Malgré le tollé international qu'a soulevé la pendaison de deux prisonniers politiques la semaine dernière, un membre haut placé de la justice iranienne a affirmé hier que neuf autres exécutions pourraient avoir lieu «prochainement».

Cette annonce survient à moins de 10 jours du 31e anniversaire de la révolution iranienne. Ce jour-là, le 11 février, on s'attend à ce que des manifestants envahissent les rues des grandes villes du pays.

 

Comme chaque année à cette date, des centaines de milliers le feront pour crier leur soutien au régime dirigé par l'ayatollah Ali Khamenei, mais on s'attend aussi à ce que des milliers de personnes saisissent l'occasion pour faire entendre leur mécontentement.

La confrontation entre les supporteurs du pouvoir en place et l'opposition risque d'être un épisode marquant de la crise politique qui secoue l'Iran depuis la réélection contestée, le 12 juin 2009, du président ultra-conservateur Mahmoud Ahmadinejad.

Doublement inculpés

L'identité des neuf hommes qui sont dans le couloir de la mort n'a pas été rendue publique. Hier, Seyyed Ebrahim Raïssi, premier adjoint du chef de l'autorité judiciaire de l'Iran, a noté à ce sujet que comme «les deux personnes exécutées (le 28 janvier), les neuf qui seront exécutées prochainement ont été arrêtées lors des troubles».

Des organisations internationales des droits de la personne contestent une partie de cette affirmation, soutenant que les deux hommes mis à mort la semaine dernière, Arash Rahmanipour et Mohammad Reza Al-Zamani, avaient été arrêtés bien avant le début des manifestations, mais jugés en même temps que des centaines de membres de l'opposition lors de procès-spectacles.

Les autorités iraniennes ont avancé hier que les neuf nouveaux condamnés à mort ont été reconnus coupables de tentative de «renversement du régime islamique». Cinq d'entre eux auraient aussi été inculpés d'affiliation aux Moudjahidines du peuple, un mouvement islamiste iranien de gauche, établi en Irak, vivement critiqué en Iran pour avoir pris les armes contre ses concitoyens lors de la guerre Iran-Irak. Selon la justice iranienne, les autres condamnés, à l'instar de ceux exécutés la semaine dernière, appartiennent à une organisation pro-monarchiste.

«En les condamnant à mort, le gouvernement est en train de mettre la table pour une longue série d'exécutions», a dénoncé hier Hossein Mahoutiha, porte-parole à Montréal du Réseau d'activistes iraniens pour la défense des droits de l'homme en Europe et en Amérique du Nord. «On a déjà vu la même chose à deux occasions dans le passé, en 1980 et en 1987.» À cette époque, l'Iran avait exécuté à la chaîne des centaines de prisonniers politiques, a-t-il rappelé. M. Mahoutiha estime qu'en médiatisant les pendaisons maintenant, les autorités iraniennes veulent dissuader les Iraniens de prendre part aux manifestations du 11 février.

«La pire des dictatures»

Jusqu'à maintenant relativement prudent dans ses critiques, le leader du mouvement d'opposition et candidat déchu aux élections présidentielles de l'été dernier, Mir Hossein Moussavi, a lancé hier une attaque en bonne et due forme contre le régime en place. Selon lui, la révolution à laquelle il a participé en 1979 a échoué. «La majorité de la population (iranienne) était convaincue que la révolution allait supprimer toutes les structures qui mènent au totalitarisme et à la dictature. J'étais de ceux-là, mais aujourd'hui, je ne le pense plus», a-t-il dit. Ancien premier ministre de l'Iran, proche de l'ayatollah Khomeiny, Mir Hossein Moussavi a aussi affirmé que «la dictature au nom de la religion est la pire des dictatures».