Selon la première explication officielle, Peter Galbraith, le numéro 2 de la mission de l'ONU à Kaboul, avait quitté la capitale afghane le temps d'une «mission», à la mi-septembre.

Mercredi, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a publié un communiqué confirmant ce que tout le monde soupçonnait déjà: Peter Galbraith était en fait remercié de ses fonctions et ne retournerait plus en Afghanistan. Le communiqué est très laconique sur les raisons de ce congédiement. La décision a été prise «dans le meilleur intérêt de la mission», se contente-t-il de spécifier.

 

Dans les faits, le différend entre l'ex-représentant spécial adjoint de l'UNAMA, la mission afghane de l'ONU, et son patron, le Norvégien Kai Eide, est un secret de Polichinelle. La nature du conflit avait été révélée par le Times de Londres il y a deux semaines: les deux hommes ne s'entendaient pas sur le traitement réservé à la fraude qui a marqué les élections du 20 août.

Peter Galbraith a été «stupéfait» par son renvoi, rapporte Le Monde dans son numéro d'hier.

«Je ne suis pas d'accord avec cette décision, pas uniquement pour des raisons personnelles, mais parce que c'est un terrible message que de renvoyer un représentant de l'ONU parce qu'il s'inquiétait des fraudes dans une élection parrainée et payée par l'ONU», explique-t-il dans une entrevue à la BBC.

Dans la même interview, il confirme avoir eu un «vif désaccord» avec Kai Eide à ce sujet. Il a dit avoir vu «des preuves de fraude très importante» dans le scrutin d'août, et avoir voulu présenter ces informations à la Commission des plaintes électorales pour une enquête plus approfondie.

Attitude laxiste de l'UNAMA

Selon Peter Galbraith, le numéro 1 de la mission de l'ONU ne voulait pas diffuser ces informations. Peter Galbraith va encore plus loin. Selon lui, la fraude avantage le président sortant Hamid Karzaï, qui aurait donc directement bénéficié de l'attitude laxiste de l'UNAMA. Kai Eide a d'abord «refusé de parler de fraude» puis, quand elle est devenue évidente, «il l'a systématiquement minimisée», déplore M. Galbraith.

Accusation rejetée par les Nations unies. Le congédiement de Peter Galbraith fait suite «à des nombreux différends sur un certain nombre de questions», a dit hier Farhan Haq, porte-parole de l'ONU joint à New York.

Des questions comme la fraude? «Les deux hommes veulent faire face à la fraude, mais pas de la même manière», a précisé M. Haq, ajoutant que Kai Eide préférait laisser la Commission électorale afghane et la Commission des plaintes électorales prendre les mesures de la fraude, sans interférences de la part de l'ONU.

Les résultats officiels du scrutin du 20 août demeurent inconnus. Des données préliminaires accordent 54,6% des voix à Hamid Karzaï et 27,8% à son principal rival, Abdullah Abdullah. Si un nouveau dépouillement prenant en compte les bulletins frauduleux devait faire glisser le président sortant sous la barre des 50%, les Afghans seraient appelés à voter dans un deuxième tour. Or, la tenue d'une nouvelle élection soulève des craintes de violences renouvelées.