Nous ne disposons pas d'indicateur pour mesurer le niveau de décrochage du monde économique et politique à l'égard de l'avenir du secteur financier québécois et surtout du déclassement de Montréal comme place financière d'importance. Mais ce décrochage se sent dans les attitudes et les allusions défaitistes trop souvent entendues, particulièrement lors du débat inachevé entourant la création d'une commission canadienne des valeurs mobilières. On semble voir ce «déclin» comme quelque chose qui nous échappe, comme une fatalité.

Nous ne disposons pas d'indicateur pour mesurer le niveau de décrochage du monde économique et politique à l'égard de l'avenir du secteur financier québécois et surtout du déclassement de Montréal comme place financière d'importance. Mais ce décrochage se sent dans les attitudes et les allusions défaitistes trop souvent entendues, particulièrement lors du débat inachevé entourant la création d'une commission canadienne des valeurs mobilières. On semble voir ce «déclin» comme quelque chose qui nous échappe, comme une fatalité.

Les reculs du secteur au cours des dernières années n'aident certes pas à changer les perceptions. Selon une analyse réalisée l'année dernière par le groupe SECOR pour le compte de l'Autorité des marchés financiers, le nombre d'emplois a augmenté de façon significative dans le secteur financier dans la plupart des provinces canadiennes au cours des deux dernières décennies: 52 000 emplois de plus en Ontario, 20 000 en Alberta, 15 000 de plus en Colombie-Britannique.

Pendant ce temps, le Québec perdait 8000 emplois et la croissance des activités du secteur par rapport au PIB était deux fois moindre à Montréal que dans les grandes villes canadiennes.  

Il est facile d'invoquer, comme nous l'entendons trop souvent, la mondialisation et la consolidation des principales places financières du monde pour expliquer ce mouvement «naturel» vers le déclassement. Trop facile également de puiser de tous ces facteurs une justification à l'abdication de certains. Les enjeux entourant l'avenir du secteur financier au Québec sont trop importants pour qu'on regarde le train passer et qu'on laisse à d'autres le profit des opportunités.

Même s'il a besoin d'une bonne dose d'adrénaline, le secteur financier joue un rôle majeur au Québec. Il est responsable de plus de 150 000 emplois directs de haut niveau et autant d'emplois indirects. Les deux tiers de ces emplois se retrouvent dans la grande région de Montréal.

Le secteur est structurant pour l'économie du Québec et il agit comme un carburant essentiel à la croissance économique et au développement industriel par l'intermédiation financière, le service-conseils, la fourniture de capitaux et des produits d'investissement et d'épargne. Ce rôle moteur du secteur financier n'a de sens cependant que dans la mesure où l'on peut compter sur des ressources et des services de qualité et sur un environnement réglementaire stable et sécuritaire, efficace, novateur et flexible. Il n'a de sens également que s'il peut fournir des produits originaux et surtout des services de proximité aux investisseurs et aux entreprises, services principalement concentrés dans une place financière dynamique.

Le Québec réunit déjà de toutes ces ressources, un cadre propice à la relance du secteur et les conditions idéales de développement. Il n'y manque que la volonté de tous les acteurs économiques, et non seulement du gouvernement du Québec, de changer le cours des choses et surtout d'y croire. Il n'y manque qu'un dynamisme rehaussé et plus de créativité pour développer des créneaux porteurs, comme nous l'avons si bien fait, au cours des dernières années, avec les produits dérivés. Il n'y manque que la promotion agressive de ces créneaux, des capacités d'accueil et de services, des ressources et de l'environnement favorable de Montréal comme place financière partout sur la planète.

Nous disposons de suffisamment d'atouts pour tirer notre épingle du jeu, pour profiter des opportunités et pour nous tailler une place à la mesure de notre dynamisme et de notre génie. Il faut refuser le déclassement.

«La fatalité triomphe dès que l'on croit en elle.» (Simone de Beauvoir).