(Jénine) Cinq Palestiniens, dont un combattant, ont été tués et plus de 90 blessés lundi lors d’un raid militaire israélien à Jénine ayant provoqué d’intenses affrontements dans cette ville du nord de la Cisjordanie occupée où des missiles ont été tirés par un hélicoptère israélien.

Sept membres des forces de sécurité israéliennes ont été blessés et hospitalisés pendant cette incursion dans le camp de réfugiés de la ville. Les troupes israéliennes, qui y étaient entrées vers 4 h locales (21 h heure de l’Est), selon les autorités locales, s’en sont retirées autour de 15 h après de très violents combats, selon des journalistes de l’AFP sur place.

Après le départ des troupes, les habitants sont sortis en masse dans les rues pour les funérailles des Palestiniens tués : un adolescent de 15 ans et quatre hommes âgés de 19 à 29 ans, selon le ministère de la Santé palestinien. L’un d’eux, Qassam Abou Saria, était un combattant du Djihad islamique, a annoncé ce groupe armé dans un communiqué.

La ministre de la Santé, Mai al-Kaila, a réclamé l’envoi « urgent » de fournitures médicales, médicaments et poches de sang à Jénine, où 91 personnes ont été blessées, dont 23 grièvement, d’après un communiqué.

PHOTO RONALDO SCHEMIDT, AGENCE FRANCE-PRESSE

Cet homme blessé lors du raid a été transporté à l’hôpital en ambulance.

Un photographe de l’AFP a décrit des heurts d’une intensité rare, dans lesquels un journaliste palestinien a été blessé, et a dit avoir vu un hélicoptère tirer deux missiles, ce qui n’était pas arrivé depuis des années.

« Véritable guerre »

L’armée israélienne a dit être entrée à Jénine pour y arrêter des « suspects » appartenant au Djihad islamique ainsi qu’au mouvement islamiste Hamas.

Un hélicoptère militaire a « ouvert le feu vers des hommes armés afin d’aider à l’extraction de soldats », sur fond d’« échange de tirs très intense », indique un communiqué.

Selon une source au sein des renseignements palestiniens, c’est la première fois qu’un hélicoptère a recours à des missiles sur Jénine depuis la fin de la Seconde Intifada (soulèvement palestinien, 2000-2005).

PHOTO JAAFAR ASHTIYEH, AGENCE FRANCE-PRESSE

Un hélicoptère AH-64 Apache libère une charge lors du raid de l’armée israélienne à Jénine.

En début d’après-midi, alors que les combats faisaient rage, Khaled Ahmad, médecin du Croissant-Rouge palestinien posté près d’une ambulance à l’hôpital Avicenne, a qualifié la situation de « véritable guerre » à l’intérieur du camp.

Après le départ des troupes israéliennes, des habitants ont montré deux trous béants où selon eux deux véhicules militaires israéliens ont été touchés par des explosifs.

Le lieutenant-colonel Richard Hecht, porte-parole de l’armée israélienne, a indiqué qu’un véhicule blindé de transport de troupes avait été endommagé par un engin explosif d’une puissance « très inhabituelle ».

L’armée a indiqué être sortie du camp en récupérant tous ses véhicules.

Le ministre de la Défense israélien, Yoav Gallant, a promis d’utiliser « tous les moyens à disposition pour frapper les éléments terroristes là où ils se trouvent ».

Le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Volker Türk, s’est dit « extrêmement préoccupé » et a dénoncé, dans un discours, une hausse de l’« usage excessif de la force » des forces israéliennes en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967.

Le Secrétariat général de la Ligue arabe a condamné « les crimes commis par l’armée d’occupation », tandis que l’Union européenne, « extrêmement préoccupée par les derniers évènements à Jénine » a déclaré dans un communiqué que « les opérations militaires [devaient] être proportionnées et conformes au droit international humanitaire ».

« Spirale »

Ces « massacres incessants » sont des « tentatives de faire exploser la région et l’entraîner dans une spirale de violence », a réagi Nabil Abou Roudeina, porte-parole du président palestinien Mahmoud Abbas.

Le raid israélien a eu lieu alors que Barbara Leaf, sous-secrétaire d’État américaine chargée du Proche-Orient, était à Ramallah pour des discussions avec des responsables palestiniens.

Plus tard dans la journée, deux soldats israéliens ont été blessés par des Palestiniens qui les ont percutés avec leur véhicule à un poste de contrôle près de Jénine, selon l’armée israélienne.

« Les soldats ont riposté par des tirs et les victimes ont été identifiées », a ajouté l’armée. Le ministère palestinien de la Santé a indiqué que deux Palestiniens blessés par balle étaient soignés dans un hôpital de Jénine, dont un dans un état critique.

Bastion de groupes armés palestiniens, le nord de la Cisjordanie est le théâtre d’affrontements souvent meurtriers entre des Palestiniens et les forces israéliennes qui y mènent des incursions fréquentes.

Assiégé par l’armée israélienne en 2002, le camp de Jénine avait été dévasté lors de combats au cours desquels 52 Palestiniens et 23 soldats israéliens avaient été tués.

Le camp de 23 000 habitants se situe dans une zone palestinienne dite autonome en vertu des accords israélo-palestiniens d’Oslo (1993).

Depuis le début de l’année, au moins 164 Palestiniens, 21 Israéliens, un Ukrainien et un Italien ont été tués dans des violences liées au conflit israélo-palestinien, selon un décompte de l’AFP établi à partir de sources officielles israéliennes et palestiniennes.

Ces statistiques incluent, côté palestinien, des combattants et des civils parmi lesquels des mineurs, et côté israélien, en majorité des civils parmi lesquels des mineurs, et trois membres de la minorité arabe.