Je suis exaspéré d'entendre les prophètes de malheur («Manifeste pour un Québec éduqué») qui pestent aussitôt qu'on ose prononcer le mot «pédagogie» lorsqu'il est question d'éducation. Il y a là une incohérence flagrante qui me sidère.

Je suis exaspéré d'entendre les prophètes de malheur («Manifeste pour un Québec éduqué») qui pestent aussitôt qu'on ose prononcer le mot «pédagogie» lorsqu'il est question d'éducation. Il y a là une incohérence flagrante qui me sidère.

J'enseigne au collégial depuis plus de 20 ans et j'ose affirmer que la pédagogie appliquée adéquatement n'a jamais fait de mal à personne. Les enseignants qui se drapent dans la vertu de leurs connaissances disciplinaires pour vilipender les méthodes pédagogiques favorisant la réussite des élèves m'ont toujours paru suspects. La remise en question des méthodes d'enseignement ne pouvant être que bénéfique.

On peut critiquer la trop grande importance accordée à la méthodologie dans certaines disciplines. Ou railler la trop grande insistance de certains dirigeants à vouloir faire réussir tous les élèves, quel que soit leur degré d'atteinte des compétences. Mais on exagère sûrement lorsqu'on affirme que les mesures favorisant la réussite du plus grand nombre d'élèves dévaluent les diplômes collégiaux.

Veut-on soutenir par là qu'on ne devrait pas viser la réussite du plus grand nombre d'élèves et que, lorsqu'on aide ceux-ci, on réduit le mérite de leur réussite? Faut-il que les cégépiens suent sang et eau pour que leur diplôme vaille quelque chose?

En 20 ans, j'ai vu passer au bas mot 5000 élèves dans mes classes, autant en philosophie qu'en littérature. La plupart des élèves d'aujourd'hui écrivent mieux, lisent mieux et comprennent mieux les consignes que les élèves de naguère. En outre, les cégépiens d'aujourd'hui sont davantage soumis à des épreuves et à des examens que ceux du passé.

Dans les années 70 ou 80, on pouvait obtenir son diplôme collégial sans savoir véritablement écrire. On pouvait demander à des secrétaires de dactylographier et de corriger les travaux de session peu nombreux. Il n'y avait pas de production finale d'intégration à l'intérieur des cours et encore moins d'épreuve synthèse de programme. Il n'y avait pas non plus d'épreuve uniforme en français.

Il est normal, dans ces conditions, qu'il y ait davantage de soutien aux élèves. Les cours sont plus difficiles que ceux d'autrefois, les contrôles et les épreuves sont plus nombreux et les critères de correction sont plus pointus qu'auparavant. Sans compter que les programmes eux-mêmes sont plus exigeants.

Bref, non seulement on ne décerne pas des diplômes de pacotille au collégial aujourd'hui, mais ils valent certainement plus que ceux d'hier.

* L'auteur enseigne la philosophie au collège Lionel-Groulx, à Sainte-Thérèse.