(Sanaa) Les rebelles yéménites houthis ont averti mardi qu’ils riposteraient aux nouvelles frappes américano-britanniques menées dans la nuit contre leurs positions au Yémen, sur fond d’escalade liée au conflit entre Israël et le Hamas palestinien.

Les houthis qui contrôlent de vastes régions du Yémen en guerre multiplient les attaques contre des navires marchands en mer Rouge et dans le golfe d’Aden, disant agir en solidarité avec les Palestiniens à Gaza. De nombreux armateurs évitent désormais ces passages clés pour le commerce international.

Après une deuxième opération conjointe des États-Unis et du Royaume-Uni contre des positions houthis depuis le 12 janvier, le porte-parole militaire de ces rebelles, Yahya Saree, a affirmé que « ces attaques ne resteront pas sans réponse et impunies ».

Dans une publication sur le réseau social X, il a chiffré à 18 les raids menés, selon lui dans les provinces de Sanaa, Hodeïda, Taëz et Al-Bayda. Il n’a pas précisé s’il y avait eu des victimes.

D’après la chaîne des houthis, Al-Massirah, des frappes ont notamment ciblé la base militaire d’Al-Dailami, au nord de Sanaa.

Dans un communiqué militaire conjoint, les forces américaines et britanniques ont elles indiqué avoir visé lundi soir huit cibles, dont « un site souterrain de stockage et des sites de missiles et de surveillance aérienne ».  

« Affaiblir l’arsenal » Houthi

L’objectif est d’« affaiblir l’arsenal que les houthis utilisent pour mettre en danger le commerce mondial et les vies de marins innocents », indique le communiqué. « Nous n’allons pas hésiter à défendre des vies et le libre flux du commerce dans l’un des passages navigables les plus importants du monde. »

Les sites visés dans la nuit incluent « des systèmes de missiles et lanceurs, des systèmes de défense antiaérienne, des radars et des locaux de stockage d’armement profondément enterrés », a précisé le Commandement militaire américain au Moyen-Orient (Centcom).

« Ce que nous avons fait à nouveau, c’est envoyer le message le plus clair possible que nous continuerons à réduire la capacité (des houthis) à mener des attaques », a déclaré mardi le chef de la diplomatie britannique David Cameron.

Les frappes américano-britanniques sont une « menace à la paix et la sécurité dans la région » et constituent « un élargissement de l’envergure de la guerre », a réagi l’Iran, qui soutient les rebelles yéménites, par la voix de son ministre des Affaires étrangères.  

Au moment des frappes, « des images satellites montraient qu’environ 230 navires commerciaux et pétroliers se déplaçaient en mer Rouge », a ajouté Hossein Amir-Abdollahian qui s’exprimait lundi à New York, cité par l’agence officielle iranienne Irna.  

Les houthis affirment ne viser que les navires israéliens ou se dirigeant vers les ports israéliens, « en solidarité » avec la population de Gaza, assiégée et confrontée à une catastrophe humanitaire, après le début le 7 octobre de la guerre entre Israël et le Hamas déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement palestinien sur le sol israélien.

 « L’agression américano-britannique ne fera qu’accroître la détermination du peuple yéménite à assumer ses responsabilités morale et humanitaire envers les opprimés de Gaza », a commenté sur X Mohammed al-Bukhaiti, haut responsable Houthi.

Protéger le trafic maritime

Les houthis contrôlent une bonne partie du Yémen, après près d’une décennie de guerre contre les forces du gouvernement, appuyé par l’Arabie saoudite.  

Depuis mi-novembre, ils ont tiré de nombreux missiles et drones contre des navires qu’ils estiment liés à Israël, et ont également visé des navires américains depuis les frappes américano-britanniques.  

Lundi, ils ont affirmé avoir attaqué « le cargo militaire américain Ocean Jazz à l’aide de missiles » dans le Golfe d’Aden, ce qu’un responsable du Pentagone a affirmé à l’AFP être une « fausse » information.  

Les États-Unis, allié clé d’Israël, ont créé une coalition pour patrouiller au large du Yémen et « protéger » le trafic maritime international.  

Selon l’International Chamber of Shipping (ICS), 12 % du commerce mondial transite par la mer Rouge.

Les attaques des houthis ont fait grimper en flèche les frais d’assurances, incitant les grands transporteurs maritimes à dérouter leurs navires de cette zone, ce qui rend le trajet plus long et plus onéreux entre l’Asie et l’Europe.

Lundi, les houthis ont répété qu’ils continueraient à « empêcher les navires israéliens » de passer en mer Rouge et dans le golfe d’Aden jusqu’à la fin de la guerre à Gaza.

Dix jours d’escalade

Les armées américaine et britannique ont mené de nouvelles frappes dans la nuit de lundi à mardi contre les rebelles yéménites houthis, leur seconde opération conjointe en réponse aux attaques de ces insurgés pro-Iran au large du Yémen.

Les rebelles disent viser les navires qu’ils estiment liés à Israël en « solidarité » avec les Palestiniens à Gaza, en proie à la guerre entre l’armée israélienne et le mouvement islamiste Hamas. Leurs attaques en mer Rouge et dans le golfe d’Aden ont contraint de nombreux armateurs à suspendre le passage sur cette voie de transit cruciale représentant jusqu’à 12 % du commerce mondial.

Le Yémen est en proie à une guerre opposant depuis 2014 les houthis, qui se sont emparés de vastes régions du pays, aux forces gouvernementales et leurs alliés.

Voici la chronologie des évènements depuis les premières frappes.

12 janvier

Les forces américaines et britanniques frappent avant l’aube 60 cibles sur une quinzaine de sites tenus par les houthis au Yémen, en utilisant des avions de combat et des missiles, selon le commandement militaire américain au Moyen-Orient (Centcom). Cinq personnes ont été tuées lors des frappes, selon les houthis, qui tirent en réponse « au moins un » missile, sans atteindre aucune cible.

Après ces frappes, les rebelles proclament les intérêts américains et britanniques comme des « cibles légitimes ».

13 janvier

Une nouvelle frappe américaine touche la base aérienne d’Al-Dailami, située dans la capitale Sanaa contrôlée par les houthis, selon l’armée américaine, à la suite des avertissements des houthis sur une poursuite de leurs attaques contre les navires en mer Rouge.

14 janvier

Les forces américaines abattent un missile de croisière tiré par les houthis en direction du destroyer américain USS Laboon, depuis le Yémen.

15 janvier

Un missile tiré par les houthis atteint le cargo américain Gibraltar Eagle, au large de la ville d’Aden, dans le sud du Yémen, provoquant un incendie à bord, mais sans faire de victimes.

16 janvier

Les États-Unis détruisent quatre missiles balistiques antinavires prêts à être lancés depuis le Yémen, selon l’armée américaine. Plus tard, un missile touche un vraquier grec battant pavillon maltais et naviguant en mer Rouge, causant des dégâts limités.

17 janvier

Un drone lancé par les houthis frappe le vraquier américain Genco Picardy, sans faire de blessés, mais provoquant de légers dommages, selon le Centcom. Les forces américaines neutralisent ensuite 14 missiles « chargés pour être tirés » depuis le Yémen, d’après Washington.

18 janvier

Les houthis revendiquent des frappes ayant « touché directement » un navire marchand américain, le Chem Ranger, dans le golfe d’Aden. Les forces américaines déclarent que les missiles ont manqué leur cible. Les États-Unis affirment avoir détruit deux missiles antinavires des houthis au Yémen, prêts à être lancés en mer Rouge, selon eux.

19 janvier

L’armée américaine mène « trois frappes défensives » visant des lanceurs de missiles prêts à frapper dans la mer Rouge, selon le porte-parole de la Maison-Blanche, John Kirby.

20 janvier

Le Pentagone annonce avoir « détruit » un missile antinavire des houthis, dans de nouvelles frappes qualifiées d’« autodéfense ».

22 janvier

Les rebelles du Yémen affirment avoir lancé des missiles contre un cargo militaire américain dans le golfe d’Aden, Washington dément.

23 janvier

Les forces armées américaines et britanniques mènent de nouveaux bombardements contre huit cibles au Yémen. Les frappes ont visé « un site souterrain de stockage des houthis et des sites de missiles et de surveillance aérienne des houthis », indiquent-elles dans un communiqué conjoint, signé aussi par le Canada, l’Australie, Bahreïn et les Pays-Bas. Les rebelles menacent de riposter.