Le frère du président afghan Hamid Karzaï, Ahmed Wali Karzaï, assassiné mardi et enterré mercredi, était un personnage controversé, accusé d'être un baron de la drogue, mais surtout un homme-clé dans son fief de Kandahar (sud), berceau historique des talibans.

Issu d'une famille aisée, membre de l'influente tribu pachtoune des Popalzaï, Ahmed Wali Karzaï dirigeait depuis sept ans le conseil provincial de Kandahar, province où il était considéré comme tout puissant et ayant notamment la mainmise sur l'ensemble de l'économie.

Il était également incontournable pour les Américains dans cette région instable et stratégique de leur guerre contre l'insurrection, en dépit de certains sentiments peu amènes à l'égard du personnage.

«Bien que nous devions avoir affaire à lui en tant que chef du conseil provincial, il est largement admis qu'il est corrompu et est un trafiquant de drogue», écrit en septembre 2009, Frank Ruggiero, à l'époque représentant civil américain dans le sud, selon des câbles diplomatiques publiés fin 2010 par le site internet Wikileaks.

Ahmed Wali Karzaï avait toujours balayé ces accusations d'un revers de main, tout comme celles lui attribuant le contrôle d'opaques sociétés privées de sécurité ou le disant employé par la CIA, en soulignant l'absence de preuves.

«Son implication dans le trafic de drogue est avérée», a néanmoins assuré à l'AFP une source sécuritaire occidentale sous le couvert de l'anonymat, alors que l'Afghanistan produit 90% de l'opium mondial.

Benjamin de la fratrie Karzaï -six garçons et une fille-, Ahmed Wali Karzaï, 49 ans, homme massif aux traits épais et à la barbe poivre et sel soigneusement taillée, avait le même père que le chef de l'État afghan, mais pas la même mère.

Leur père Abdul Ahad, influent chef popalzaï, fut parlementaire dans les années 60, sous la monarchie. Après avoir fréquenté un des plus prestigieux lycées de Kaboul, Ahmed Wali passe la majeure partie de la guerre anti-soviétique à Chicago, aux États-Unis, avec deux de ses frères.

Il rejoint dans le courant des années 1990, après la chute du régime communiste et le début de la guerre civile, Hamid et leur père exilés à Quetta dans le sud-ouest du Pakistan, où Abdul Ahad Karzaï sera assassiné en 1999 par des hommes armés, présentés comme des talibans.

Wali Karzaï était lui-même père de quatre enfants, deux filles et deux garçons, dont le dernier né avait juste trois mois, a expliqué un proche à l'AFP.

Depuis l'invasion américaine de fin 2001 et l'installation de son demi-frère à la tête de l'État afghan, il avait «graduellement bâti un empire puissant à Kandahar, via le soutien des bailleurs internationaux et en faisant passer sous sa coupe les réseaux-clés de la province, en matières commerciale, militaire et de sous-traitance», selon Carl Forsberg, auteur d'un rapport sur la province de Kandahar.

Son rôle dans le sud de l'Afghanistan divisait autant que le personnage. «Il était vu pour beaucoup comme un obstacle au changement et au progrès dans le sud et par d'autres comme le personnage central en terme de sécurité», explique Candace Rondeaux, analyste du centre de réflexion International Crisis Group (ICG).

Ses admirateurs et ses détracteurs se partageaient à parts égales au sein des différentes ethnies du pays. Mais au bout du compte, «il se pourrait qu'il ait eu plus d'ennemis que d'amis», estime Candace Rondeaux.