Nous avons le pire système de santé. Nous avons le pire système d'éducation. Nos routes sont pires qu'ailleurs. Nous sommes plus corrompus que les autres. Nous payons toujours plus cher que nos voisins. Tant de constants accablants, si peu de fondements.

Nous avons le pire système de santé. Nous avons le pire système d'éducation. Nos routes sont pires qu'ailleurs. Nous sommes plus corrompus que les autres. Nous payons toujours plus cher que nos voisins. Tant de constants accablants, si peu de fondements.

Depuis quelque temps déjà, les ténors de cette droite «fashion», ceux qu'on appelle les lucides, tentent de nous dresser un portrait plutôt noir de la réalité québécoise. On nous houspille chaque jour dans les médias. On nous fait passer pour des irresponsables, des enfants gâtés, des gens qui n'attendent qu'après le système pour être capables de fonctionner.

Au lieu de miser sur la fierté de ce que nous sommes et de présenter les embûches comme des défis à relever, certains ont pris un malin plaisir à nous dépeindre comme des vauriens qui mériteraient une bonne taloche derrière la tête. Tous les jours, il se trouve un père Fouettard pour venir nous gronder. On tente ainsi de nous montrer le droit chemin, celui de la lumière divine. Les grands maîtres de cette doctrine, qu'ils portent les noms de Bouchard, Fortin ou Facal, oublient souvent plusieurs variables dans leurs équations.

A priori, il est incroyable d'entendre que les premiers détracteurs d'un système sont ceux-là mêmes qui l'ont érigé et en ont profité toute leur vie. On voudrait maintenant que la jeune génération bûche jour et nuit pour payer les régimes de retraite de celle qui l'a précédée.

Pire encore, on lui demande presque d'oublier la possibilité qu'elle puisse profiter elle aussi d'avantages aussi grands. On refuse que les impôts des mieux nantis soient augmentés, mais on voudrait que les frais de scolarité soient haussés. C'est un peu comme si on demandait aux paysans de payer pour repeindre la salle de bal du roi, salle à laquelle ils n'auront jamais accès.

Si souvent on a dépeint la jeune génération comme égoïste et égocentrique, il faudrait peut-être que certains se mettent un peu à regarder dans leur cour et à faire un sérieux examen de conscience. Le Québec est-il la contrée d'une seule génération? De celle qui s'est dotée de services gratuits, de régimes de retraite enviables?

Dans de telles circonstances, je crains parfois. Appartenant moi-même à cette génération émergente, à chaque fois qu'on me parle de privatisation, de hausse de droits de scolarité, de précarité, j'ai l'impression que le ciel des miens s'assombrit peu à peu.

Il faut être raisonnables et responsables, nous dira-t-on. Mais quand la maison est en flammes, ce n'est pas le temps de faire le ménage du frigo pour voir d'où vient l'odeur qui s'en dégage.

Être responsable, c'est prendre le taureau par les cornes. Être responsable, c'est de faire payer davantage les mieux nantis, c'est d'accepter que tous aient droit aux mêmes chances. Être responsable, c'est aussi arrêter de voir tout noir et de considérer nos différences comme des richesses plutôt que comme des tares.

On paie moins qu'ailleurs pour étudier au Québec? Parfait. Pour ma part, c'est une grande fierté qu'en plus d'avoir misé sur les richesses naturelles, au Québec, on ait aussi décidé de miser sur les richesses intellectuelles.

Au lieu de toujours chercher à se comparer, il est temps de décider de s'assumer. Au Québec, nous ne sommes pas l'Ontario ou l'Alberta. Et c'est parfait ainsi. Nous sommes différents et nous aspirons à construire une contrée différente où le but premier n'est pas de faire du « cash » sur le dos de son prochain.

Pourquoi le bonheur national brut serait moins important que le produit national brut? Pourquoi le chèque de paie devrait-il remplacer la carte soleil? Pourquoi le livre de contes devrait-il être remplacé par le livre de comptes?  

Si ma génération est prête à donner un coup de main pour aider celle qui l'a précédée, cela ne doit pas vouloir dire qu'elle est prête à faire fi totalement de sa qualité de vie.

Être lucide, c'est aussi de penser au développement social et collectif d'une société. Malheureusement, certains ont semblé l'oublier...