(Jérusalem) Israël a annoncé vendredi la saisie de 800 hectares de terres en Cisjordanie occupée en vue d’y bâtir de nouvelles colonies, décision qualifiée de « provocation » par l’ONG La Paix maintenant en pleine visite du secrétaire d’État américain, Antony Blinken, en Israël.

Interrogé sur cette décision juste avant son retour aux États-Unis, à l’issue de discussions tendues avec le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou à propos de la guerre à Gaza, M. Blinken a déclaré : « Vous connaissez notre point de vue sur l’expansion des colonies […] nous avons un problème avec ça ».

Selon La Paix maintenant, organisation israélienne anti-colonisation, il s’agit de la plus importante saisie de terres en territoire palestinien depuis les accords de paix d’Oslo (1993).

Figure de l’extrême droite et du mouvement de colonisation de la Cisjordanie, le ministre des Finances Bezalel Smotrich a annoncé « la déclaration d’environ 8000 dounams (800 hectares, NDLR) comme terres domaniales [de l’État d’Israël] dans la vallée du Jourdain », selon un communiqué.

Il s’agit « d’une nouvelle mesure spectaculaire et importante pour la colonisation » juive en Cisjordanie, ajoute le texte.

Condamnée par l’ONU comme « une violation flagrante du droit international », la colonisation de ce territoire palestinien s’est poursuivie sous tous les gouvernements depuis sa conquête par Israël en 1967 sur la Jordanie.

Mais depuis le retour au pouvoir de M. Nétanyahou fin 2022, grâce à l’appui de partis nationalistes-religieux comme celui de M. Smotrich, le mouvement des colons a enregistré d’importantes victoires.

Cette tendance s’est encore renforcée à l’ombre de la guerre à Gaza, selon La Paix maintenant, qui disait en janvier observer depuis le 7 octobre « une vague sans précédent d’activités de colonisation [comme] la construction d’avant-postes, de routes, de barrières à l’initiative de colons ».

« Obstacle majeur »

Votée en 2016 avec l’appui des États-Unis, la résolution 2334 du Conseil de sécurité des Nations unies qualifie « la création par Israël de colonies de peuplement dans le Territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est » d’« obstacle majeur […] à l’instauration d’une paix globale, juste et durable ».

Pour La Paix maintenant, MM. Nétanyahou et Smotrich « sont déterminés à se battre contre le monde entier et contre les intérêts du peuple israélien au profit des intérêts d’une poignée de colons qui reçoivent des milliers de dounams comme s’il n’y avait aucun conflit politique à résoudre, ni aucune guerre à finir ».

M. Blinken a rencontré M. Nétanyahou vendredi à Tel-Aviv sur fond de profondes divergences entre le gouvernement israélien et Washington, son premier soutien international, à propos de la conduite de la guerre qu’Israël mène à Gaza depuis l’attaque lancée le 7 octobre par le mouvement islamiste palestinien Hamas, qui a fait plus de 1160 morts côté israélien.

Les opérations militaires qu’Israël a lancées en représailles dans le but affiché d’éliminer le Hamas ont fait plus de 32 000 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste.

Opposition jordanienne

Alors que la violence s’intensifie en Cisjordanie, les États-Unis ont pris des sanctions financières contre certains colons israéliens qualifiés d’« extrémistes ».

Quelque 490 000 Israéliens vivent dans les colonies juives de Cisjordanie, au milieu de trois millions de Palestiniens.

L’établissement et l’expansion de colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés relèvent « du crime de guerre » et « risquent d’éliminer toute possibilité pratique d’établir un État palestinien viable », avait mis en garde le 8 mars un rapport du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme.

Le ministère des Affaires étrangères jordanien a opposé vendredi dans un communiqué un « rejet catégorique » à la saisie de terres annoncée par M. Smotrich, et appelé la communauté internationale à agir « rapidement et de façon décisive pour mettre un terme aux actions unilatérales, illicites et illégales d’Israël ».