Après la bataille du dimanche, place à celle de la testostérone. Radio-Canada et TVA décrocheront tous deux, selon toute vraisemblance, des licences pour exploiter des chaînes numériques consacrées à 110 % aux sports. Laquelle plaquera l'autre solidement dans la bande?

Les demandes officielles pour TVA Sports et Radio-Canada Sports ont été acheminées au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), qui tranchera sur leur sort d'ici quelques mois. Entre vous et moi, c'est pratiquement certain que le CRTC les approuvera en simultanée. Pourquoi?

Parce que le 3 septembre dernier, après avoir jalousement protégé ce monopole pendant plusieurs années, le CRTC a notamment permis «la concurrence directe entre les services de sports». Comprendre: l'organisme fédéral a ouvert les ondes à d'éventuels adversaires au puissant Réseau des sports (RDS) et à sa petite soeur numérique RIS, le Réseau info sports.

Dans ce nouveau contexte favorable à la compétition, il serait bien mal vu pour le CRTC de bénir le projet de TVA et de couler celui de la SRC, ou vice-versa, n'est-ce pas? En effet.

Mais avant de partir en peur, précisons ceci: oui, le CRTC a fait éclater certaines barrières concurrentielles, mais jamais une de ces nouvelles chaînes sportives ne disposera de la visibilité de RDS ou de RIS.

Car TVA et Radio-Canada ont sollicité des licences de catégorie B, le type plus facile à arracher. En comparaison, la chaîne RIS, qui accapare 0,4 % de parts de marché, c'est très peu, se classe dans la catégorie A, celle qui oblige tous les câblodistributeurs à l'offrir aux consommateurs. Que vous soyez abonné chez Cogeco ou Vidéotron, peu importe, vous avez accès à RIS et à toutes les autres chaînes numériques de catégorie A comme Argent ou Mystère.

En catégorie B, soit une coche en dessous, c'est le contraire: l'opérateur de la chaîne doit lui-même convaincre les Bell Télé ou Star Choice de l'inclure dans les bouquets offerts aux téléspectateurs. Une manoeuvre délicate et complexe. Pour une compagnie comme Star Choice, il en coûte très cher de distribuer un signal que personne ne regarde. Prise 2 et Les idées de ma maison, deux propriétés de TVA, se classent dans la catégorie B. Leurs parts de marché tournent autour de 0,3 %.

Pour la pénétration dans les foyers câblés, la catégorie A est - et de loin - beaucoup plus intéressante, mais le CRTC n'en octroie plus. Raison? Le marché est saturé. Reste donc la catégorie B, qui n'attire pas les foules. D'où la nécessité pour Radio-Canada et TVA de concocter des programmations alléchantes pour hameçonner les amateurs de sports (bonsoir).

Chez TVA, la ligne éditoriale est claire: «Ce qui est rentable, c'est le sport professionnel. Mais la porte est ouverte à tout le reste, comme le sport amateur, le commentaire, l'analyse, la critique et les bulletins de nouvelles», énumère la porte-parole du «vrai» réseau, Nicole Tardif.

TVA ne possède aucune marque sportive, contrairement à Radio-Canada, qui détient notamment les droits de diffusion pour l'Impact, le patinage artistique, la Coupe du monde de soccer de 2010, le football universitaire ainsi que les demi-finales et finales de la Coupe Rogers.

Advenant un feu vert du CRTC, la SRC n'entend toutefois pas déverser la totalité de son contenu sportif sur la nouvelle antenne Radio-Canada Sports. «Ce qui est intégré à la Première Chaîne va y demeurer. La couverture sportive fait partie du mandat d'une chaîne généraliste comme Radio-Canada», souligne la porte-parole de la SRC, Nathalie Moreau.

Évidemment, autant TVA que Radio-Canada salivent devant la possibilité de rapatrier chez eux les parties du Canadien de Montréal, dont les droits exclusifs appartiennent à RDS jusqu'au printemps 2013. Cet automne, les sept premiers matchs des Glorieux, dont trois ont été disputés dans l'Ouest, donc à des heures irrégulières, ont attiré une moyenne de 732 000 fans. Régulièrement, grâce aux hockeyeurs du CH, RDS supplante les chaînes généralistes dans la course aux cotes d'écoute.

Il y a aussi toute la question des Jeux olympiques, qui nourriraient ces nouvelles stations en images spectaculaires. TVA et Radio-Canada n'excluent pas de revenir à l'assaut pour attraper les Jeux de Sotchi (2014) et ceux de Rio de Janeiro (2016). Rappelons que TQS et RDS se partageront la télédiffusion des Jeux de Vancouver (2010) et Londres (2012).

Les chiffres de la télé

Avec ses 1 445 000 fidèles, Lance et compte: le grand duel a raflé le titre de l'émission la plus populaire du lundi soir. TVA a obtenu trois autres émissions millionnaires: La classe de 5e (1 220 000), Yamaska (1 082 000) et Le TVA Nouvelles de 18 h (1 031 000). À Radio-Canada, Les Parent continuent de cartonner (1 135 000), La galère résiste (802 000) et L'auberge du chien noir (993 000) poursuit sur sa lancée.

Mardi soir, l'affrontement entre les Thrashers et le Canadien, regardé par 776 000 personnes, a grugé beaucoup d'audience aux réseaux généralistes. L'excellente série Aveux est descendue à 611 000 téléspectateurs, battue par La promesse de TVA (855 000). À 20 h, le téléroman Providence (960 000) a éclipsé la compétition de TVA, soit Caméra café (713 000) et Taxi 0-22 (787 000).

 

Photo: Reuters

Mardi soir, l'affrontement entre les Thrashers et le Canadien, regardé par 776 000 personnes, a grugé beaucoup d'audience aux réseaux généralistes.