Dans quelques jours, les leaders de l'OTAN réunis à Lisbonne, au Portugal, doivent dévoiler un plan en quatre étapes afin de poursuivre jusqu'en 2014 la mission internationale en Afghanistan, mais sous un format réduit. Pourtant, de Kaboul, le président Hamid Karzaï ne cesse de critiquer l'OTAN. La mission est-elle toujours bienvenue dans ce pays?

Dans quelques jours, les leaders de l'OTAN réunis à Lisbonne, au Portugal, doivent dévoiler un plan en quatre étapes afin de poursuivre jusqu'en 2014 la mission internationale en Afghanistan, mais sous un format réduit. Pourtant, de Kaboul, le président Hamid Karzaï ne cesse de critiquer l'OTAN. La mission est-elle toujours bienvenue dans ce pays?

Depuis quelque temps, le président afghan a pris l'habitude de jeter un pavé dans la mare à l'approche d'une grande échéance concernant son pays. En 2009, Karzaï avait tiré à boulets rouges contre la stratégie offensive de l'OTAN sur le terrain qui, faut-il le dire, causait d'horribles ravages parmi la population civile. Le commandant de la FIAS avait décidé de rajuster le tir et d'employer d'autres moyens pour neutraliser les talibans. Puis, à la veille de l'élection présidentielle de septembre, le leader afghan, accusé de tolérer la corruption généralisée de son gouvernement, sinon d'y participer, s'était posé en nationaliste fervent réclamant un départ rapide des Occidentaux et l'ouverture d'un dialogue avec les talibans désireux de rejoindre le processus de paix en cours. Washington n'avait pas apprécié, et certains allaient même jusqu'à dire que les Américains n'avaient plus de partenaire à Kaboul, laissant ainsi craindre le pire pour Karzaï.

Le plan adopté par le président Obama en décembre dernier et la stratégie suivie par le général Petraeus depuis répondent en partie aux préoccupations du président afghan. Mais, visiblement, le courant ne passe plus entre Karzaï et ceux qui l'ont installé au pouvoir.

À la veille du sommet de l'OTAN, le ton a encore monté entre Karzaï et Washington. Dans une entrevue au Washington Post, le président a été d'une rare virulence. Les États-Unis, a-t-il dit, doivent réduire leurs opérations sur le territoire, cesser leur ingérence dans la vie quotidienne du pays et renoncer à leurs raids de nuits dont le seul effet est d'enflammer les Afghans et de pousser les plus jeunes dans les bras de l'insurrection. Le général Petraeus a vivement répliqué en accusant Karzaï de saper la mission. En fait, le président afghan se place carrément en opposition au plan qu'il avait lui-même entériné.

À Washington, le sénateur républicain Lindsey Graham a piqué une colère et fait une révélation bien embarrassante pour Karzaï. «Nous avons été informés que la nuit nous appartient militairement et nos attaques ont un impact énorme sur les talibans et sur l'insurrection.»

On peut donc se demander à quel jeu se livrent le président afghan et le gouvernement américain. De deux choses l'une: soit Karzaï joue pour la galerie et appuie secrètement la stratégie américaine, un peu comme ces Pakistanais qui ne cessent de se plaindre publiquement des attaques de drones américains contre les talibans opérant sur leur territoire tout en se réjouissant discrètement de leurs effets; soit le président est sérieux et nous assistons à la lente désintégration de la relation entre Kaboul et l'OTAN. Si c'est ce dernier scénario qui se déroule en ce moment, alors est-il bien raisonnable pour le Canada de prolonger sa mission jusqu'en 2014? Les conséquences pourraient être dramatiques pour les Canadiens sur le terrain.

Il est impérieux de rétablir la confiance entre le pouvoir national afghan et la coalition internationale présente sur place. On ne mène pas une intervention d'une telle ampleur sans que les deux partenaires soient sur la même longueur d'onde et s'entendent sur les moyens d'atteindre leurs objectifs communs. À moins, bien entendu, que ces objectifs soient de plus en plus divergents. Si cela est le cas, les opinions publiques des pays occidentaux, largement opposées à l'intervention en Afghanistan, sont en droit d'obtenir des explications de leur gouvernement respectif sur ce qui se passe vraiment dans ce pays.