Le Parti québécois tiendra, ce week-end, un colloque sur l'économie intitulé «Gouvernement souverainiste et création de richesse», où le parti dirigé par Pauline Marois entend faire de la création de richesse le fer de lance de sa politique économique.

C'est là une mesure de tout le chemin parcouru par le Québec sur ces questions. Car c'est une véritable révolution que Mme Marois veut imposer à son parti attaché à une certaine conception de la social-démocratie, où l'on est très à l'aise pour parler de redistribution de richesse, mais pas du tout pour parler de sa création.

Je ne peux évidemment que m'en réjouir. Non seulement parce que j'ai consacré beaucoup d'énergie à m'attaquer à un grand tabou québécois en faisant l'éloge de la richesse. Mais aussi parce que je crois avoir modestement contribué au virage du Parti québécois, en montrant qu'on pouvait concilier la création de richesse avec l'idéal social-démocrate.

Le virage du PQ constitue un considérable progrès. Mais on reste dans le domaine des idées. Parler de richesse, c'est une chose ; réussir à la créer, c'en est une autre. Le véritable défi, pour le Québec, c'est le passage de la parole aux actes. Il n'est pas évident que la démarche amorcée par le PQ permettra de le relever, qu'elle réussira à créer de la richesse: il s'agit, rappelons-le, d'augmenter la productivité, de permettre une croissance plus forte, et d'élever le niveau de vie.

On peut comprendre que la tâche de Mme Marois n'est pas simple. Elle devra convaincre un parti dont certains éléments seront hostiles à ses idées, notamment sa gauche syndicale. Le texte qui sera soumis à la discussion n'est donc pas un plan d'action économique, mais un document politique qui cherche à faire avaler la pilule. On y trouve plein de bonnes idées, sur une révision de la fiscalité vers les taxes à la consommation, une insistance sur la recherche, sur la formation, sur la productivité et l'innovation.

Mais la démarche reste désespérément interventionniste. Le PQ semble avoir du mal à se débarrasser de ses vieilles bibittes. Sa création de richesse passe donc beaucoup par l'État. On propose que l'État soit présent dans les entreprises de ressources naturelles, on pense à un revenu minimum pour les nouveaux entrepreneurs. Par ailleurs, on a du mal à résister à la tentation de redistribuer la richesse avant de l'avoir créée, en promettant des cadeaux qui enrichiront sans doute les récipiendaires, mais n'enrichiront pas la société, comme un salaire pour les décrocheurs ou de l'aide pour l'achat d'une première maison.

Elle est régionaliste. Le document part du principe que tout va bien à Montréal et à Québec, et consacre donc toute l'énergie aux régions aux industries régionales: agriculture, pêche, forêt, tourisme. C'est une grave erreur, car nos grandes villes sont très loin d'avoir atteint le niveau de performance qui permettrait au Québec de progresser.

Et bien sûr, elle est... péquiste. Le document reflète la stratégie de Mme Marois qui, à défaut de référendum, voudrait aller chercher la souveraineté à la pièce. On insiste donc beaucoup trop sur les problèmes associés au régime fédéral, sur les pouvoirs et les milliards que l'on voudrait récupérer : assurance chômage, recherche, éducation. C'était prévisible. Mais l'effet pervers, c'est que cela perpétue l'idée que nos problèmes viennent d'ailleurs.

Mme Marois écrit que «le Québec doit maintenant franchir une nouvelle étape. Il ne s'agit plus de rattraper les autres nations, mais de les dépasser». C'est une excellente façon de poser le problème. Mais pour y parvenir, il faudra que le Québec change beaucoup plus que le Parti québécois semble vouloir prêt à le faire.