(Cracovie) Des tours, des dragons, des vitraux, et cette année jusqu’au « diable » Poutine, le tout dans une explosion de couleurs : les singulières crèches traditionnelles de Cracovie, distinguées par l’UNESCO, battent des records d’affluence dans la « cité des rois » de Pologne.

À l’approche de Noël, des centaines d’habitants de cette ville du sud de la Pologne à l’architecture médiévale ont présenté leurs créations spectaculaires pour la 81e édition de leur concours annuel, une tradition inscrite au patrimoine mondial immatériel par l’UNESCO depuis 2018.

Groupes d’enfants excités ou retraités passionnés, tous sont venus déposer, sous les auvents de la magnifique Halle aux draps au cœur de la vieille ville, leurs œuvres de carton et papier de couleur, allant de quelques centimètres à plus de deux mètres de hauteur, au milieu d’une foule admiratrice.

Au son d’une fanfare locale, débutants et experts ont défilé autour de l’imposante Place du Marché, protégeant contre la neige leurs œuvres originales, fruits de semaines voire de mois de travail, avant de les déposer au musée de Cracovie.

La tradition de ces crèches de Noël remonte à la fin du XIXe siècle, quand les menuisiers des environs de Cracovie les créaient à partir de chutes de bois et de papier, et les vendaient pour subsister pendant les périodes hivernales.

« Elles doivent évoquer la naissance du Christ […], mais elles peuvent également représenter des personnalités historiques ou du folklore local », explique à l’AFP Justyna Matwijewicz, membre du jury du concours.

PHOTO WOJTEK RADWANSKI, AGENCE FRANCE-PRESSE

La tradition de ces crèches de Noël remonte à la fin du XIXe siècle, quand les menuisiers des environs de Cracovie les créaient à partir de chutes de bois et de papier, et les vendaient pour subsister pendant les périodes hivernales.

Parfois elles font aussi référence à l’actualité.

Le diable Poutine

L’une d’entre elles représente cette année un diable au visage du président russe Vladimir Poutine, cornu et tenant à la main un trident rouge écarlate.

« Quand la Russie a envahi l’Ukraine, cet évènement tragique s’est reflété dans les crèches », souligne la curatrice du musée ethnographique de l’ancienne capitale de Pologne.

« Les crèches reflètent ce qui les entoure, à savoir l’architecture de Cracovie », explique aussi Mme Matwijewicz dans la ville médiévale.

Créé en 1937 pour sauver la tradition qui tombait dans l’oubli au lendemain de la Première Guerre mondiale, le concours des crèches traditionnelles de Cracovie continue de prendre de l’ampleur avec un record historique de participation cette année, à l’occasion de la création d’une catégorie « off » dédiée aux productions non conventionnelles.

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Andrzej Majewski, créateur depuis dix ans de crèches aux puissants messages politiques, s’inscrit pleinement dans cette tendance. « Mes crèches sont toutes politiques, car pour moi elles doivent exprimer quelque chose », confie ce retraité de 81 ans.

Andrzej Majewski, créateur depuis dix ans de crèches aux puissants messages politiques, s’inscrit pleinement dans cette tendance.

« Mes crèches sont toutes politiques, car pour moi elles doivent exprimer quelque chose », confie ce retraité de 81 ans, dans son appartement où il conserve ses œuvres des dernières années.

Parmi celles-ci, une figurine parodiant l’ancienne première ministre nationaliste Beata Szydlo, membre du parti de droite populiste Droit et justice (PiS) au pouvoir depuis 2015, mais qui a perdu la majorité aux dernières élections.

La crèche qu’il présente au concours cette année contient une foule en marche.

« Cette année la Pologne s’est mise en mouvement », explique-t-il, en référence aux gigantesques manifestations antigouvernementales qui ont secoué le pays à l’approche des élections du 15 octobre qui ont mis fin aux huit ans du pouvoir nationaliste populiste.