(Beyrouth) Le chef du Hezbollah pro-iranien, Hassan Nasrallah, a estimé vendredi que la guerre entre Israël et le Hamas pourrait se transformer en conflit régional si elle ne s’arrêtait pas, faisant porter aux États-Unis l’entière responsabilité de la situation.

Dans son premier discours depuis le déclenchement de la guerre du Hamas contre Israël le 7 octobre, Hassan Nasrallah a en outre prévenu que « toutes les options » étaient ouvertes pour un élargissement du conflit sur le front libanais avec Israël.

Le discours télévisé du chef de la puissante formation, retransmis à des dizaines de milliers de ses partisans dans la banlieue sud de Beyrouth et d’autres régions libanaises, était très attendu pour savoir s’il allait entraîner le Liban de plain-pied dans le conflit.  

Saluant la bataille « héroïque » du Hamas à Gaza, Hassan Nasrallah a accusé les États-Unis, dont le chef de la diplomatie Antony Blinken a effectué vendredi une visite en Israël, d’être « entièrement responsables de la guerre en cours à Gaza ».

Il a estimé qu’ils devaient « arrêter rapidement l’agression à Gaza » s’ils voulaient « empêcher une guerre régionale ».

Depuis le lendemain du 7 octobre, le Hezbollah est engagé dans des échanges de tirs quotidiens, mais limités, à la frontière avec Israël, en solidarité avec son allié palestinien, le Hamas.

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Le discours de Hassan Nasrallah était très attendu, pour savoir s’il allait entraîner le Liban de plain-pied dans la guerre en cours.

Les violences ont déjà fait 72 morts au Liban, dont 54 combattants du Hezbollah, selon un décompte de l’AFP, et au moins six soldats et un civil côté israélien, d’après les autorités.

« Juste milieu »

Depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, déclenchée le 7 octobre par l’attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien sur le sol israélien, plus de 1400 personnes ont été tuées, selon les autorités israéliennes, en majorité des civils le jour de l’attaque du Hamas et plus de 240 personnes ont été prises en otage.

En représailles, Israël a déclaré une guerre pour « anéantir » le Hamas, pilonnant sans relâche la bande de Gaza où 9227 personnes, dont 3826 enfants, ont été tuées, selon un dernier bilan du Hamas vendredi.  

Le chef du Hezbollah a tenu à souligner que le Hamas avait pris seul la décision de déclencher la guerre contre Israël, et n’en avait pas informé le Hezbollah ou l’Iran.

Mais il a indiqué que son mouvement avait ouvert le front libanais « pour soutenir Gaza » et qu’il « mobilisait le tiers de l’armée israélienne ».

Pesant ses mots, il a estimé que « la possibilité que ce front connaisse une escalade additionnelle ou une guerre totale […] est réaliste, et peut arriver, et l’ennemi doit s’y préparer ».

Il a estimé que « toutes les options » étaient sur la table, avertissant Israël qu’une attaque contre le Liban « serait la plus grande bêtise de son existence ».

Le chef du Hezbollah a souligné que les alliés de l’Iran s’étaient également mobilisés à travers la région pour soutenir le Hamas, saluant les formations irakiennes et yéménites « entrées dans cette bataille bénie » en revendiquant des tirs sur Israël.

« C’était un discours éloquent qui a envoyé un message clair […] : la résistance est présente sur le terrain à tous les fronts », a affirmé à l’AFP Alaa Hachem, un urbaniste à l’Université de Bagdad, qui a suivi le discours sur un écran géant dans le centre de la capitale irakienne, aux côtés de centaines de partisans de groupes pro-iraniens.

Pour l’analyste Maha Yahya, directrice du Carnegie Middle East Center basé à Beyrouth, le chef du Hezbollah a su « trouver un juste milieu ».

Il était pris entre ceux qui critiquent sa formation pour « ne pas être entrée dans le conflit avec toutes ses capacités » et la volonté du Hezbollah, ainsi que celle de l’Iran, « d’éviter un conflit régional », explique-t-elle.

« Inimaginable »

Washington a réagi en avertissant le Hezbollah qu’il ne devait pas « chercher à profiter » de la guerre entre Israël et le Hamas.

« Les États-Unis ne veulent pas que le conflit s’étende au Liban. La dévastation qui s’en suivrait pour le Liban et sa population serait inimaginable, et peut être évitée », a déclaré le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison-Blanche.

Une guerre destructrice a déjà opposé en 2006 le Hezbollah à Israël. Elle avait ravagé les infrastructures et fait plus de 1200 morts côté libanais, en majorité des civils. Côté israélien, 160 personnes avaient été tuées, essentiellement des militaires.  

Le Hezbollah a renforcé depuis son important arsenal militaire, qui comprend notamment des missiles de haute précision, mais s’est gardé pour le moment de les utiliser.

Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a mis en garde le Hezbollah après ces menaces, dans un discours télévisé.

« Je répète à nos ennemis, ne vous trompez pas à notre sujet. Une telle erreur serait très coûteuse, vous payeriez un prix inimaginable », a-t-il martelé.