener la paix», juge Qadura Farès, un haut responsable du Fatah, le parti du président Mahmoud Abbas.

 

Cet ancien député note que le chef du Likoud, Benyamin Nétanyahou, qui a de bonnes chances de devenir le prochain premier ministre israélien, refuse d'envisager la moindre concession territoriale.

Mais même si le gouvernement devait être dirigée par Tzipi Livni, dont le parti détient un mandat de plus que le Likoud les pourparlers de paix ne s'en porteraient pas mieux, juge M. Farès, rencontré hier à Ramallah.

«Tout ce qu'elle veut, c'est parler et serrer la main à Mahmoud Abbas. Les négociations de paix, c'est une blague, il faut les arrêter», dénonce-t-il.

Aucune différence

Que ce soit Livni ou Nétanyahou n'y changera rien, les négociations n'iront nulle part, opine Ayman Daraghmeh, un député palestinien sympathisant du Hamas.

De toute façon, juge-t-il, les dirigeants israéliens sont prisonniers d'un système qui, en raison de la fragmentation politique, ne leur permet pas d'aller jusqu'au bout de leurs idées. «Kadima ou Likoud, cela ne fait absolument aucune différence.»

Pour devenir premier ministre, Nétanyahou ou Livni devra rassembler une coalition regroupant au moins 61 députés sur les 120 que compte la Knesset, le Parlement israélien.

Or, à l'issue du vote de mardi, le bloc de droite, qui peut former une alliance naturelle avec Benyamin Nétanyahou, compte au moins 63 députés. Et pourrait en compter davantage une fois que l'on aura dépouillé les votes des soldats, qui penchent traditionnellement vers la droite.

Hier, de nombreux analystes n'hésitaient pas à prévoir que Benyamin Nétanyahou, ce tenant de la ligne dure face aux Palestiniens, dirigera le prochain gouvernement israélien. «Nétanyahou sera dans le siège du conducteur», assurait David Horowitz, rédacteur en chef du Jérusalem Post, dans un éditorial. «Seul Nétanyahou sera en mesure de créer une coalition gouvernementale», pense l'analyse Yossi Alpher.

La victoire de la droite risque de causer des turbulences autour du président Mahmoud Abbas, que de nombreux Palestiniens perçoivent déjà comme un chef faible et inefficace, signale l'analyste palestinien Khalil Shikaki.

«Une victoire de Nétanyahou va saper la légitimité de Mahmoud Abbas, plusieurs l'interpréteront comme le signal que les négociations ne donnent rien et qu'il n'y a que la voie de la violence.»

 

La Réforme ratée

Il y a une dizaine d'années, Israël a tenté de réformer son système électoral qui cause une fragmentation des partis au point de rendre le pays ingouvernable, signale l'analyste Yossi Alpher.

On avait alors décidé d'élire le premier ministre au vote universel, tout en préservant la proportionnelle pour l'élection des députés. Cette réforme avait incité les électeurs à voter pour des partis de plus en plus marginaux.

Résultat: une fragmentation accentuée, qui s'est maintenue même après l'abandon de cette réforme. «Dans le passé, de grands partis pouvaient détenir 50 mandats et il leur suffisait de s'allier avec un seul petit parti pour pouvoir diriger», rappelle Yossi Alpher. Aujourd'hui, les gouvernements sont fondés sur des mariages à quatre ou cinq partis. Difficile de réaliser des progrès importants sur des sujets aussi explosifs que les relations avec les Palestiniens.