Près de 500 détenus, essentiellement des talibans, se sont évadés de la prison de Kandahar dans la nuit de dimanche à lundi par un tunnel long de 300 mètres, que les insurgés affirment avoir mis cinq mois à creuser de l'extérieur.

Il s'agit d'un nouveau camouflet embarrassant pour le gouvernement de Kaboul et ses alliés de l'OTAN, qui ont multiplié les opérations ces deux dernières années dans cette région du Sud afghan, bastion des talibans et considérée comme cruciale pour stabiliser le pays.

Le porte-parole du président afghan Hamid Karzaï a qualifié l'évasion de «désastre» qui «n'aurait pas dû se produire».

Selon le gouverneur provincial de Kandahar, Tooryalai Wesa, 488 détenus se sont échappés, tous des «prisonniers politiques» - des commandants ou militants talibans présumés qui n'ont pas été arrêtés pendant des combats ou des attaques - à l'exception de 13 criminels de droit commun.

Une source sécuritaire a indiqué sous couvert d'anonymat que le tunnel faisait 300 mètres de long. M. Wesa a lui évoqué un tunnel d'un kilomètre creusé de l'extérieur de la prison.

Les insurgés talibans ont de leur côté affirmé être parvenus à faire sortir de la prison 541 des leurs, dont 106 «commandants», grâce à un tunnel long de 320 mètres, creusé pendant cinq mois, débouchant à l'intérieur du quartier des «prisonniers politiques» de la prison.

M. Wesa a admis que cette évasion était un échec pour les forces de sécurité. Seuls 26 évadés ont été repris et deux ont été tués par les forces de sécurité qui tentaient de les capturer, a-t-il précisé.

Les autorités afghanes n'ont pas fourni de précisions dans l'immédiat sur l'identité des évadés.

«Le tunnel a touché au but la nuit dernière. Les moudjahidine prisonniers ont été conduits à l'extérieur par cette voie par trois détenus préalablement informés», ont expliqué les talibans dans un communiqué. Selon eux, l'opération a duré quatre heures et s'est terminée à 03H30 (23H00 GMT dimanche) lundi matin, et les détenus ont été récupérés par des véhicules.

Les talibans affirment en outre qu'un commando suicide avait été posté à proximité de la prison, mais qu'il n'a pas eu besoin d'entrer en action.

De vastes opérations sont en cours pour retrouver les prisonniers, dont les données biométriques sont enregistrées, ce qui les rend facilement identifiables, a indiqué M. Wesa.

La prison de Kandahar avait déjà été le théâtre d'une spectaculaire évasion le 13 juin 2008. Un commando de talibans l'avait prise d'assaut, et près de mille prisonniers, dont une moitié de talibans, avaient pris la fuite.

A l'intérieur de la prison, les autorités ont montré à un correspondant de l'AFP l'entrée du tunnel, un trou d'un peu moins d'un mètre de diamètre et trois de profondeur creusé dans le sol en béton de la cellule n°7. Des vêtements et autres effets personnels étaient visibles à côté du trou, visiblement abandonnés par les détenus avant de s'introduire dans le tunnel.

Le bloc des «politiques» compte une trentaine de cellules, ouvertes, entre lesquelles chacun d'eux pouvait circuler librement.

Kandahar est le berceau de l'ancien régime des talibans (1996-2001), chassés du pouvoir par une coalition internationale fin 2001, et qui ont déclenché depuis une sanglante insurrection contre le fragile gouvernement de Kaboul et l'OTAN.

Le 15 avril, le chef de la police provinciale avait été tué dans un attentat suicide perpétré à l'intéreur du quartier général de la police de la ville.

Les talibans ont récemment procédé à plusieurs attaques audacieuses de cibles très sensibles et très protégées, recourant à des hommes en uniforme, ce qui fait craindre une infiltration croissante des forces afghanes par les insurgés, qui ont gagné du terrain ces dernières années.