Le psychiatre Jean-Jacques Bourque a publié récemment un livre intitulé Écrasons la cigarette, pas le fumeur. Dans le cadre de la sortie de son livre, le Dr Bourque a fait plusieurs affirmations concernant le tabac et la santé. Je partage les préoccupations du Dr Bourque quant à l'approche à adopter face au traitement des patients qui fument. À l'Institut de cardiologie de Montréal, nous avons mis sur pied, il y a quelques années, un programme de traitement du tabagisme pour tous les patients hospitalisés, basé sur le respect et l'empathie. Il faut reconnaître que la dépendance à la nicotine est un problème grave et complexe qui demande une approche très bien dosée.

Le psychiatre Jean-Jacques Bourque a publié récemment un livre intitulé Écrasons la cigarette, pas le fumeur. Dans le cadre de la sortie de son livre, le Dr Bourque a fait plusieurs affirmations concernant le tabac et la santé. Je partage les préoccupations du Dr Bourque quant à l'approche à adopter face au traitement des patients qui fument. À l'Institut de cardiologie de Montréal, nous avons mis sur pied, il y a quelques années, un programme de traitement du tabagisme pour tous les patients hospitalisés, basé sur le respect et l'empathie. Il faut reconnaître que la dépendance à la nicotine est un problème grave et complexe qui demande une approche très bien dosée.

Par ailleurs, au cours des 15 dernières années, nos équipes de recherche clinique ont été parmi les premières à démontrer le rôle néfaste de la dépression post-infarctus sur la survie et la récidive d'accidents cardiaques. Nous sommes donc bien conscients que le traitement du tabagisme après un accident cardiaque ne peut se faire sans évaluer et traiter les conséquences psychologiques de cette intervention.

Pour ce qui est de la prévention auprès de la population, la direction de la prévention de l'Institut de cardiologie de Montréal parraine le défi «J'arrête, j'y gagne!», une campagne grand public effectuée avec un grand respect pour les fumeurs et sans aucune approche culpabilisante.

Ceci étant dit, je dois souligner que certaines affirmations répétées plusieurs fois par le Dr Bourque au cours de la dernière semaine sont sans fondement scientifique. En particulier, il faut souligner que le rôle nocif de la fumée secondaire sur les artères coronaires a été très bien documenté dans un nombre considérable d'études bien contrôlées. Il y a un lien bien établi entre l'exposition à la fumée secondaire et l'infarctus du myocarde. Cette relation a été documentée récemment dans une étude comptant 29 000 personnes, dans 52 pays. On en connaît même les mécanismes physiopathologiques, c'est-à-dire de quelle manière exactement la fumée secondaire exerce son effet néfaste sur la paroi artérielle et les éléments sanguins.

De plus, le fait d'arrêter de fumer après un infarctus du myocarde n'augmente pas la mortalité, bien au contraire. Plus de 60 études ont été publiées au cours des 30 dernières années sur ce sujet. Lorsqu'on étudie sérieusement ces recherches, on peut constater que la très grande majorité d'entre elles démontrent que le fait d'arrêter de fumer après un infarctus du myocarde, après une chirurgie de revascularisation coronarienne (pontage aorto-coronarien) ou après une angioplastie coronarienne (dilatation coronarienne) diminue le risque de mortalité d'environ 35% dans les trois années qui suivent.

Pour les lecteurs intéressés, le groupe international de recherche Cochrane Collaboration (un organisme indépendant de toute influence commerciale ou autre) a publié une excellente mise au point sur ce sujet. Plusieurs autres groupes de chercheurs ont revu la littérature médicale et arrivent à la même conclusion.

Les études qui semblaient démontrer un effet protecteur du tabagisme (effet communément appelé «paradoxe du fumeur») après un accident cardiaque présentaient des failles méthodologiques importantes.

En particulier, il faut noter que les fumeurs sont en général 10 ans plus jeunes au moment de leur infarctus. Leur maladie coronarienne est donc moins étendue et moins sévère. Lorsque le facteur âge et tous les autres facteurs sont bien contrôlés, toutes les études démontrent sans équivoque que le fait d'arrêter de fumer diminue la mortalité et les risques de récidives d'accidents cardiaques après un infarctus du myocarde. Cette réduction de mortalité se produit rapidement, c'est-à-dire au cours des trois premières années.

Compte tenu des données scientifiques accumulées depuis plus de 30 ans, la plupart des experts en cardiologie considèrent l'arrêt du tabac comme le traitement le plus efficace pour diminuer la mortalité après un infarctus du myocarde. Il serait dommage que certaines affirmations erronées du Dr Bourque diminuent la motivation des patients pour une intervention aussi efficace quant à leur survie.