On a beau nous chanter la romance de l'équipement collectif au service de la population, tout le monde aura compris que le projet d'amphithéâtre de Québec vise essentiellement à ramener une franchise de la LNH.

On a beau nous chanter la romance de l'équipement collectif au service de la population, tout le monde aura compris que le projet d'amphithéâtre de Québec vise essentiellement à ramener une franchise de la LNH.

S'il y a quelque chose d'insupportable dans ce débat, c'est ce discours entretenant le mythe que les installations sportives et les clubs de hockey professionnels sont d'importants moteurs de notre développement économique. Il ne se passe guère une journée sans qu'un politicien, une élite locale ou un chroniqueur sportif nous donne une leçon d'économie. Pour eux, l'investissement public se justifie du fait qu'une équipe de hockey dépense des millions de dollars, crée des centaines de nouveaux emplois et, de ce fait, favorise notre prospérité. Malheureusement, rien n'est plus faux!

Les économistes s'intéressent depuis longtemps à la question de l'impact des installations sportives et des équipes de sport professionnel sur le développement économique local. Dennis Coates et Brad R. Humphreys de l'Université du Maryland ont recensé la littérature scientifique sur cette question. Leur conclusion est claire: «Les économistes n'ont trouvé aucune preuve de retombées économiques positives des équipes de sport professionnel et de leurs installations sur l'économie des villes.»

Évidemment, ils ne font pas référence aux études de retombées économiques commandées par les gouvernements et les promoteurs privés pour justifier leur quête de fonds publics. Tout simplement parce que ces études reposent sur l'hypothèse farfelue qu'il suffit de dépenser de l'argent public pour créer de la richesse. Vous voulez essayer?

Supposons que le gouvernement réduise vos impôts d'une somme équivalente aux coûts de construction d'un nouveau colisée. La «machine à retombées» prédira que les contribuables dépenseront les sommes récupérées du fisc et qu'ils créeront, vous l'avez deviné, des retombées économiques. En réalité, peu importe le projet mis de l'avant, vous aurez toujours des retombées économiques. Toutefois, lorsqu'on ne fait que déplacer - dollar pour dollar - des fonds publics qu'on aurait pu investir ailleurs, on ne crée au bout du compte aucune richesse.

Bien sûr, utiliser les taxes et les impôts payés par les gens de Montréal, de Saguenay, de Gaspé ou de Vancouver pour les investir à Québec permet de concentrer la dépense dans la région. Mais ce n'est pas non plus de la création de richesse: c'est essentiellement un drainage de fonds publics par une région, au détriment des autres.

Tout compte fait, si on désire absolument associer des bénéfices au retour des Nordiques, c'est du côté des externalités positives qu'il faut chercher : le sentiment de fierté de voir Québec s'élever au rang de grande ville de hockey, la joie des amateurs de hockey, etc. Bien qu'il s'agisse de bénéfices non marchands et difficilement quantifiables, ils ont au moins le mérite d'être bien réels et de s'étendre au-delà des frontières de la seule ville de Québec.

La question, s'il en est une, est de savoir si une éventuelle liesse collective vaut 400 millions de dollars. Pour ce faire, plutôt que de produire à grands frais une insignifiante étude de retombées économiques, il aurait été préférable de mener une évaluation contingente. Celle-ci nous aurait permis d'estimer la valeur attribuée par les Québécois à un retour des «Bleus».

Personnellement, si je n'écoutais que mon coeur de fan de hockey, ma disposition à payer pour un retour de la rivalité Québec-Montréal serait très élevée. À moins, bien sûr, que les charlatans des retombées économiques viennent à bout de ma patience!