Nous avons tous notre endroit préféré dans la maison. Des gens nous font découvrir leur pièce de prédilection.

Sitôt les cartons de déménagement vidés, Pierre Laruelle n’a pas tardé à abattre une cloison de sa nouvelle maison pour aménager son terrain de jeu personnel : une pièce entièrement consacrée à sa passion pour le modélisme ferroviaire.

La scène est digne d’un making-of d’un film à effets spéciaux : au centre d’un paysage rural de la grandeur de deux chambres à coucher, le ferrovipathe de Saint-Jérôme a l’allure d’un géant lorsqu’il soulève des locomotives et des wagons miniatures pour les disposer sur des chemins de fer.

Tout autour de lui courent en serpentins d’innombrables voies ferrées.

La mise en place méticuleuse des trains fait naître dans la pièce un agréable sentiment de plaisir qui, à l’apparition du doux son des diesels tournant au ralenti, s’élève au niveau de l’excitation.

Commandes numériques en main, M. Laruelle lance doucement les engins dans une enfilade de rails, d’aiguillages et de passages à niveau. Il les dirige à travers villes et campagnes jusqu’à une gare ou à un port de mer, situé à l’autre bout de la pièce, où les passagers pourront descendre et où les marchandises seront déchargées. De là, les trains emprunteront la voie de triage ou encore celle d’un immense garage en rotonde.

Tout ça dans une ludique ambiance de cloches et de signaux clignotants.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Dans sa maison, Pierre Laruelle a une pièce entièrement consacrée à sa passion pour le modélisme ferroviaire.

Au milieu de ce décor bluffant, un homme de 78 ans affiche un sourire de véritable gamin. « Ce n’est pas pour les enfants ! », rétorque pourtant M. Laruelle à tous ceux qui réduisent ce loisir à des jeux enfantins. « L’idée derrière tout ça, ce n’est pas simplement de faire rouler des trains. C’est tout ce qu’il y a autour. C’est de se consacrer à créer une illusion parfaite, comme au cinéma. »

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Pour que la magie du réalisme miniature opère, il faut derrière un véritable travail d’artisan.

Un travail d’artisan

Or, la magie du réalisme miniature ne peut opérer sans une bonne maîtrise des arts visuels, de l’ébénisterie, de l’informatique, de l’ingénierie électrique et de l’histoire, ajoute cet ancien directeur artistique de la station radio CJMS et des pharmacies Jean Coutu.

« J’en passe, du temps sur YouTube ! », s’esclaffe-t-il, installé dans son atelier bien pourvu en fers à souder, pinces fines, tournevis d’électronicien, pinceaux, perceuse spéciale et banc de scie de la grosseur d’une petite cafetière.

  • Chaque wagon et chaque locomotive sont peints à la main, selon les spécifications des compagnies respectives.

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    Chaque wagon et chaque locomotive sont peints à la main, selon les spécifications des compagnies respectives.

  • Attention : passage de train !

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    Attention : passage de train !

  • La maquette doit respecter une mise à l’échelle parfaite.

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    La maquette doit respecter une mise à l’échelle parfaite.

  • Le village ferroviaire miniature de M. Laruelle occupe la grandeur de deux chambres à coucher.

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    Le village ferroviaire miniature de M. Laruelle occupe la grandeur de deux chambres à coucher.

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À portée de bras, sa bibliothèque regorge de documentation technique sur les différents engins utilisés au fil du temps par le Canadien Pacifique et le Canadien National. Chaque wagon et chaque locomotive sont peints à la main, selon les spécifications des compagnies respectives. « Regarde ! Les traits blancs doivent avoir 4 mm et les traits noirs, 5 mm », fait-il remarquer en pointant l’alternance des lignes hachurées à l’arrière d’une locomotive.

« Tout ce que tu crées sur la maquette doit respecter une mise à l’échelle parfaite. Tu peux te contenter d’acheter des bâtiments tout faits sur l’internet. Mais si tu veux vraiment t’amuser, tu peux aussi construire l’univers qui te ressemble », dit-il devant une réplique d’une gare typique du CP du milieu du XXsiècle.

« C’est dans une gare comme celle-là que j’ai travaillé, dans les Laurentides, comme agent de train lorsque j’étais étudiant », raconte M. Laruelle, l’œil brillant.

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L’histoire d’amour de M. Laruelle avec les trains remonte à loin.

Une histoire d’amour

L’attirance de Pierre Laruelle pour les trains n’est pas fortuite, encore moins anodine. Sa vie, en fait, est jalonnée d’anecdotes ferroviaires.

« Je suis né dans la gare de Saint-Eugène-de-Grantham, où mon oncle était chef de gare. Comme mon père est parti à la guerre peu avant ma naissance, mon oncle a proposé à ma mère d’habiter au second étage de la gare. J’ai grandi dans le bruit des trains », raconte-t-il.

Après sa démobilisation, Gabriel Laruelle a tenté un retour à la vie civile avant de reprendre l’uniforme. Il s’est engagé dans un corps d’ingénieurs spécialisé en électronique, basé à Longue-Pointe. Ses temps libres, il les a passés à bâtir un chalet à Nominingue, dans les Laurentides, là où il a aussi construit un immense circuit ferroviaire.

« En Europe, mon père avait beaucoup voyagé en train. Cela faisait partie de sa vie. Au chalet, nous avons construit une maquette extérieure de 75 pieds sur 100 pieds », se remémore-t-il, en regardant la magnifique locomotive anglaise exposée sur une tablette. « C’était la sienne. »

Au milieu des années 1960, durant ses années d’études, Pierre Laruelle a travaillé comme agent de train au Canadien Pacifique pendant quelques étés.

« On m’a envoyé sur la ligne du Nord, entre la gare Jean-Talon et Mont-Laurier, et sur la ligne Montréal-Ottawa », dit-il, la tête encore emplie de nuits passées sur les bancs, de rapports en 14 exemplaires tapés à un doigt et de cheminots aussi généreux que durs à l’ouvrage.

Depuis cette époque, les trains sont demeurés un objet de fascination pour M. Laruelle. Ce sont à ses yeux des merveilles d’ingénierie et de design, comme en font foi les sublimes photos et illustrations accrochées dans sa maison. Mais l’origine de sa passion se trouve résumée sur un logo d’une compagnie fictive, peint sur une locomotive : GP Rail.

« Ce sont nos initiales, à mon père et moi », glisse-t-il, simplement.

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