Les États-Unis ont mis leur veto vendredi à une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU réclamant un « cessez-le-feu immédiat » dans la bande de Gaza, assiégée et dévastée par la guerre qui fait rage depuis deux mois entre l’armée israélienne et le Hamas.

Ce qu’il faut savoir

  • Les États-Unis ont mis leur veto vendredi à une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU réclamant un « cessez-le-feu humanitaire immédiat » dans la bande de Gaza réclamé avec force par le secrétaire général António Guterres.
  • L’armée israélienne a poursuivi vendredi son offensive dans la bande de Gaza, où elle dit avoir visé en 24 heures plus de 450 cibles, par des frappes terrestres, aériennes et navales.
  • Le ministère de la Santé du Hamas a fait état tôt vendredi de 40 morts dans des frappes près de la ville de Gaza, et de « dizaines » d’autres à Jabaliya et Khan Younès.
  • Les forces israéliennes ont tué vendredi par balle six Palestiniens dans un camp de réfugiés du nord de la Cisjordanie occupée, selon l’Autorité palestinienne.
  • Des salves de roquettes ont été tirées vendredi à l’aube contre l’ambassade des États-Unis dans l’ultra-sécurisée Zone verte de la capitale irakienne, Bagdad, sans faire de blessés ou de dégâts, mais illustrant le risque d’escalade sur fond de guerre entre Israël et le Hamas palestinien. L’attaque n’a pas encore été revendiquée.

Des combats acharnés se sont poursuivis pendant ce temps du nord au sud de la bande de Gaza, notamment à Khan Younès, la principale ville du Sud, où l’armée israélienne a annoncé avoir pris position dans le centre et avancer « de maison en maison », traquant les combattants du mouvement islamiste.

Après une première phase de son offensive terrestre dans le nord du territoire, parallèlement à sa campagne de frappes aériennes massives déclenchée le 7 octobre, l’armée a étendu cette semaine ses opérations au sol jusque dans le Sud, où se sont réfugiés des centaines de milliers de civils désormais pris au piège.

La population, confrontée à une situation humanitaire désastreuse, est poussée à se déplacer dans un périmètre de plus en plus exigu jusqu’à Rafah, le long de la frontière fermée avec l’Égypte, où des milliers de personnes tentent de s’abriter dans des camps de fortune.

« Ceux qui ont survécu aux bombardements courent désormais un risque imminent de mourir de faim et de maladie », ont averti Save the Children et d’autres ONG internationales, parlant d’une situation « apocalyptique ».

PHOTO MOHAMMED SALEM, REUTERS

Des enfants réfugiés à Rafah se tiennent à côté de vêtements suspendus à des cordes, le 8 décembre.

Avancée « méthodique »

La guerre a été déclenchée par l’attaque, d’une violence sans précédent, menée le 7 octobre sur le sol israélien par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza, au cours de laquelle 1200 personnes, en majorité des civils, ont été tuées selon les autorités israéliennes, et environ 240 autres prises en otage.

En riposte à l’attaque, Israël a promis de détruire le Hamas, au pouvoir depuis 2007 dans la bande de Gaza, classé organisation terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël.

D’après le gouvernement israélien, 138 otages sont toujours retenus à Gaza, après la libération fin novembre dans le cadre d’une trêve de sept jours de 105 personnes enlevées, dont 80 en échange de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël.

Au total, 93 soldats israéliens ont été tués dans les combats à Gaza, selon l’armée.

Dans la bande de Gaza, les bombardements israéliens ont fait 17 487 morts, pour plus des deux tiers des femmes et des moins de 18 ans, selon un nouveau bilan publié vendredi par le ministère de la Santé du Hamas.

Vendredi, selon l’armée, les combats ont fait rage notamment dans le secteur de Khan Younès, « un important bastion de l’organisation terroriste Hamas ».

PHOTO BASSAM MASOUD, REUTERS

Des Palestiniens dégagent une voiture endommagée lors de frappes israéliennes à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 8 décembre.

« Nous avons pris position dans le centre de la ville. Nous travaillons méthodiquement, avec précision, nous nous déplaçons de tunnel en tunnel, de maison en maison, et nous frappons les terroristes aussi précisément que possible », a déclaré le général Dan Goldfus, commandant de la 98division, dans un message vidéo diffusé par l’armée.

Les soldats ont découvert un dépôt d’armes dans une école, un poste de commandement du Hamas dans une mosquée, où des « terroristes » ont été tués, ainsi que des armes « au domicile d’importants cadres du Hamas », selon l’armée.

L’armée israélienne a en revanche reconnu vendredi l’échec d’une opération visant à libérer des otages dans la bande de Gaza, dans laquelle deux soldats ont été blessés. Un otage est mort pendant cette opération, d’après le Hamas.

« Situation catastrophique »

Face à une « situation catastrophique », le Conseil de sécurité des Nations unies était appelé à se prononcer sur une résolution réclamant un « cessez-le-feu humanitaire immédiat ».

Les États-Unis, principal allié d’Israël et opposés à tout cessez-le-feu, qui profiterait selon eux au Hamas, ont mis leur veto à cette résolution qui a recueilli en outre 13 voix pour et une abstention, celle du Royaume-Uni. La résolution préparée par les Émirats arabes unis était soutenue par près de 100 pays.

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a affirmé devant le Conseil de sécurité que « les violences perpétrées par le Hamas ne peuvent en aucun cas justifier la punition collective du peuple palestinien ».

António Guterres avait pour la première fois mercredi invoqué l’article 99 de la Charte des Nations unies pour provoquer cette réunion extraordinaire du Conseil sur un dossier qui « pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationales ».

Le directeur de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), Philippe Lazzarini, a lui aussi appelé vendredi à un « cessez-le-feu humanitaire immédiat » et à mettre fin « à l’hécatombe des vies palestiniennes ».

Depuis le début de la guerre, le Conseil de sécurité a réussi à adopter une résolution qui appelait à des « pauses et couloirs humanitaires » à Gaza, mais pas à un « cessez-le-feu ».

Le Hamas avait lui aussi appelé le Conseil de sécurité des Nations unies à mettre fin à la « guerre brutale » à Gaza.

L’inaction du Conseil de sécurité le rend « complice du massacre » dans la bande de Gaza, a affirmé vendredi Médecins sans frontières.

Selon l’ONU, plus de la moitié des habitations ont été détruites ou endommagées par la guerre dans le territoire, où 1,9 million de personnes, soit 85 % de la population, ont fui leur foyer.

Les blessés continuent d’affluer dans les hôpitaux, parmi lesquels beaucoup d’enfants.

« Nous étions dans une zone considérée comme sûre. […] Après la frappe, nous avons soudain entendu des cris », a raconté Mohammed Jaarar, un habitant de Khan Younès.

PHOTO MOHAMMED DAHMAN, ASSOCIATED PRESS

Un homme transporte un enfant blessé dans un hôpital de Khan Younès, le 8 décembre.

La branche armée du Hamas a pour sa part revendiqué de nouveaux tirs de roquettes vers Israël, pour l’essentiel interceptées.

Israël a imposé depuis le 9 octobre un siège total à la bande de Gaza, qui provoque de graves pénuries d’eau, de nourriture, de médicaments et d’électricité, alors que l’aide humanitaire, dont l’entrée est soumise au feu vert israélien, n’arrive qu’au compte-gouttes depuis l’Égypte.

Le carburant, nécessaire au fonctionnement des générateurs dans les hôpitaux et aux équipements de dessalinisation de l’eau, manque aussi.

Le président français Emmanuel Macron a insisté vendredi auprès du premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou pour l’ouverture d’un deuxième point de passage à Kerem Shalom, entre Israël et la bande de Gaza, afin d’acheminer l’aide dont les civils palestiniens ont « urgemment besoin ».

PHOTO CLODAGH KILCOYNE, REUTERS

Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou (à gauche) console le membre du Cabinet de guerre Gadi Eisenkot lors des funérailles de son garçon, le 8 décembre à Herzliya.

Les États-Unis, malgré leur ferme soutien à Israël, s’inquiètent de plus en plus des lourdes pertes civiles palestiniennes.

« Il reste impératif qu’Israël fasse de la protection des civils une priorité », a déclaré le secrétaire d’État américain Antony Blinken, évoquant un « écart » entre l’intention déclarée et « les résultats ».

Des propos appuyés par le président Joe Biden dans un entretien téléphonique avec Benyamin Nétanyahou, d’après la Maison-Blanche.

La guerre a aussi ravivé les tensions en Cisjordanie occupée, où six Palestiniens ont été tués vendredi par les forces israéliennes, selon l’Autorité palestinienne, ainsi qu’à la frontière entre Israël et le Liban, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l’armée israélienne et le Hezbollah libanais, allié du Hamas.

PHOTO ZAIN JAAFAR, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des hommes pleurent la mort d’un proche tué lors d’un raid israélien en Cisjordanie occupée, le 8 décembre.

Des Palestiniens dévêtus détenus par les forces israéliennes dans la bande de Gaza

Créant une vive émotion sur les réseaux sociaux, les chaînes de télévision israéliennes ont diffusé jeudi soir des vidéos montrant des dizaines de Palestiniens en sous-vêtements, les yeux bandés, sous la garde de soldats israéliens dans la bande de Gaza.

L’armée israélienne a dit « enquêter » pour « vérifier qui est lié au Hamas et qui ne l’est pas », en référence au mouvement islamiste palestinien considéré comme une organisation terroriste par Israël, l’Union européenne et les États-Unis, entre autres.