Vous avez déclaré le 15 janvier dernier que «le gouvernement du Québec n'a pas encore harmonisé sa taxe de vente avec la TPS fédérale» et que nous étions encore loin d'une entente à ce sujet. Votre premier ministre avait déclaré la veille que «en fin de compte, la création d'une seule taxe repose entre les mains du gouvernement du Québec».

Vous avez déclaré le 15 janvier dernier que «le gouvernement du Québec n'a pas encore harmonisé sa taxe de vente avec la TPS fédérale» et que nous étions encore loin d'une entente à ce sujet. Votre premier ministre avait déclaré la veille que «en fin de compte, la création d'une seule taxe repose entre les mains du gouvernement du Québec».

Considérant les discussions que nous avons depuis bientôt deux ans dans ce dossier, il me paraît nécessaire de vous exposer à nouveau les fondements de la position du Québec.

Il y a 20 ans de cela, le précédent gouvernement fédéral conservateur a jugé que la TPS et la TVQ étaient suffisamment harmonisées pour confier au Québec l'administration de la TPS. Ce même gouvernement avait aussi reconnu, dans l'entente du 26 avril 1991, que l'Assemblée nationale avait adopté des dispositions législatives qui permettaient de rendre l'assiette de la TVQ substantiellement comparable à celle de la TPS.

Au milieu des années 90, lorsque trois provinces de l'Atlantique ont reçu près de 1 milliard de dollars du gouvernement fédéral, le ministre des Finances d'alors, Paul Martin, prétendait que le Québec n'avait pas perdu de revenus à la suite de l'harmonisation pour justifier son refus de lui verser une compensation.

M. Martin avait aussi déclaré que l'harmonisation n'entraînerait pas de pertes de revenus pour l'Ontario et la Colombie-Britannique et que ces provinces n'auraient pas droit, elles non plus, à une compensation.

Les citoyens du Québec peuvent donc se demander pourquoi, en 2009, votre gouvernement a décidé d'offrir 5,9 milliards de dollars à ces deux mêmes provinces? La réponse est que la compensation représente désormais 1,5 point de TPS pour la province visée, une somme qui ne correspond à aucun critère particulier.

Dans ce contexte, il est aujourd'hui beaucoup plus difficile de refuser la demande du Québec. L'argument utilisé par M. Martin ne tenant plus la route, votre gouvernement a dû trouver un autre prétexte pour dire non au Québec. D'où cette drôle d'idée que la TVQ n'est pas «harmonisée» puisqu'elle n'est pas «fusionnée» avec la TPS.

Or, les mots ont un sens. L'expression «harmonisation» nécessite en soi l'existence de deux taxes distinctes, dont les paramètres concordent. Depuis quand «harmonisation» signifie «fusion», voire «centralisation»?

Regardons par ailleurs l'impact qu'auraient, sur les contribuables du Québec, les modifications entrées en vigueur le 1er juillet dernier en Ontario et en Colombie-Britannique.

Des services auparavant non taxés, tels que les services de coiffure, les courses en taxi, le nettoyage à sec et les services à domicile d'un électricien sont désormais assujettis à la taxe en Ontario et en Colombie-Britannique. C'est déjà le cas au Québec.

Les entreprises de l'Ontario et de la Colombie-Britannique ont désormais droit au remboursement de la taxe payée sur leurs intrants. C'est déjà le cas au Québec. Les restrictions à ces remboursements imposées aux grandes entreprises de l'Ontario et de la Colombie-Britannique sont calquées sur celles en vigueur au Québec.

En fait, les distinctions entre la TVQ et la TPS représentent moins de 1% de l'assiette fiscale de la TPS, ce qui est bien inférieur à la limite de 5% de «désharmonisation» permise par votre gouvernement aux autres provinces.

Le modèle d'harmonisation en place au Québec a été très profitable à nos deux gouvernements, ainsi qu'à l'ensemble du pays. Il y a 20 ans, le Québec a pris la décision de se joindre au gouvernement fédéral pour réformer les taxes de vente afin de rendre nos entreprises plus concurrentielles, de favoriser la création d'emplois et d'augmenter le niveau de vie des Québécois et des Canadiens.

Grâce à cette décision, l'économie du Québec a crû plus rapidement qu'elle ne l'aurait fait autrement. Le Québec a ainsi davantage profité de l'ALENA et de l'ouverture des marchés internationaux, ce qui a réduit ses besoins en matière de péréquation.

Le Québec a donné le bon exemple. Or, il reçoit de votre gouvernement le même traitement que les provinces qui, 20 ans plus tard, n'ont rien fait pour harmoniser leur taxe de vente.

Dans ce contexte, ce qui est fondamentalement en jeu, c'est le «fédéralisme d'ouverture» d'un gouvernement qui affirme être respectueux des compétences des provinces.

Le Québec ne renoncera jamais à sa souveraineté fiscale. Vous avez déjà reconnu publiquement qu'il n'existe aucune raison de mettre fin à l'entente qui confie au Québec l'administration de la TPS. Le Québec a par ailleurs fait preuve d'ouverture, de bonne foi et de beaucoup de patience dans les négociations en cours depuis deux ans.

Si les objectifs de votre gouvernement sont purement de nature économique, il est indéniable que le Québec mérite une compensation financière équitable. Les travaux sont suffisamment avancés pour conclure dès maintenant une entente à cet égard.

* Ce texte est une version abrégée d'une lettre qu'il a transmise jeudi à son homologue fédéral, Jim Flaherty, à l'égard du dossier de l'harmonisation des taxes de vente. La version complète de la lettre peut être consultée sur le site www.finances.gouv.qc.ca.