En adoptant une monnaie commune, les Européens ont accepté de partager le même taux de change vis-à-vis des monnaies du reste du monde. Lorsque le cours de l'euro s'est apprécié, la Grèce et le Portugal tout autant que l'Allemagne ont vu leurs coûts augmenter par rapport à ceux de leurs compétiteurs internationaux. L'Allemagne a pu compenser le choc par des gains de productivité dans ses secteurs les plus exposés à la concurrence internationale. Elle a donc pu maintenir sa place sur les marchés internationaux. La Grèce et le Portugal n'ont pu suivre la cadence. Ce n'est qu'au prix d'un endettement public croissant qu'ils ont pu un temps maintenir leur croissance, jusqu'à ce que la limite soit atteinte.

En adoptant une monnaie commune, les Européens ont accepté de partager le même taux de change vis-à-vis des monnaies du reste du monde. Lorsque le cours de l'euro s'est apprécié, la Grèce et le Portugal tout autant que l'Allemagne ont vu leurs coûts augmenter par rapport à ceux de leurs compétiteurs internationaux. L'Allemagne a pu compenser le choc par des gains de productivité dans ses secteurs les plus exposés à la concurrence internationale. Elle a donc pu maintenir sa place sur les marchés internationaux. La Grèce et le Portugal n'ont pu suivre la cadence. Ce n'est qu'au prix d'un endettement public croissant qu'ils ont pu un temps maintenir leur croissance, jusqu'à ce que la limite soit atteinte.

Cette histoire est riche d'enseignements pour le Québec. Le Québec partage en effet avec les autres provinces canadiennes une monnaie, le dollar canadien, dont le cours international s'est aussi grandement apprécié au cours des dernières années. Le Québec a lui aussi souffert d'une perte de compétitivité de ses exportations et cherché à contrer cette conjoncture par un endettement public croissant.  

Il y a pourtant une différence de taille entre le Québec et des pays comme la Grèce et le Portugal : le Québec est membre d'une fédération et au sein de cette fédération, il existe un partage important des ressources.

Au sein de la fédération canadienne, certaines provinces ont mieux résisté au choc qu'a représenté l'appréciation du dollar canadien. C'est le cas notamment de l'Alberta qui a pu profiter d'une hausse importante du prix de son pétrole. Puisque le gouvernement fédéral canadien exerce d'importantes responsabilités de dépense, il dispose également de pouvoirs fiscaux importants, lesquels sont exercés dans toutes les provinces.  

Les recettes du gouvernement fédéral ont donc augmenté plus rapidement que celles du gouvernement du Québec, grâce à la prospérité relative des provinces favorisées par l'augmentation du prix de leurs exportations.  Cela s'est traduit par une augmentation des transferts fédéraux en santé, de même que de la valeur de l'enveloppe destinée à la péréquation.  

Cette augmentation a profité à l'ensemble des provinces qui, comme le Québec, souffraient particulièrement de l'appréciation du dollar canadien. Les pays européens n'ont pu, de leur côté, bénéficier d'une telle augmentation de leurs transferts.

Cette différence fédérale en faveur du Québec ne se limite pas aux seuls transferts fiscaux. Elle joue également au niveau des marchés financiers et au niveau du partage de la dette publique. L'Espagne et l'Irlande se débattent aujourd'hui avec l'effondrement de leurs marchés immobiliers respectifs, ainsi qu'avec ses dommages collatéraux sur les banques. Si une telle crise était survenue au Québec, elle aurait immédiatement appelé l'utilisation de ressources prélevées dans toutes les provinces, en raison des responsabilités du gouvernement fédéral en matière de supervision et d'assurance des marchés hypothécaires et bancaires.  

L'Espagne et l'Irlande doivent aujourd'hui s'endetter seules à des taux d'intérêt bien supérieurs à ceux payés par l'Allemagne. Sans avoir connu une telle crise, les Québécois bénéficient néanmoins déjà du partage de la dette avec l'ensemble des Canadiens, au travers de leur part de la dette fédérale.

Les expériences comparées de l'Europe et du Canada montrent donc que le Québec tire de réels avantages de son appartenance à la fédération canadienne. Si le Québec devait malgré tout choisir un jour de ne plus faire partie de cette fédération, il faudrait qu'il ait eu au moins la sagesse préalable de réduire son fort niveau d'endettement tout en haussant la compétitivité de ses exportations. Autrement, il risquerait de goûter à une médecine grecque.

* L'auteur est professeur au service de l'enseignement des affaires internationales à HEC Montréal.