Premier titulaire du ministère de l'Environnement à la fin des années 1970, Marcel Léger avait promis que les lacs du Québec seraient dorénavant mieux protégés. Un engagement réitéré depuis par Robert Bourassa. Puis par André Boisclair, Thomas Mulcair, Line Beauchamp et tout récemment, Jean Charest.

Pourtant, Richard Carignan, biologiste à l'Université de Montréal, est catégorique : «Lentement mais sûrement, on est en train de scrapper nos lacs...»

Voici résumé le film coup-de-poing Nos lacs sous la surface, qui sera présenté à Canal D. D'un côté, les gouvernements successifs et leurs innombrables promesses. De l'autre, les lacs et leur constante dégradation, dont la crise des algues bleues n'était qu'un symptôme.

Le réalisateur Pierre Brochu égrène une à une, pendant près de deux heures, les causes du vieillissement prématuré des lacs : apathie des riverains, agressions des plaisanciers, inefficacité du traitement des eaux, laxisme de la réglementation agricole, manque de ressources des municipalités, etc.

Les problèmes sont donc multiples. Mais ce que démontre avec grande efficacité le documentaire, c'est que derrière presque tous les coupables se cache le ministère québécois de l'Environnement. Non parce qu'il refuse d'adopter des règlements, plutôt parce qu'il refuse de les appliquer.

«Le Ministère, c'est le berger des lacs, fait remarquer le réalisateur. Or ce n'est pas compliqué : le berger semble avoir été conseillé par les loups...»

L'accusation est lourde, mais elle est étayée dans le moindre détail dans Nos lacs sous la surface.

D'abord, le ministère a pris l'habitude, depuis le milieu des années 1990, de pelleter ses responsabilités dans la cour des villes, sans toutefois leur donner les ressources financières nécessaires.

En témoignent ces centaines de municipalités qui n'ont pas même un seul inspecteur à temps plein. Comment savoir si un propriétaire a rasé les arbres qui se trouvaient sur le bord de son lac? Si sa fosse septique ne se vide pas directement dans le bassin versant? Si les occupants du camping ne vident pas leurs eaux grises directement dans le lac? Bref, si la réglementation est respectée?

«Ça toujours été comme ça! tonne l'ancien président de l'UPA Jacques Proulx. Le ministère de l'Environnement ne se donne jamais les moyens de faire appliquer ses règlements. Il est irresponsable!»

Ensuite, il y a le manque de moyens du ministère lui-même. Le gouvernement ne cesse de répéter que l'environnement est une de ses priorités, alors qu'un rapide calcul démontre non seulement que ce domaine est le parent pauvre du gouvernement, mais aussi que son poids a diminué depuis que les libéraux sont au pouvoir.

À peine 0,35 % des dépenses de programme seront consacrées au ministère de l'Environnement en 2009-2010, un peu moins que les 0,39 % du premier budget libéral, il y a six ans.

Dernier problème, le ministère de l'Environnement ne réussit pas à s'imposer auprès des autres ministères, comme l'atteste l'ancien ministre Thomas Mulcair. «Quand tu es ministre de l'Environnement, explique-t-il, tu as le doigt sur le boyau d'oxygène de plusieurs ministères : celui des Affaires municipales qui veut augmenter l'assiette fiscale des villes, celui des Transports qui veut remblayer un milieu humide pour construire un échangeur, etc.»

Ce ne sont donc pas les règlements qui manquent, ajoute-t-il, mais la volonté de les appliquer. Une volonté pourtant annoncée depuis bientôt 40 ans.

Nos lacs sous la surface : dimanche 19 avril, 19h, sur Canal D.

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Entendu cette semaine...

Scott McKay, critique en environnement du PQ: «J'ai proposé un mandat d'initiative, question de faire le point sur l'état des lacs au Québec. Or les députés libéraux ont jugé que le problème n'était pas suffisamment sérieux et ont rejeté l'idée.»

Patrick Huot, adjoint parlementaire à la l'Environnement du PLQ: «Il nous apparaît essentiel de cerner les enjeux afin de mieux définir un futur mandat d'initiative des députés.» 

Photo: CP

Scott McKay

La Presse

Patrick Huot

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0$

C'est le tarif que pourraient payer les étudiants de l'Université Sherbrooke pour utiliser le transport en commun sur la Rive-Sud de Montréal, où l'institution compte un campus. L'UdeS a conclut une entente en ce sens avec la Société de transport de Sherbrooke en 2004. Elle songe à faire la même chose avec le Réseau de transport de Longueuil. De quoi rendre les collégiens d'Édouard-Montpetit verts... de jalousie.

 

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Boom, pas boom?

Le développement des énergies renouvelables connaît un essor sans précédent, annoncent les chercheurs de Yale sur leur site environment360. Les investissements dans le secteur des énergies renouvelables sont en chute libre, affirme pour sa part le groupe de recherche New Energy Finances sur le sien. Qui croire? Ce dernier, malheureusement, qui s'appuie sur des chiffres récents, plutôt que sur des théories. Comme Deloitte et Cleantech Group l'ont fait ces derniers jours, New Energy Finances démontre noir sur blanc que les gouvernements n'utilisent toujours pas l'environnement comme levier pour sortir de la crise économique, malgré leurs promesses en ce sens.

Photo: André Pichette, La Presse