Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, qui doit prononcer un discours la semaine prochaine aux Nations unies, est attendu de pied ferme à New York, où la contestation se prépare. Au coeur des préoccupations se trouvent les violations des droits de l'Homme en Iran. Au centre des revendications, la libération d'un ancien de l'Université Concordia.

Ceux qui connaissent Maziar Bahari - ses admirateurs, comme ses critiques - s'entendent sur une chose: le journaliste et documentariste canado-iranien, arrêté il y a trois mois à Téhéran, est apolitique. Quand ils l'ont entendu s'accuser à la télévision d'avoir fomenté une «révolution de couleur» contre le régime islamique, ils n'en ont pas cru un mot.

 

Reporter pour le magazine américain Newsweek pendant la période de tumulte politique qui a suivi la réélection du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, Maziar Bahari n'est pas le seul à avoir fait des «aveux» publics. Des politiciens iraniens et des journalistes locaux ont connu le même sort. Cependant, Maziar Bahari est le seul correspondant étranger à avoir été ciblé par les autorités iraniennes.

Depuis le 21 juin, l'homme de 42 ans, qui a à son actif des dizaines de films, des centaines de reportages, plusieurs pièces de théâtre et la publication d'un livre sur la jeunesse iranienne, croupit dans la tristement célèbre prison d'Evin, à Téhéran.

C'est dans ses murs que la photographe montréalaise Zahra Kazemi a été battue à mort et que des milliers de jeunes opposants au régime islamique ont été exécutés dans les années 80.

La détention de Maziar Bahari a soulevé une immense vague de sympathie dans le monde entier. Des centaines d'écrivains, de cinéastes et de journalistes de renom - dont Paul Auster, Christiane Amanpour (CNN), Margaret Atwood et Wim Wenders - ont signé des pétitions pour demander sa libération immédiate. Les patrons du magazine Newsweek et le gouvernement canadien font aussi pression sur le gouvernement de la République islamique.

Démarches infructueuses

À ce jour, les tirs - médiatiques et diplomatiques - groupés contre Téhéran ont donné peu de résultats. Maziar Bahari n'a pas encore vu d'avocats et on ignore les accusations qui pèsent sur lui.

Les visites consulaires ont été refusées. Des membres de sa famille ont pu le visiter à deux reprises et ils ont dû limiter leurs conversations aux nouvelles touchant la famille. Elles ne sont pas toutes bonnes.

L'épouse de Maziar Bahari, Paola Gourley, est enceinte et a dû être hospitalisée au cours des dernières semaines. «Ce qui arrive à Maziar a un impact sur beaucoup de gens», a dit hier à La Presse, le directeur des pages internationales de Newsweek, Nisid Hajari, avec qui Maziar Bahari était fréquemment en contact avant son arrestation.

De son bureau de New York, M. Hajari peine à comprendre pourquoi son collaborateur a été arrêté.

Après avoir terminé ses études en cinéma à l'Université Concordia dans les années 90, Maziar Bahari a réussi à travailler pendant plus de 10 ans en Iran, son pays d'origine, sans avoir de démêlés avec les autorités. Une rareté dans un pays où le régime fait la vie dure aux journalistes. « Le gouvernement iranien a renouvelé sa carte de presse tous les ans sans rouspéter», dit Nasid Hajari, en notant que deux jours avant son arrestation, Maziar Bahari était parmi les rares journalistes à assister à la prière du vendredi prononcée exceptionnellement par le leader suprême de l'Iran, l'ayatollah Khamenei.

«Nous espérons qu'il sera libéré avant la visite d'Ahmadinejad aux États-Unis. C'est une bonne occasion pour le président de montrer un meilleur visage de l'Iran.»