Deux des trois Canadiens qui étaient à bord du Mavi Marmara ont raconté l'assaut israélien qui a coûté la vie à neuf Turcs lors d'une conférence, hier soir à Montréal. Les organisateurs de la soirée, la Coalition pour la justice et la paix en Palestine et le Congrès canadien palestinien, ont aussi annoncé qu'un bateau canadien pourrait se rendre à Gaza dans les prochains mois.

«C'était Apocalypse Now.» C'est ainsi que le retraité originaire de Colombie-Britannique Kevin Neish a décrit les minutes suivant l'arrivée des forces israéliennes, pendant la nuit du 31 mai dernier. Filant la métaphore cinématographique, M. Neish a décrit un assaut digne d'un «film hollywoodien».

C'est pendant la prière du matin, vers 4h, que les premiers canots pneumatiques israéliens se sont approchés du Mavi Marmara, alors en route vers Gaza, raconte Farook Burney, Canadien maintenant installé au Qatar où il dirige une ONG consacrée à l'aide aux écoliers palestiniens.

Peu après, des hommes vêtus en noir, masqués et armés, sont arrivés par hélicoptère. «On a commencé à entendre des coups de feu et des grenades. Les gens étaient atteints, j'ai vu plusieurs hommes blessés. Un homme à côté de moi a pris une balle en pleine poitrine: je crois qu'il est mort», a-t-il dit.

Pendant l'assaut israélien, les personnes à bord du bateau ont tenté de se défendre, a indiqué Kevin Neish, à l'aide de lance-pierres et de bâtons. «Nous étions dans les eaux internationales. (Les Israéliens) sont des criminels, nous les traitions comme des criminels», a-t-il expliqué, tout en réaffirmant, vidéo à l'appui, que personne à bord n'était armé.

Quarante-cinq minutes après l'arrivée des commandos israéliens, le capitaine du Mavi Marmara a annoncé que le bateau ne se rendrait pas à Gaza. Après la reddition, les blessés ont dû attendre une heure avant d'être soignés, selon Farook Burney, qui est aussi resté pendant six heures à genoux, les mains menottées, sans accès à des sanitaires.

Arrivés en Israël, les militants pro-palestiniens ont dû attendre encore plusieurs heures pour être évacués vers une prison. «On a demandé accès à un avocat ou à parler à nos familles, mais on nous a dit de rejoindre nos cellules», a-t-il raconté, avant d'ajouter: «Ma famille ignorait si j'étais vivant.»

C'est grâce à l'insistance de la Turquie que Farook Burney a finalement été envoyé vers l'aéroport, où des avions attendaient l'ensemble des militants arrêtés. «Sans les Turcs, on serait peut-être encore en Israël», croit celui qui a tenté, sans succès, d'interpeller le premier ministre Stephen Harper sur le sujet.

Le Mavi Marmara tentait de briser le blocus imposé à Gaza par Israël depuis la prise du pouvoir par le Hamas, en 2007. Depuis samedi, une nouvelle expédition maritime, cette fois affrétée par une organisation libyenne, tente à son tour de briser le blocus maritime de Gaza malgré les menaces d'arraisonnement d'Israël (voir encadré).

Dans les prochains mois, un bateau canadien prendra aussi la route de Gaza, selon Denis Kosseim, coordonnateur de la Coalition pour la justice et la paix en Palestine. Une collecte de fonds de 300 000$ permettra d'affréter un bateau pour acheminer de l'aide à Gaza et ramener au Canada des produits palestiniens.