Dans son article, la mère bien intentionnée se retrouvait bien malgré elle en position inconfortable, sa fille de 6 ans ayant «souffert» la vue d'un fessier gai lors du défilé de la fierté à Montréal.

Dans son article, la mère bien intentionnée se retrouvait bien malgré elle en position inconfortable, sa fille de 6 ans ayant «souffert» la vue d'un fessier gai lors du défilé de la fierté à Montréal.

Personnellement, il ne me viendrait pas à l'idée de faire une session d'éducation de mon fils en lui payant un billet pour un spectacle de Dita Von Teese ! Alors pourquoi inviter un enfant de 6 ans dans un défilé qui, on le sait (c'est tellement médiatisé depuis des années), est souvent très exubérant et pas du tout pudique? Le quartier gai regorge d'endroits amusants et très sympathiques où on peut déambuler sans se heurter à une paire de fesses dénudées. Et ce, en tout temps de l'année. Voilà pour la partie «éducation».

Ceci dit, la communauté gaie n'a pas à être pudique et réservée (et j'espère qu'il n'en sera jamais ainsi). Elle s'exprime ouvertement, est souvent très créative et originale. Et c'est peut-être parce qu'elle est un peu marginale qu'elle est aussi belle, magnifique et colorée. Elle est également diverse, composée d'individus plus discrets et d'autres plus exubérants. Bref, c'est une micro-société à l'intérieur d'une grande société diverse et pluraliste!

Accepter la différence, c'est aussi être ouvert et curieux face à l'idée de peut-être croiser un travesti ou une paire de fesses rondes enrobées dans un chaps en cuir noir. Et la véritable ouverture se démontre par la réaction face à cette différence: un regard, peut-être un peu d'inconfort, mais aussi un sourire, et peut-être même une discussion avec l'individu.

À ceci, j'aurais moi-même répondu à mon fils de 6 ans: «Tu vois mon chéri, certains messieurs aiment d'autres messieurs. Certaines dames aiment d'autres dames. Et cela s'exprime non pas seulement par des sentiments, mais aussi par la sexualité, les caresses du corps. Les animaux utilisent toutes sortes de techniques pour séduire un partenaire ; certains laissent des odeurs fortes, d'autres comme des espèces de singes, ont un fessier tout rouge qui attire l'attention des mâles de l'autre espèce. Chez l'humain, c'est pareil! Quand on veut séduire l'autre, on l'attire physiquement par différents stratagèmes.»

Une personne outrée devant la nudité et l'exubérance n'est pas, malgré toute la bonne volonté qu'elle souhaite manifester, une personne ouverte à l'autre et à la différence. C'est tellement facile de se dire «ouvert» tant que nos valeurs personnelles ne sont pas ébranlées! Mais lorsqu'on transgresse les tabous, l'ouverture devient soudainement moins présente.

Après réflexion, on comprend vite que ceci n'a au fond rien à voir avec la communauté gaie. La réaction de cette mère, tout comme celle de nombreux autres Québécois qui pensent la même chose, démontre un malaise devant la sexualité et la nudité.

Non, ce n'est pas «normal» de montrer ses fesses... C'est déviant et provoquant! Et parfois, c'est aussi un peu bienvenu dans une société qui s'étouffe souvent avec son conformisme.

* Elle réplique à l'opinion intitulée «Normal de montrer ses fesses?» qui a été publiée dans les pages Forum de mercredi dernier.