Le cri du coeur lancé par Fadi Mohamedieh, un jeune étudiant homosexuel désabusé de la communauté gaie, était cinglant, percutant et dressait un portrait tout ce qu'il y a de plus embarrassant de la communauté homosexuelle à laquelle j'appartiens.

Une réponse en bonne et due forme m'apparaissait nécessaire. Non seulement ai-je été personnellement blessé qu'une communauté entière dont je fais partie soit la cible d'attaques injustifiées, mais je considère que d'assimiler tous les homosexuels à un même coup de gueule manque de discernement.

En fait, ce type de raccourci s'apparente en tous points au préjugé que véhiculent tristement certaines personnes lorsqu'elles affirment que tous les musulmans sont des terroristes. De telles ritournelles sont non seulement fausses, mais elles sont aussi nocives pour la cohésion sociale puisqu'elles discréditent automatiquement l'ensemble d'un groupe aux yeux de ceux qui n'en font pas partie.

M. Mohamedieh accuse la communauté homosexuelle d'être machiste, superficielle, hypersexuée, âgiste, immature, extravagante et raciste. Une longue liste d'adjectifs si peu flatteurs qu'elle nous donne l'impression que la communauté homosexuelle n'est composée que des individus les plus répugnants qui soient.

Or, une communauté n'est par définition ni homogène, ni hermétique. Une communauté, c'est un ensemble d'individus qui interagissent en raison du fait qu'ils partagent une ou des caractéristiques communes, sans laquelle ou lesquelles ils ne pourraient véritablement appartenir à la communauté.

Ainsi, la communauté homosexuelle est donc composée d'homosexuels : ce qui permet à tous ces gens d'interagir, de tisser des liens entre eux et de se sentir appartenir à un même groupe, c'est leur homosexualité. Rien de plus. À partir de là, toute autre caractéristique que l'on tenterait d'accoler systématiquement à l'ensemble des homosexuels relèverait soit de la caricature, soit du préjugé.

Je ne nie pas le fait qu'il y ait des homosexuels qui font parfois montre d'homophobie intériorisée. Je ne nie pas non plus que certains n'aient que le sexe en tête ou qu'ils soient centrés sur leur apparence physique. Pas question non plus de nier que certains jeunes hommes aient une peur bleue ou un déplorable dédain de ces hommes gais qui ont franchi le cap de la quarantaine. Je ne joue pas à l'autruche, je reconnais ces choses.

Mais réfléchissons un instant. N'existe-t-il pas des hommes hétérosexuels qui ne parlent que de voitures, qui sacrent à tous les deux mots et qui traitent les femmes comme des objets? N'en connaissez-vous pas qui ne semblent penser qu'au sexe ou qui n'arrivent simplement pas à avoir une relation de couple stable? N'y a-t-il pas des gars et des filles qui vont à la gym tous les jours, non pas pour être en forme et en santé, mais bien pour être beaux et belles et s'admirer longuement dans les grands miroirs qui tapissent les murs?

N'est-il pas assez fréquent que quelqu'un utilise l'expression « vieux pervers » ou « vieux cochon » pour décrire un homme d'un certain âge qui démontre un intérêt envers les jeunes femmes? N'arrive-t-il pas à tout le monde de croiser, de temps à autre, une jeune fille habillée de manière indécente sur la rue? Et enfin, certains hommes n'ont-ils pas une préférence nette pour les femmes asiatiques ou les blanches?

Dit-on pour autant que « la communauté hétérosexuelle » est machiste, hypersexuée, immature, superficielle, âgiste, extravagante et raciste? Non. Il y a autant de façon d'être hétérosexuel qu'il y a d'hétérosexuels. Puis il y a nécessairement autant de façon d'être homosexuel qu'il y a d'homosexuels : l'orientation sexuelle n'est qu'une seule et unique caractéristique à laquelle on ne saurait réduire l'ensemble d'une personne, à moins d'être outrageusement simpliste.

Comme dans toute communauté, certains individus de la communauté homosexuelle vous étonneront par leur ouverture d'esprit, leur dynamisme, leur écoute ou leur travail constant pour améliorer le sort de notre société. À preuve, le milieu communautaire homosexuel est extrêmement productif, inventif et créatif, multipliant les initiatives pour lutter pour l'acquisition de droits ou encore contre l'homophobie, la transmission d'ITSS, les préjugés, etc. Je parle en connaissance de cause puisqu'à travers mon implication bénévole auprès de plusieurs organismes sans but lucratif, j'ai rencontré des dizaines et des dizaines de personnes homosexuelles fantastiques qui n'ont absolument rien à voir avec la description qu'a faite M. Mohamedieh de la communauté homosexuelle.

Donner une gifle à des dizaines de milliers de personnes, voire des centaines de milliers, sous prétexte qu'elles partagent une même caractéristique biologique manque non seulement de discernement, mais aussi de respect.