L'ONU suggère l'adoption d'un «New Deal vert mondial», le président Sarkozy parle d'un «New Deal économique et écologique» et l'économiste Ricardo Petrella propose un «Plan Marshall global et original».

On le voit bien, la crise qui secoue actuellement la planète (économique, financière, alimentaire, énergétique, à vous de choisir...) est différente des précédentes. Pour la première fois, des chefs d'État, des économistes réputés et des organismes de grande crédibilité exigent que l'environnement se retrouve au coeur des solutions que privilégiera la communauté internationale.

L'expression diffère d'un acteur à l'autre, mais l'idée reste la même: donner au capitalisme un visage plus vert, plus durable, plus moral.

Certes, les diverses crises qui sévissent ne sont pas autant liées au sort de l'environnement, qu'à la spéculation et à l'échec des gouvernements à encadrer les marchés. Mais elles n'en sont pas moins les indices d'un mal profond qui, lui, nous ramène à l'écologie: l'incapacité du système économique à prendre pied dans le XXIe siècle.

De moteur de l'humanité, le marché s'est en effet mué en menace planétaire, en « machine à suicide », pour emprunter l'expression du philosophe Ronald Wright. Rien ni personne n'est à l'abri, pas plus l'environnement que les démunis, les entreprises et les petits épargnants.

La bonne nouvelle, c'est qu'il existe aujourd'hui un consensus sur la nécessité de revoir nos modèles économiques, comme le prouve la tenue prochaine du sommet des pays industrialisés et des grandes économies émergentes, à Washington. Réformer, donc, mais comment?

Voilà où l'idée du «Green New Deal» prend tout son sens. Ses partisans estiment qu'il faut saisir cette rarissime opportunité pour limiter les pertes en capital, certes, mais aussi les pertes en ressources naturelles, en biodiversité.

On propose ainsi l'avènement d'une «économie verte», expression galvaudée qui, il est vrai, avait des accents d'oxymore jusqu'à tout récemment. Mais les temps changent et avec eux, les penseurs, les élus, les entrepreneurs et les investisseurs.

Les voix se font ainsi de plus en plus nombreuses pour exiger un meilleur équilibre entre rentabilité et responsabilité, entre rendement et environnement. Il n'y a qu'à jeter un coup d'oeil au sud de la frontière pour s'en convaincre (et pour comprendre ce qu'est, au juste, une économie verte).

L'auteur à succès Thomas Friedman vient de publier un véritable manifeste pour une économie verte, Hot, Flat, and Crowded. Le baron du pétrole T. Boone Pickens investit massivement dans les énergies renouvelables. Les syndicats et les écolos, réunis au sein de la coalition Blue Green Alliance, exigent des «green jobs». Le candidat présidentiel Barack Obama promet la création de 5 millions d'emplois «col vert». Etc.

«Il y a des moments dans l'histoire, a indiqué cette semaine le ministre de l'Environnement de la Norvège, où il est temps pour une idée de se réaliser, c'est le cas pour l'initiative d'économie verte.»

La table est donc mise. Reste à savoir ce que l'on servira, cependant. Car on voit encore difficilement comment on forcera la communauté internationale à prendre un tel virage. À l'aide d'objectifs obligatoires d'énergies renouvelables? De mesures économiques contraignantes comme la taxe sur le carbone? De vastes bourses climatiques? De cibles ambitieuses enchâssés dans un protocole de Kyoto bis?

À quelque chose, malheur est bon, dit-on. La réponse aux multiples crises nous dira si le dicton, lui, a du bon.