Homme d'affaires millionnaire devenu politicien, Naftali Bennett semble en voie de changer la donne aux élections législatives la semaine prochaine en Israël, explique notre collaboratrice.

Sur les affiches de campagne de son parti Habayit Hayehoudi (La Maison juive), il pose, kippa sur la tête et sourire aux lèvres. Naftali Bennett a des raisons de se réjouir. Il a ressuscité un parti exsangue et devrait être la révélation des urnes aux élections du 22 janvier prochain.

À tout juste 40 ans, cet Américain d'origine a déjà vécu plusieurs vies. Passé par les unités d'élite de l'armée israélienne, il a fait fortune en informatique. C'est en 2006 qu'il décide de se lancer en politique. Bras droit de Benyamin Nétanyahou jusqu'en 2008, il devient directeur général de Yesha, conseil représentatif des colons de Cisjordanie, de 2010 à 2012.

Parallèlement, il crée Israel Sheli (Mon Israël), un groupe qui réunit des milliers de jeunes sympathisants de droite sur l'internet. Leur but? Mener une vaste entreprise de correction des articles jugés trop «pro-palestiniens» sur Wikipédia.

En avril dernier, Naftali Bennett rompt avec le Likoud de Benyamin Nétanyahou, trop centriste pour lui. Il se tourne alors vers La Maison juive, parti nationaliste, religieux et très à droite.

Contre un État palestinien

En novembre dernier, il se propulse à la tête de la formation avec près de 70 % des suffrages aux primaires. À l'agonie depuis des années, le parti retrouve aujourd'hui une seconde jeunesse grâce à Bennett.

Dans sa vidéo de campagne, Naftali Bennett le clame haut et fort: son parti est «le dernier rempart» à la création d'un État palestinien, une «véritable catastrophe» selon lui. Cette radicalité assumée pourrait lui permettre de détourner une partie de l'électorat de droite de la coalition gouvernementale composée du Likoud de Benyamin Nétanyahou et d'Israel Baitenou (Israël notre maison), d'Avigdor Lieberman.

L'affermissement du caractère «sioniste et religieux» d'Israël est l'autre cheval de bataille de Bennett. Dans le détail de son programme, il affirme vouloir «renforcer les mouvements éducatifs du courant sioniste religieux».

Conservateur mais moderne, traditionaliste mais ouvert aux laïcs, farouchement hostile à toute tentative de conciliation avec les Palestiniens mais tourné sur le monde... L'ambivalent Naftali Bennett n'en finit pas de diviser l'opinion publique.

Des avis tranchés

Qu'ils soient séduits par son discours ou qu'ils le détestent, les Israéliens ont un avis tranché sur ce nouveau personnage phare de la vie politique. «Il va à l'encontre de toutes nos valeurs. Je ne me sens en rien représenté par cet illuminé dangereux dont le seul but est d'attiser la haine et de renforcer les droits des religieux», s'indigne Maya Cohen, étudiante.

«C'est une réelle menace pour la démocratie et il donne une très mauvaise image d'Israël», renchérit Oz Shamir, lui aussi étudiant. Un avis que ne partage pas Daniel Perez. Pour ce commerçant de Tel-Aviv, la candidature de Naftali Bennett est une bonne chose. «Il est honnête et sincère. Il faut absolument renouveler le personnel politique. Je n'en peux plus de ces dirigeants corrompus et hypocrites qui sont là depuis des années!», dit-il.

S'il est en pleine ascension, Naftali Bennett reste lucide. Il ne cesse de l'affirmer, Benyamin Nétanyahou sera réélu. Néanmoins, La Maison juive est en passe de devenir la troisième force à la Knesset, le Parlement israélien. La question qui taraude réellement la nouvelle étoile de la politique israélienne est désormais de savoir quelle place le chef du Likoud sera obligé de lui concéder sur l'échiquier politique.