J'ai déjà eu l'opportunité d'analyser près d'une trentaine de budgets fédéraux. Mais je ne me souviens pas d'en avoir rencontré un qui ressemblait à celui d'hier, tant par sa forme que par son contenu.

J'ai déjà eu l'opportunité d'analyser près d'une trentaine de budgets fédéraux. Mais je ne me souviens pas d'en avoir rencontré un qui ressemblait à celui d'hier, tant par sa forme que par son contenu.

Le budget Flaherty 2011-2012 comporte certes quelques mesures intéressantes, comme celles visant la recherche fondamentale, le développement et l'innovation, ou l'ajustement du supplément de revenu garanti pour les aînés les plus défavorisés. Mais pour le reste, ce budget a peu de chances de passer à l'histoire, et pas seulement à cause du contexte préélectoral. Ceux qui, au Québec, s'attendaient à de grandes nouvelles, comme la conclusion d'une entente comportant une importante compensation pour l'harmonisation de la TPS et de la TVQ, devront malheureusement repasser.

En réalité, ce budget n'en est pas tout à fait un. Il se présente globalement, et surtout, comme un exposé répétitif du bilan du gouvernement depuis l'instauration du Plan d'action économique du Canada; un exposé «commercialisable» auprès de l'électorat, enrobé de lignes politiques directement utilisables en campagne, à l'orée du déclenchement d'une élection.

Par exemple, le gouvernement présente sa prochaine phase du Plan d'action économique du Canada suivant le thème «Des impôts bas pour stimuler la croissance et l'emploi». Ce thème suppose que le contenu du budget, son épine dorsale, gravite autour de baisses d'impôt importantes pour les contribuables. Or, on a beau lire et relire les documents budgétaires, ce qui était annonciateur tombe radicalement à plat: le budget ne contient aucune baisse d'impôt. Elles ont déjà été réalisées par le passé.

Toutefois, on comprend mieux la motivation du gouvernement à marteler ce thème lorsqu'on examine attentivement le contenu du discours livré par le ministre des Finances à la Chambre des communes: ce thème est le premier d'une série de trois messages politiques et électoraux centraux.

On ne compte plus le nombre de fois où le ministre invoque dans son discours «des impôts bas» et où il réfère à l'opposition en l'accusant de vouloir «hausser massivement les impôts»... «ce qui donnerait lieu à des déficits persistants»... «freinerait notre reprise, abolirait des milliers d'emplois et aggraverait la situation des familles».

Ou encore ce deuxième message, celui de «l'instabilité», répété par le ministre et qui s'ajoute au premier référant, le «besoin d'un gouvernement stable au Canada» (lire majoritaire). Près de la moitié du discours du budget exploite ces deux thèmes, et un troisième, appelant à la continuité et à l'assurance (lire conservateur majoritaire, encore une fois), toujours en fustigeant l'opposition.

Cette façon de présenter un budget à coup de slogans électoraux, en s'attaquant plus d'une fois à l'opposition, est tout à fait inusitée. Généralement, la sobriété accompagne cet exercice. Le gouvernement en profite très certainement pour vanter ses réalisations et ses capacités à gérer les finances publiques, à conduire l'économie vers la voie de la croissance et les contribuables vers celle de la prospérité. Mais les attaques en règle et systématiques n'ont pas leur place.

Ce budget n'est pas comme les autres, mais la façon dont il a été livré non plus. Les hostilités sont bel et bien commencées. Le ton de la campagne électorale est donné et il est déjà fort révélateur.