Le G8 est dépassé. Le G20 est prêt à assurer la relève de la gouvernance mondiale. Nous en aurons la preuve au cours des prochains jours. Je n'ai pas de souvenir qu'une organisation internationale se soit sabordée. Le déclin du G8 sera long, mais il est inexorable.

Le G8 est dépassé. Le G20 est prêt à assurer la relève de la gouvernance mondiale. Nous en aurons la preuve au cours des prochains jours. Je n'ai pas de souvenir qu'une organisation internationale se soit sabordée. Le déclin du G8 sera long, mais il est inexorable.

Les interrogations, les doutes et les remises en question concernant l'utilité des sommets du G8 sont revenus périodiquement depuis sa création, en 1975. Initialement, il s'agissait de rencontres informelles entre les chefs d'État et de gouvernement pour échanger en priorité sur les questions économiques (finance, commerce). Très vite sont apparus à l'agenda les problèmes politiques du moment, particulièrement ceux concernant la sécurité internationale (conflits régionaux, terrorisme, prolifération nucléaire).

Le G8 s'est ensuite engagé dans la coordination des politiques nationales en matière d'aide aux développements, en appui au projet du Millénaire des Nations unies, et plus récemment pour soutenir les initiatives concernant le changement climatique.

Au fil des sommets, l'agenda s'est alourdi au détriment des réalisations. La bureaucratie n'accompagne qu'avec difficulté les initiatives annoncées. Il est devenu impossible d'assurer le suivi si bien que les engagements ne sont pas respectés. Le premier ministre Harper a raison de déplorer la perte de crédibilité de l'organisation, c'est pourquoi il veut mettre l'accent sur le suivi de la mise en oeuvre et les réalisations. C'est trop peu, trop tard.

Le dialogue permanent entre les grandes puissances est essentiel. C'est la condition au maintien de la paix. Cela n'a pas de prix (1 milliard de dollars, c'est quand même cher...). Mais les déficiences du G8 ont eu raison des attentes. Les communiqués successifs aussi vertueux qu'insipides ont miné la sincérité attribuée aux participants.

Il y a aussi le faste des sommets, comme celui tenu à Versailles en 1989 par Mitterrand 1er, maintes fois dénoncés.

Enfin, la contestation altermondialiste, souvent provocatrice, a forcé les rencontres à se déplacer vers des lieux inaccessibles, protégés par d'imposants dispositifs de sécurité. L'image de dirigeants démocratiquement élus, assiégés par le peuple et protégés par la force militaire est désastreuse.

Mais l'essentiel, c'est que le G8 a perdu l'initiative sur l'ensemble des grands dossiers de la gouvernance mondiale. La coordination des politiques financières et la régulation du système bancaire sont au coeur du mandat du G20. C'est la rencontre du dynamisme des appareils productifs des pays émergents associée aux mesures de stimulation de la demande des pays développés qui ont soutenu l'activité économique et autorisé la relance. Pour 2010, la croissance prévue des pays du BRIC est de 7%, elle est de 3% en Amérique et de 1% dans la zone euro. La crise de l'euro annonce encore de longs mois d'incertitude. Le constat s'impose : les économies des pays riches sont responsables de l'instabilité. On ne fait pas un chien berger d'un loup.

La tradition, qui veut que le G8 réitère son soutien au libre-échange, est désormais vide de sens. La ronde de Doha a échoué, les négociations sont suspendues sine die. Il n'y aura pas de reprise des discussions sans un signal clair que les positions ont évolué et qu'un accord est possible. Le conflit n'oppose plus uniquement l'Europe aux États-Unis, il inclut la Chine, l'Inde et le Brésil. Ceux-ci ont créé, avec plusieurs pays d'Afrique, une coalition suffisamment importante pour s'imposer comme acteur essentiel du processus de négociation. La décision appartient au G20.

La sécurité internationale n'est plus le monopole du G8. La participation de la Chine est indispensable pour régler les problèmes causés par les provocations de la Corée du Nord. C'est au Conseil de sécurité des Nations unies et non au G8 qu'appartient l'obligation de veiller au respect des traités sur la prolifération nucléaire et de tenter de résoudre la tension internationale provoquée par l'Iran. Orphelin depuis Copenhague, le changement climatique pourrait prochainement figurer à l'agenda du G20. Reste l'aide internationale, au moins pour le temps que les pays du G8 auront la capacité de payer.

L'avenir appartient au G20.

* L'auteur est professeur au département de science politique et chercheur associé au Centre d'études et recherches internationales de l'Université de Montréal (CÉRIUM.ca). Il signe le premier de deux textes sur les sommets du G8 et du G20.

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