La Knesset (parlement israélien) a approuvé lundi soir en première lecture un projet de loi controversé sur la presse, en dépit d'une levée de boucliers des journalistes.

Le projet de loi, soutenu par la droite et l'extrême droite, aggrave de façon draconienne les sanctions contre les auteurs de textes jugés «diffamatoires», que ce soit dans la presse, à la radio-télévision et même sur Facebook.

42 députés ont voté pour et 31 contre, sur les 120 membres de la Knesset, les autres n'ayant pas participé au vote.

Auparavant, toujours à l'instigation du camp ultra nationaliste, la Knesset a adopté en première lecture un projet de loi modifiant la composition des commissions de nomination de juges.

Ces textes doivent encore passer devant la commission des lois de la Knesset pour être reformulés avant d'être voté en seconde et troisième lectures en séance plénière. Ce n'est qu'après cette étape qu'il auront force de loi.

Des centaines de journalistes, dont des présentateurs vedettes de la radio-télévision, ont stigmatisé ce projet de loi qualifié de «liberticide» dénonçant des menaces sur la liberté d'expression, au cours d'un rassemblement sans précédent dimanche à Tel Aviv.

L'association de la presse étrangère s'est jointe lundi à cette protestation, considérant que la nouvelle loi «vise clairement à intimider et étouffer les médias en Israël».

Dans sa mouture actuelle, le projet de loi fixe le plafond légal des dommages et intérêts à 300 000 shekels (80 000 $), mais ce montant peut être plus élevé dans les cas les plus graves.

Il quintuple ainsi le montant des sommes susceptibles d'être réclamées à des médias attaqués en justice pour diffamation, quand bien même les plaignants n'apporteraient pas la preuve qu'ils ont subi des dommages réels du fait de la publication des textes incriminés.

Le parti likoud (droite) du Premier ministre a imposé la discipline de vote concernant l'adoption de ce projet de loi. Mais des ministres de ce parti opposés à la loi n'ont pas participé au vote, le président de la Knesset Réuven Rivlin (Likoud) ayant quant à lui voté contre.

Avant de voter en faveur de la loi, M. Nétanyahou s'est voulu rassurant. «Aussi longtemps que je serai Premier ministre, Israël restera une démocratie exemplaire», a-t-il déclaré au groupe parlementaire de son parti .

En face, la dirigeante de l'opposition Tzipi Livni, du parti centriste Kadima a affirmé que l'amendement traduisait «une intention délibérée de porter atteinte à des forces qui critiquent le pouvoir».

Fustigeant la campagne tous azimuts de l'extrême droite, elle a estimé que «l'amendement vise dans un premier temps à affaiblir les médias, le système judiciaire et les organismes de défense des droits de l'Homme, pour pouvoir par ensuite imposer des lois» sans avoir avoir à tenir compte des critiques.

La presse, qui au cours des dernières années a joué un rôle clef dans le dévoilement de scandales et affaires de corruption en Israël a été unanime à dénoncer lundi le projet de loi.

«Sous prétexte de réfréner le chien de garde de la démocratie que constitue la presse, on veut le tuer», selon le quotidien à grand tirage Yediot Aharonot.

Le 23 mars la Knesset avait adopté à l'initiative de l'extrême droite une première loi controversée pénalisant les organismes qui commémorent la «Nakba» («catastrophe» en arabe), l'exode des Palestiniens ayant accompagné la création d'Israël le 15 mai 1948 et la guerre israélo-arabe qui a suivi.

Le 11 juillet elle avait approuvé une seconde loi controversée qui sanctionne toute forme de boycottage des colonies juives dans les Territoires occupés, a-t-on appris de source parlementaire.

Le 13 novembre, l'extrême droite avait marqué un nouveau point en obtenant le feu vert du gouvernement à deux propositions de loi controversées ciblant le financement d'ONG israéliennes hostiles à l'occupation et à la colonisation des Territoires palestiniens.

Pour l'heure, toutefois ces deux lois semblent avoir été gelées, à la suite du tollé qu'elles ont provoqué en Israël et à l'étranger.