Depuis deux ans, le premier ministre de l'Autorité palestinienne mise sur la croissance économique pour promouvoir la création d'un État. Ses efforts ont été tour à tour salués et critiqués. À un peu plus d'un mois d'une tentative d'adhésion palestinienne à l'ONU et alors que le gouvernement traverse une crise financière, Salam Fayyad demeure à l'avant-scène.

Le premier ministre de l'Autorité palestinienne, Salam Fayyad, est accueilli en héros par les villageois de Beituna, près de Ramallah, où il a inauguré un jardin public la semaine dernière. «Quand vous avez été malade, nous avons été vraiment inquiets», lui lance un homme, en référence au malaise cardiaque qu'il a eu en mai dernier.

L'ancien économiste à la Banque mondiale apparaît détendu devant la foule de partisans et de politiciens. Il s'amuse avec des enfants qui lui tapent dans les mains. L'homme de 59 ans prononce son discours sans l'aide de notes, son veston posé sur une chaise. Il défend d'un ton enflammé l'argent investi dans ce nouveau parc, malgré l'incertitude économique.

L'Autorité palestinienne vit une crise financière depuis le début de l'été. Salam Fayyad, aussi ministre des Finances, avait annoncé l'imminence de la crise si les États donateurs, particulièrement les pays arabes, ne versaient pas les sommes convenues. Il manquerait quelque 30 millions par mois sur les dons promis. Résultat: le gouvernement n'a versé à ses quelque 170 000 employés que la moitié de leur salaire de juillet.

Les fonctionnaires ont menacé de faire la grève s'ils ne recevaient pas leur salaire complet en août. Le premier ministre a annoncé cette semaine qu'ils seraient payés intégralement, même si cela devait réduire «sensiblement la capacité du gouvernement à répondre à d'autres besoins dans les prochains mois».

Salué et critiqué

En poste depuis 2007 en tant qu'indépendant, Salam Fayyad a été salué pour sa gestion des finances des dernières années. Dernièrement, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international ont publié des rapports qui concluent que l'Autorité palestinienne est apte à gérer un futur État.

Sur le terrain, plusieurs ont pourtant critiqué son approche, notamment parce qu'il se concentre sur les institutions. «J'aimerais le voir libérer la Palestine, mais j'aimerais aussi le voir créer des emplois, dit Zakaria, directeur d'une entreprise de nettoyage à Hébron. Nous avons vu des projets, comme des rues et des écoles, mais c'est minimal.»

Le premier ministre a déjà exprimé des doutes sur les résultats de la tentative d'adhésion d'un État palestinien à l'ONU en septembre. Mais peu importe la voie que choisiront les Palestiniens, il croit que les progrès accomplis sur le terrain grâce à ses programmes contribueront à la création d'un État. «C'était un objectif explicite de notre programme», a-t-il dit à La Presse.

Salam Fayyad est aussi critiqué par le Hamas, qui contrôle la bande de Gaza et qui s'oppose à ce qu'il soit reconduit à son poste dans un gouvernement intérimaire. Depuis 2007, le Hamas est à couteaux tirés avec le Fatah, au pouvoir en Cisjordanie. Leur réconciliation, annoncée en mars, achoppe notamment sur le choix du premier ministre dans un gouvernement d'unité.

«Je sais que ma nomination a généré beaucoup de controverse, a dit le premier ministre à La Presse, mais ma position est claire et je la répète: je ne suis en aucun cas un obstacle. Dès qu'ils annonceront qu'ils s'entendent sur un gouvernement, je serai le premier à me réjouir.»