Le monde s'apprête à assister le 9 janvier à la naissance d'une nouvelle nation dans le sud du Soudan. Le Canada est-il prêt à accueillir ce nouveau pays?

Le monde s'apprête à assister le 9 janvier à la naissance d'une nouvelle nation dans le sud du Soudan. Le Canada est-il prêt à accueillir ce nouveau pays?

La violence et les crises humanitaires continuent de menacer à l'approche des consultations populaires prévues dans le Sud-Soudan et l'enclave d'Abyei. Même si celles-ci devaient être reportées, individuellement ou les deux ensemble, tout indique que le Sud semi-autonome votera en faveur de la sécession, afin de se débarrasser du joug imposé par les dirigeants du nord.

Le résultat des deux référendums aura une incidence monumentale sur les perspectives de paix et la mise en oeuvre de l'Accord de paix global de 2005, qui mettait fin à la guerre civile ayant divisé le nord et le sud du Soudan pendant des décennies et fait deux millions de morts.

Craignant des problèmes majeurs, les Nations Unies et certaines parties intéressées ont dressé la liste des sources de frictions possibles, mais il reste de graves difficultés à surmonter, dont le manque de personnel sur place des organismes humanitaires, l'accès aux zones de conflit et l'absence d'un plan exhaustif visant à protéger les minorités les plus vulnérables.

Comme si la situation n'était pas assez tendue, les forces armées de Khartoum et celles du Mouvement populaire pour la libération du sud (MPLS) se sont massées le long de la frontière instable entre le nord et le sud. Ce déploiement de forces a pour effet de remilitariser un conflit meurtrier que seule une solution politique pacifique serait en mesure de dénouer.

Le Canada a d'ailleurs joué un rôle actif sur ce plan au Soudan. Le gouvernement canadien a dit vouloir privilégier trois grands secteurs d'intervention dans ce pays: l'aide, la sécurité et la diplomatie. Toutes ses actions dans ces domaines ont eu pour buts de contenir la violence et d'accroître la sécurité, de réduire la vulnérabilité et de sauver des vies, et d'assurer une stabilité et une capacité d'adaptation à long terme. Depuis janvier 2006, le Canada a consacré plus de 800 millions de dollars à des initiatives de paix, à l'aide humanitaire et à la reconstruction au Soudan.

Mais nous pouvons et nous devons faire beaucoup plus. Premièrement, l'ACDI, notre agence d'aide, devrait retourner dans les endroits chauds à la frontière nord-sud. L'aide occidentale était surtout concentrée jusqu'ici à Juba, la capitale du Sud-Soudan. Il est bien d'investir dans des projets à long terme; cela peut même contribuer à atténuer les causes profondes du conflit. Mais il faut s'assurer que les populations les plus démunies, celles qui se trouvent à la frontière précaire entre le nord et le sud, reçoivent toute l'aide que peut leur procurer la contribution financière canadienne.

Deuxièmement, les politiciens et les diplomates canadiens doivent établir des relations avec les dirigeants du Sud-Soudan, le MPLS. Le Canada s'est très peu mêlé aux efforts faits par les États-Unis, l'Union africaine et d'autres intervenants pour amener les dirigeants du nord et du sud à se rapprocher.

Le Canada, qui avait attendu en mars 2008 pour reconnaître l'indépendance du Kosovo, peut jouer un rôle de premier plan en reconnaissant le Sud-Soudan le jour même où il accédera à son indépendance. Depuis un certain temps déjà, les dirigeants politiques du sud font des démarches auprès des politiciens occidentaux pour qu'ils leur apprennent les principes de la démocratie et d'une saine gouvernance. L'expérience canadienne en matière de fédéralisme présente une valeur inestimable aux yeux des chefs du MPLS. Un groupe canado-américain d'assistance politique mis sur pied par le ministère des Affaires étrangères du Canada et son homologue américain serait un véhicule tout indiqué pour resserrer nos relations avec les dirigeants du Sud-Soudan.  

Troisièmement, le Canada doit faire tout en son pouvoir avec ses partenaires au Soudan pour éviter une catastrophe humanitaire et d'innombrables atrocités. Une des principales questions laissées en suspens dans l'Accord de paix global est le statut et la protection des minorités cherchant à franchir la frontière nord-sud. Tant dans le nord que dans le sud du Soudan, des millions de civils sont dangereusement exposés aux noirs desseins des empêcheurs de tourner en rond. Le Canada doit continuer de contribuer au renforcement de la mission des Nations Unies au Soudan (UNAMIS)  en lui proposant une stratégie préventive pertinente et en lui prêtant son soutien sur les plans financier, logistique et de la formation.